Si le tocilizumab (anticorps monoclonal anti-interleukine 6) avait eu des résultats mitigés il y a encore peu de temps, les résultats publiés en preprint de l’essai britannique Recovery – randomisé, contrôlé, mené sur plus de 4 000 patients hospitalisés – montre une diminution significative de la mortalité à 28 jours dans le groupe traité avec cet anticorps monoclonal : 29 % contre 33 % dans le groupe contrôle. Les 4 116 participants, dont le critère d’éligibilité était une hypoxie (Sp02 < 92 % en air ambiant ou requérant une oxygénothérapie) et une inflammation systémique (protéine C-réactive ≥ 75 mg/L), furent assignés dans 2 groupes à parts égales pour recevoir soit les soins standard seuls, soit les soins standard accompagnés d’une dose de tocilizumab en intraveineux (400 mg à 800 mg, en fonction du poids ; une seconde dose pouvait être administrée 12 à 24 heures plus tard si la condition du patient ne s’était pas améliorée). À noter que 82 % de la cohorte était traitée par corticothérapie, l’étude suggérant ainsi que le tocilizumab s’ajoute aux bénéfices de cette dernière.
Sur d’autres critères, ce traitement a également montré une efficacité : les patients en bénéficiant avaient plus de chances de sortir de l’hôpital à J28 (54 % versus 47 % dans le groupe contrôle). Parmi ceux qui n’étaient pas sous ventilation mécanique invasive au début de l’étude, les sujets traités avec tocilizumab avaient moins de chance d’en avoir besoin – mais aussi de mourir (33 % versus 38 %).
Un anticorps monoclonal, ciblant une autre cytokine, le VEFG (vascular endothelial growth factor), semble avoir des effets intéressants, selon une étude préliminaire récemment publiée dans Nature : le bevacizumab a été administré en une dose unique (500 mg en intraveineux) à 26 patients hospitalisés pour une Covid sévère (critères d’inclusion : fréquence respiratoire ≥ 30 cycles/min, SpO2 ≤ 93 % en air ambiant, ou PaO2/FiO2 comprise entre 100 mmHg et 300 mmHg, et pneumonie diffuse confirmée par imagerie thoracique), recrutés dans deux centres (Chine et Italie) ; 26 autres patients ayant les mêmes caractéristiques et degrés de sévérité de la maladie ont servi de contrôle externe.
Suivis à 28 jours, les patients traités par bevacizumab ont montré une amélioration de 92 %sur le niveau d’oxygénation (contre 62 % dans le groupe contrôle). De plus, une chute de la fièvre dans les 72 heures suivant l’administration du traitement a été observée chez 93 % des sujets. Ces résultats encourageants sont à confirmer par des essais randomisés.
D’autres anticorps monoclonaux suscitent aussi de l’espoir, au point que l’Académie nationale de médecine a appelé à « saisir l’opportunité », considérant que ces traitements pourraient pallier l’insuffisance de la couverture vaccinale des patients à risque de développer une forme grave. Il s’agit en particulier de ceux qui ciblent la protéine Spike du SARS-CoV-2 : le bamlanivimab et la combinaison casirivimab/imdevimab (« Regn-CoV2 »), qui ont fait l’objet de deux essais randomisés contre placebo en double aveugle, montrant une diminution significative de la charge virale (critère principal des études) et une diminution du risque d’hospitalisation (critère secondaire) chez les patients à risque de forme sévère. L’Agence européenne des médicaments a déjà annoncé, début février, avoir commencé l’évaluation progressive du « cocktail » Regn-Cov2…
Laura Martin Agudelo, La Revue du Praticien