Brutalement, le sujet est devenu d’actualité, au croisement de la médecine, de la politique et de la religion. Début septembre, dans un entretien au Parisien, Gérald Darmanin, ministre de l’Intérieur, et Marlène Schiappa, ministre déléguée à la Citoyenneté, ont annoncé l’intention du gouvernement de pénaliser les médecins qui délivrent à des femmes des certificats de virginité. Cette mesure devrait figurer dans un futur projet de loi « sur les séparatismes » qui doit être présenté d’ici à la fin de l’année. Cette décision a surpris les professionnels de santé directement concernés, et ce d’autant qu’une série de questions demeurent sans réponses gouvernementales : quelles sanctions et sur la base de quel délit ?
Au-delà de la mise en œuvre d’une telle pénalisation, à quelle réalité cette volonté politique entend-elle répondre. Combien de certificats de virginité sont-ils délivrés chaque année en France ? Par combien de médecins ? Qui en fait la demande ? « Par définition, il y a peu de chiffres existants à ce sujet, car la grande partie est souterraine. Mais chaque année, plusieurs cas sont révélés », a fait savoir le ministère de l’Intérieur, interrogé par Le Monde. Pour sa part, l’entourage de Marlène Schiappa souligne « assumer de mener le combat pour la fin des certificats de virginité, comme on l’a fait pour l’excision ».
Du point de vue déontologique, la situation est pourtant claire, et ce depuis près de 20 ans. En 2003, le Conseil national de l’Ordre des médecins s’était saisi de la question et avait recommandé de « refuser l’examen et la rédaction d’un tel certificat […] n’ayant aucune justification médicale et constituant une violation du respect de la personnalité et de l’intimité de la jeune femme (notamment mineure) contrainte par son entourage de s’y soumettre ». L’annonce de la décision gouvernementale a toutefois mis en lumière des positions nuancées chez les professionnels de santé concernés.
« Ce sont des cas extrêmement rares, mais ça existe, avec plus ou moins de demandes selon le lieu d’exercice, et essentiellement des demandes religieuses, a expliqué au Monde Joëlle Belaisch-Allart, présidente élue du Collège national des gynécologues et obstétriciens français, favorable à la pénalisation proposée par le gouvernement.1 Il n’y a aucune raison d’exiger que la femme soit vierge au mariage, c’est une pratique d’un autre temps, une violence contre les femmes qui ne doit plus exister. »
Mais pour l’Association nationale des centres d’IVG et de contraception (Ancic), le gouvernement « se trompe de cible » en s’attaquant aux professionnels de santé. « La demande de rédaction de ces certificats pose en effet de réelles et graves questions, mais en aucun cas l’abord répressif vis-à-vis du corps médical ne constitue une réponse », explique-t-elle.2 Comme le gouvernement et les mouvements féministes, cette association estime, certes, que ces demandes de certificats « constituent une violence faite aux femmes, une atteinte à leur dignité et à l’égalité femme-homme ».
Mais l’Ancic ajoute aussitôt être également consciente que, dans certaines situations extrêmes, « des femmes ont comme seule issue de rompre avec leur famille ou de se tourner vers le marché de la virginité (hyménoplastie, hymen artificiel...) ». C’est à ce stade, quand des femmes sont en réel danger, que le fait de refuser la rédaction d’un certificat « constitue une nouvelle violence ». Et c’est alors que des médecins peuvent faire le choix qui leur apparaît le plus éthique : remettre, finalement, ce document afin de les protéger.
En clair, la pénalisation des médecins voulue par le gouvernement ne ferait que nier certaines pratiques communautaires sans les faire disparaître ; et sans permettre qu’une telle demande puisse être l’occasion d’accueillir, évaluer la situation, et questionner ces pratiques avec la femme concernée. Où l’on en vient à se demander pourquoi le pouvoir exécutif, avant d’annoncer sa volonté de pénaliser, n’a-t-il pas pris le temps de consulter celles et ceux qui, en première ligne, auraient pu le dissuader de prendre une mesure qui va à l’encontre de l’objectif affiché ?
Au-delà de la mise en œuvre d’une telle pénalisation, à quelle réalité cette volonté politique entend-elle répondre. Combien de certificats de virginité sont-ils délivrés chaque année en France ? Par combien de médecins ? Qui en fait la demande ? « Par définition, il y a peu de chiffres existants à ce sujet, car la grande partie est souterraine. Mais chaque année, plusieurs cas sont révélés », a fait savoir le ministère de l’Intérieur, interrogé par Le Monde. Pour sa part, l’entourage de Marlène Schiappa souligne « assumer de mener le combat pour la fin des certificats de virginité, comme on l’a fait pour l’excision ».
Du point de vue déontologique, la situation est pourtant claire, et ce depuis près de 20 ans. En 2003, le Conseil national de l’Ordre des médecins s’était saisi de la question et avait recommandé de « refuser l’examen et la rédaction d’un tel certificat […] n’ayant aucune justification médicale et constituant une violation du respect de la personnalité et de l’intimité de la jeune femme (notamment mineure) contrainte par son entourage de s’y soumettre ». L’annonce de la décision gouvernementale a toutefois mis en lumière des positions nuancées chez les professionnels de santé concernés.
« Ce sont des cas extrêmement rares, mais ça existe, avec plus ou moins de demandes selon le lieu d’exercice, et essentiellement des demandes religieuses, a expliqué au Monde Joëlle Belaisch-Allart, présidente élue du Collège national des gynécologues et obstétriciens français, favorable à la pénalisation proposée par le gouvernement.1 Il n’y a aucune raison d’exiger que la femme soit vierge au mariage, c’est une pratique d’un autre temps, une violence contre les femmes qui ne doit plus exister. »
Mais pour l’Association nationale des centres d’IVG et de contraception (Ancic), le gouvernement « se trompe de cible » en s’attaquant aux professionnels de santé. « La demande de rédaction de ces certificats pose en effet de réelles et graves questions, mais en aucun cas l’abord répressif vis-à-vis du corps médical ne constitue une réponse », explique-t-elle.2 Comme le gouvernement et les mouvements féministes, cette association estime, certes, que ces demandes de certificats « constituent une violence faite aux femmes, une atteinte à leur dignité et à l’égalité femme-homme ».
Mais l’Ancic ajoute aussitôt être également consciente que, dans certaines situations extrêmes, « des femmes ont comme seule issue de rompre avec leur famille ou de se tourner vers le marché de la virginité (hyménoplastie, hymen artificiel...) ». C’est à ce stade, quand des femmes sont en réel danger, que le fait de refuser la rédaction d’un certificat « constitue une nouvelle violence ». Et c’est alors que des médecins peuvent faire le choix qui leur apparaît le plus éthique : remettre, finalement, ce document afin de les protéger.
En clair, la pénalisation des médecins voulue par le gouvernement ne ferait que nier certaines pratiques communautaires sans les faire disparaître ; et sans permettre qu’une telle demande puisse être l’occasion d’accueillir, évaluer la situation, et questionner ces pratiques avec la femme concernée. Où l’on en vient à se demander pourquoi le pouvoir exécutif, avant d’annoncer sa volonté de pénaliser, n’a-t-il pas pris le temps de consulter celles et ceux qui, en première ligne, auraient pu le dissuader de prendre une mesure qui va à l’encontre de l’objectif affiché ?
Références
1. Cordier S. La délivrance de certificats de virginité fait débat au sein du corps médical. Le Monde. 17 septembre 2020.
2. Ancic. Communiqué de presse sur les certificats de virginité. 14 septembre 2020. https://bit.ly/3cLiAXP
2. Ancic. Communiqué de presse sur les certificats de virginité. 14 septembre 2020. https://bit.ly/3cLiAXP