L'Anses a mené une nouvelle expertise sur les risques liés à l'exposition de la population antillaise au chlordécone et sur les mesures de prévention.  

Un risque de surexposition au chlordécone confirmé

En 2021, à la lumière de nouvelles études toxicologiques et épidémiologiques sur le chlordécone, l’Anses a revu la valeur toxicologique de référence (VTR) externe (alimentaire) et établi une valeur de référence interne (concentration dans le sang) : 0,17 microgramme par kilo de poids corporel par jour pour la première et 0,4 microgramme par litre de plasma pour la deuxième. 

Dans l’expertise publiée ce jour, les auteurs ont comparé ces valeurs aux données de chlordéconémie et d’exposition par voie alimentaire issues de l’étude Kannari (2013-2014). Il en ressort qu’une partie de la population antillaise a un risque de surexposition au chlordécone. En particulier :

  • 14 % de la population adulte en Guadeloupe et 25 % en Martinique ont un dépassement de la VTR chronique interne ; 
  • 2 % à 12 % de la population antillaise ont un dépassement de la VTR chronique externe. 
  • Les individus résidant en zone réputée contaminée ont des taux de dépassement des VTR supérieurs à ceux résidant en zone réputée non contaminée.

 De mesures efficaces pour réduire l’exposition

Pour éviter une surexposition au chlordécone, l’Anses avait formulé trois recommandations de limitation de consommation de certains aliments issus des circuits informels dans son avis de 2007 :

  • limiter à quatre fois par semaine la consommation de produits de la pêche en provenance des circuits courts (pêche de loisir, de subsistance ou achat sur le bord des routes) ;
  • ne pas consommer de produits de pêche en eau douce issues des zones d’interdiction de pêche définies par arrêté préfectoral ;
  • limiter à deux fois par semaine la consommation de racines et de tubercules issus des jardins familiaux en zone réputée contaminée. En cas d’incertitudes, s’adresser aux conseillers du programme JAFA.

Dans sa nouvelle expertise, l’Anses conclut que le respect de l’ensemble de ces trois recommandations permet aux populations exposées de réduire fortement le risque de dépasser la valeur sanitaire externe.

Maîtriser la contamination des œufs

L’expertise révèle également que la consommation d’œufs autoproduits en zone contaminée contribue fortement à l’exposition au chlordécone. Par conséquent, l’agence recommande de renforcer l’adhésion et le recours aux programmes jardins familiaux JAFA pilotés par les agences régionales de santé en Guadeloupe et en Martinique. Ces programmes permettent de vérifier la concentration en chlordécone du sol et de fournir des conseils personnalisés sur les pratiques d’élevage adaptés aux jardins familiaux. 

D’autres pistes 

De nouvelles études sont en cours, qui permettront d’apporter des recommandations pratiques supplémentaires. L’étude ChlorExpo, lancée début 2021, vise à obtenir des données de terrain sur les habitudes d’approvisionnement, de préparation et de cuisson des aliments. L’étude de biosurveillance Kannari 2, lancée prochainement par Santé publique France, permettra d’actualiser l’évaluation des risques à partir des données d’imprégnation.

D’après 
Anses. Chlordécone aux Antilles : des pratiques efficaces existent pour réduire l’exposition alimentaire. 6 déc 2022 
Pour en savoir plus
Martin-Agudelo. Le chlordécone : un cas d’école. Entretien avec Luc Multigner. Rev Prat Med Gen 2022 ;36 (1064):58-60

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