Les Groupes coopérateurs en oncologie (GCO) ont réalisé la plus grande étude rétrospective de cohorte à ce jour dans le monde concernant les patients atteints de cancer et de Covid-19. Les résultats, qui viennent d’être publiés dans l’European Journal of Cancer, suggèrent en particulier que les traitements anticancéreux administrés au cours des 3 mois précédents n’ont pas eu d’effet délétère sur l’évolution de la Covid.

 

Entre le 2 avril et le 30 juin 2020, 1 289 Français d’âge médian 67 ans ont été inclus, dont 62 % étaient des hommes et 52 % des fumeurs ou anciens fumeurs. Les cancers les plus fréquents de l’étude étaient les digestifs (36 %) et les thoraciques (24 %), et 59 % des sujets avaient un cancer métastatique au moment du diagnostic de Covid-19. 

Si la sévérité de la Covid et la mortalité étaient élevées chez ces patients (respectivement 33 % et 29 %), l’étude montre que ces données étaient principalement déterminées par l’âge, le sexe masculin, les comorbidités et l’état général des sujets, sans compter qu’il était difficile d’imputer avec certitude un décès à la Covid-19 ou à l’évolution du cancer chez des patients qui étaient majoritairement en fin de vie de leur maladie.

En revanche, l’utilisation récente de traitements systémiques (chimiothérapie cytotoxique, immunothérapie, thérapie ciblée ou hormonothérapie) n’a pas été associée à un risque significatif de décès chez ces patients, sauf pour l’administration récente d’une chimiothérapie cytotoxique dans le sous-groupe ayant une RT-PCR positive pour le SARS-CoV-2 (952 patients), mais les auteurs soulignent que l’augmentation du risque dans ce cas était à la limite de la significativité.

L’étude attire également l’attention sur l’interruption des traitements : 40 % des patients l’ont arrêté pendant la période concernée. Une préoccupation qui refait surface à l’heure de la deuxième vague de l’épidémie. La Ligue contre le cancer, par exemple, a appelé le 20 novembre à éviter la déprogrammation des soins, examens et consultations pour limiter les pertes de chance – ou, du moins, quand ce n’est pas possible, à organiser progressivement les déprogrammations et organiser le suivi pour reprogrammer.

Astrid Lièvre, coordinatrice de la cohorte de cette étude, a quant à elle appelé à évaluer « l’impact de ces interruptions sur l’évolution du cancer » pour « déterminer si les changements de traitement liés à la Covid-19 ont accéléré la progression du cancer et conduit à une diminution de la survie ».

Pour en savoir plus

GCO. Les cancérologues tirent la sonnette d’alarme ! Cancer + Covid-19 : les traitements doivent être poursuivis. 20 novembre 2020.

Lièvre A, Turpin A, Ray-Coquard I, et al. Risk factors for Coronavirus Disease 2019 (COVID-19) severity and mortality among solid cancer patients and impact of the disease on anticancer treatment: A French nationwide cohort study (GCO-002 CACOVID-19). Eur J Cancer 2020;141:62-81 (disponible en libre accès jusqu’au 17 décembre).

L.M.A., La Revue du Praticien