Le 14 décembre 2013, j’étais au comble de la joie de remettre la médaille confédérale à Michel Combier pour honorer son action à la tête de l’Union nationale des omnipraticiens français (UNOF) et au service de la Confédération des syndicats médicaux français (CSMF).
Aujourd’hui, je pleure un ami de longue date.
Nous sommes devenus amis en 1975, au collège Sainte-Barbe, à Toulouse, où nous étions tous deux « pions » pour financer nos études de médecine.
Passé le temps des études, nous avons été happés par nos vies professionnelle et personnelle. Tandis que je repartais dans mon cher Cantal, Michel s’est installé à Toulouse, où il a épousé une infirmière, Christine, l’amour de sa vie, et de cette union est née une fille, Virginie, qu’il adorait.
Je le retrouve au début des années 1990, alors que je présidais l’UNOF. Il devient un compagnon de combat dans la lutte contre le plan Juppé : Michel Combier refusait que les Caisses et les pouvoirs publics piétinent les généralistes et la médecine libérale. C’était le temps maudit de l’enveloppe financière globale, des fameux « reversements collectifs » censurés par le Conseil constitutionnel, puis celui des lettres-clés « flottantes » instituées par Martine Aubry, dans un plan que nous qualifiions alors avec humour de « plan Jubry ».
Tout naturellement, il est élu président du Syndicat des médecins de la Haute-Garonne en 1998 et rejoint aussitôt le comité directeur de l’UNOF, dont il deviendra le secrétaire général en 1999.
Nous avons lancé la grève des gardes en 2002 et obtenu de haute lutte la consultation à 20 euros, la fin des gardes obligatoires tous les jours, toute l’année, sans compensation ni reconnaissance. Notre mouvement a donné naissance à la permanence des soins organisée, reconnue mission de service public et financée.
Et lorsque je suis devenu président de la CSMF – très naturellement et une évidence pour tous – Michel est devenu président de l’UNOF.
Avec Michel Combier, la maison généraliste a été bien menée dans un esprit de fidélité aux valeurs confédérales d’une médecine « libérale et sociale » qui guident l’action de cette importante famille à l’intérieur de la CSMF. Tout au long de ces années, sa jovialité, sa rondeur et son habilité à négocier ont permis des avancées décisives au service de la cause des médecins généralistes. Il est ainsi l’un des concepteurs de la ROSP pour le médecin traitant. Il a mené tout le travail préparatoire et d’analyse du P4P de nos confrères britanniques, pour en faire la critique et en retirer ce qu’il y avait de meilleur pour les généralistes français. Il y a ajouté un zeste des systèmes californien et australien. Le dispositif qu’il a conçu et fait accepter à la CNAM a permis de revaloriser très significativement le revenu des médecins généralistes dans un contexte où le gouvernement rechignait déjà à investir sur la valeur de l’acte. Il a aussi largement contribué à la conception de la Classification commune des actes médicaux cliniques, instituant une hiérarchisation des consultations afin de rémunérer l’acte médical selon sa difficulté et le temps passé.
Au niveau régional, Michel a été président de l’Union régionale des médecins libéraux (URML) Midi-Pyrénées entre 2000 et 2002, puis à l’Union régionale des professionnels de santé (URPS) de Midi-Pyrénées, où il a travaillé en tandem avec son ami Maurice Bensoussan, élu du Syndicat des médecins libéraux (SML).
Il a aussi été un des piliers de l’interpro. Au Centre national des professionnels de santé (CNPS) tout d’abord, puis à l’Union nationale des professionnels de santé (UNPS), où il portait une vision de l’organisation des soins en intercomplémentarité.
L’engagement de Michel Combier n’a pas été que national. Il s’est pleinement investi dans son métier et son cabinet toulousain ancré dans un quartier défavorisé. Il était un médecin de famille proche de ses patients, toujours disponible et très apprécié. Il s’était appliqué à lui-même les convictions qu’il portait syndicalement en faveur de l’exercice regroupé, et a ainsi modernisé son propre cabinet, avec ses associés, pour accueillir des internes et leur communiquer sa passion de la médecine générale.
Sur le plan humain, Michel, c’était aussi un rire communicatif, un regard malicieux, de bons mots que son accent toulousain, dont il jouait, rendait tellement savoureux. Son humour et son amour de la dérision en faisaient un aimant à amis. Malgré sa stature de rugbyman, son sport de prédilection, ses centres d’intérêts allaient bien au-delà du Stade toulousain. Michel Combier était un homme très cultivé, fin lettré, avide de lectures en tous genres et grand amateur de musique. Celle des Beatles, dont il possédait tous les disques dans leurs différentes éditions. Celles aussi du rock’n roll, de la pop, de la country, qui le transportaient dans son rêve d’Amérique. Son Amérique, qu’il découvrira avec son épouse Christine peu avant que la maladie ne vienne le frapper. Il était enfin le grand-père attentionné d’une petite fille, Éline, à qui il a transmis l’amour du « beau jeu ».
Il s’est éteint chez lui, au milieu de ses livres et de sa collection de disques, entouré de son épouse Christine et de sa fille Virginie.
Je perds et je pleure un ami, un compagnon de route et de jeunesse, un ami pour la vie.
La médecine générale, l’UNOF, devenue « Les Généralistes de la CSMF », perdent et pleurent un homme loyal, droit et sincère, comme il en existe peu.
Il nous manquera, mais la maison confédérale, sa maison, ne l’oubliera pas.
Nos pensées attristées et notre affection vont à Christine, Virginie et Éline.
Adieu, l’ami. Repose en paix.