Les effets du confinement sur les addictions – consommation de tabac, alcool et autres produits psychoactifs, jeux d’argent et de hasard – ont fait l’objet de plusieurs études dont les résultats ont été synthétisés par l’Observatoire français des drogues et des toxicomanies (OFDT) dans le dernier numéro de sa revue Tendances

 

En ce qui concerne le tabac, même si la forte hausse des ventes, notamment au début du confinement (+23,6 % entre mars et avril), peut davantage être attribuée au transfert d’achats du fait de la fermeture des frontières – la hausse étant concentrée dans les départements frontaliers –, la recrudescence du tabagisme y est également visible. 

Un quart des fumeurs ont en effet augmenté leur consommation pendant le confinement, selon l’enquête CoviPrev de Santé publique France, avec une hausse moyenne de 5 cigarettes par jour chez les fumeurs quotidiens (94 % des interrogés), un phénomène plus marqué chez les 25-34 ans (41 %) et les actifs en télétravail (37 %). 

Bien que globalement l’usage soit resté plutôt stable (55 % des sujets interrogés par CoviPrev), l’offre ayant été peu altérée car les produits nicotiniques ont été reconnus substance de « première nécessité », l’OFDT s’interroge sur les effets à plus long terme de la recrudescence observée, en particulier parmi les usagers les plus réguliers. 

Un mouvement qui contredit malheureusement la baisse entamée ces dernières années : selon l’Observatoire régional de santé d’Île-de-France, la prévalence du tabagisme quotidien était passée de 30,1 % à 28,1 % entre 2016 et 2017 en France (pour une diminution de 26,1 % à 22 % dans la seule région francilienne). 

Corrélée au risque d’anxiété et de dépression, la consommation de tabac a pu être favorisée par l’ennui, le manque d’activité et le stress liés au confinement, constate Viêt Nguyen Thanh, responsable de l’unité addictions à la direction de la prévention et de la promotion de la santé à Santé publique France. Par ailleurs, la forte dépendance vis-à-vis du tabac concerne plus fréquemment les personnes en situation de précarité, avec de faibles revenus ou au chômage (selon les données de l’ORS Île-de-France) : encore un aspect qui a été empiré par le confinement… C’est dire à quel point le sujet demeure d’actualité, à l’heure de la deuxième vague épidémique – et alors que le premier ministre a déclaré ne pas exclure des reconfinements locaux.

Des données fondamentales, à l’approche du Moi(s) sans tabac qui, soit dit en passant, s’adapte cette année au contexte, en proposant des ressources numériques : renouvellement du site et de l’application Tabac Info Service, mise à disposition par la Société francophone de tabacologie du MOOC « Tabac, arrêtez comme vous voulez » à l’attention des professionnels de santé, entre autres.

Pour en savoir plus

OFDT. Les addictions en France au temps du confinement. Tendances n° 139, septembre 2020.

Santé publique France. Tabac, alcool : quel impact du confinement sur la consommation des Français ? Mai 2020.

Fédération Addiction. Mois sans tabac : comment le mettre en œuvre en temps de Covid ? 5 octobre 2020.

Laura Martin Agudelo, La Revue du Praticien