Les inhibiteurs de la phosphodiestérase 5 (sildénafil, tadalafil, vardénafil, avanafil) sont le traitement de première intention de la dysfonction érectile. Des effets indésirables oculaires (anomalies de la vision des couleurs et de la luminosité) liés à leur usage sont connus depuis plusieurs années. Une vaste étude américaine vient d’alerter sur d’autres risques ophtalmiques rares mais graves…

Les inhibiteurs de la phosphodiestérase 5 (iPDE5) – sildénafil, tadalafil, vardénafil, avanafil – sont des molécules utilisées en première intention dans le traitement de la dysfonction érectile, sauf contre-indication (notamment cardiovasculaires et certaines pathologies ophtalmiques, telles que : neuropathie optique ischémique antérieure non artéritique [NOIAN], troubles héréditaires de la rétine). Certains risques visuels sont connus : troubles de la vision des couleurs ou de la perception lumineuse, dépendants de la dose et disparaissant généralement en quelques heures ; cas de NOIAN ; diminutions de l’acuité visuelle. Mais d’autres, plus rares, n’avaient pas été étudiés jusqu’à présent.

Une étude de phase IV, récemment publiée dans le JAMA Ophtalmology, a évalué de tels risques, passés inaperçus, car plus rares, dans les essais de phase III : outre la neuropathie optique ischémique, les chercheurs ont également étudié le lien entre la prise de sildénafil, tadalafil, vardénafil ou avanafil et le décollement séreux de la rétine ou l’occlusion veineuse rétinienne.

Cette large étude américaine comprenait les données de plus de 200 000 hommes, avec un suivi entre 2006 et 2020. Les participants ont été suivis jusqu’au premier diagnostic de neuropathie optique ischémique, décollement séreux de la rétine ou occlusion de la veine rétinienne (ou jusqu’à la fin de leur couverture d’assurance) ; ceux ayant eu un diagnostic pour l’une de ces 3 pathologies dans l’année précédant l’entrée dans l’étude ont été exclus. Pour chaque cas, 4 témoins ont été appariés selon l’âge et le moment de l’inclusion.

Le risque de survenue d’un de ces événements pour les utilisateurs réguliers d’iPDE5 a été comparé à celui des non-utilisateurs, en contrôlant pour les éventuelles variables de confusion (hypertension, maladie coronaire, tabagisme, diabète, pour les 3 affections étudiées ; apnée du sommeil pour la neuropathie optique ischémique spécifiquement). L’analyse cas-témoins comprenait donc 1 146 cas d’événements oculaires : 278 décollements séreux de la rétine, 628 occlusion veineuses rétiniennes et 240 neuropathies optiques ischémiques ; et 4 584 témoins. L’âge moyen dans les 2 groupes était de 64,6 ans.

Résultats : le groupe ayant un usage régulier d’iPDE5 avait un surrisque de survenue de ces 3 événements. Le rapport des taux d’incidence (IRR, incidence rate ratio) des 2 groupes, pour les 3 pathologies réunies, était de 1,85 (IC95% : 1,41-2,42). Le surrisque était plus marqué pour le décollement séreux de la rétine : IRR de 2,58 (IC95% : 1,55-4,30) ; il était de 1,44 (IC95% : 0,98-2,12) pour l’occlusion veineuse rétinienne et 2,02 (IC95% : 1,14-3,58) pour la neuropathie optique ischémique.

Les auteurs insistent ainsi sur l’importance d’alerter les patients utilisant ces thérapeutiques sur ces effets oculaires, et de prôner la vigilance en cas d’anomalies visuelles.

À lire aussi : 

Etminan M, Sodhi M, Mikelberg FS, et al. Risk of Ocular Adverse Events Associated With Use of Phosphodiesterase 5 Inhibitors in Men in the US. JAMA Ophtalmol 7 avril 2022.
VanderBeek BL, Maguire MG. Phrase 4 Studies on Phosphodiesterase 5 Inhibitors. JAMA Ophtalmol 7 avril 2022.
Faix A. Dysfonction érectile (1re partie). Rev Prat Med Gen 2021;35(1056);177-80.
Faix A. Dysfonction érectile (2nde partie). Rev Prat Med Gen 2021;35(1057);227-34.

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