La HAS a autorisé l’accès précoce au Paxlovid (nirmatrelvir-ritonavir) pour le traitement des patients infectés par le SARS-CoV-2 à risque d’évolution vers des formes graves. Bien qu’il soit un traitement per os, sa prescription n’est pas évidente, en raison notamment des nombreuses précautions d’emploi liées aux interactions médicamenteuses de ces antiviraux. Fiche pratique sur l’efficacité, les patients éligibles, les contre-indications, les modalités de prescription…

 

Qu’est-ce que le Paxlovid ?

Ce traitement bloque la réplication du SARS-CoV-2 dans l’organisme, par l’association d’un inhibiteur de la protéase virale (enzyme impliqué dans la réplication du virus) appelé PF-07321332 (nirmatrelvir) et d’un médicament générique utilisé contre le VIH depuis plusieurs décennies, le ritonavir, qui a été ajouté pour augmenter l’efficacité de l’inhibiteur de protéase (sous forme de comprimé, ce dernier était métabolisé trop rapidement).

Dans les résultats d’un essai de phase II/III randomisé en double aveugle (étude EPIC-HR), il a montré une réduction du risque de progression vers une forme sévère de Covid-19 (hospitalisation ou décès) d’environ 88 %, lorsqu’il est administré jusqu’à 5 jours après le début des symptômes chez des patients à risque (résultats annoncés par le laboratoire, en cours d’évaluation par les pairs). Le mécanisme d’action de ce médicament laisse espérer un maintien de l’efficacité sur les différents variants, y compris omicron, ce que des données préliminaires in vitro suggèrent également. 

D’après l’analyse de tolérance de l’étude EPIC-HR, il y a eu 7,3% de patients avec un effet indésirable lié au traitement dans le groupe Paxlovid (versus 4,3% dans le groupe placebo). Les plus fréquemment rapportés étaient : dysgueusies, diarrhée, nausées, céphalées, vomissements et pyrexie.


Quels patients et quelle posologie ?

Premier traitement disponible en ville et pouvant être prescrit par les généralistes, cet antiviral est indiqué dans le traitement du Covid chez les adultes ne nécessitant pas d’oxygénothérapie et qui sont à risque élevé d’évolution vers une forme grave. Le 11 juillet, la DGS a élargi les indications, dans le contexte de circulation croissante des variants BA.4 et BA.5 : 

– patients immunodéprimés, quel que soit leur âge et leur statut vaccinal ;

– patients ayant une comorbidité à haut risque de forme sévère, quel que soit leur âge, lorsque leur schéma vaccinal est incomplet (non vacciné, absence de 1er rappel, absence de 2e rappel chez les > 60 ans) ;

– patients > 60 ans même sans comorbidité lorsque leur schéma vaccinal est incomplet (absence de 2e rappel notamment).

La HAS souligne toutefois que Paxlovid n’est pas destiné à être utilisé comme un substitut à la vaccination contre le SARS-CoV-2 et ne dispense pas les patients du respect des mesures barrières et de distanciation physique.

Le traitement doit être administré dès que possible après le diagnostic positif, maximum 5 jours après l’apparition des symptômes (infection confirmée par test PCR ou antigénique).

Il est administré par voie orale, 2 fois par jour (toutes les 12 heures) pendant 5 jours, sous forme de comprimés : 2 comprimés de nirmatrelvir, soit 300 mg, et 1 comprimé de ritonavir (100 mg), qui peuvent être pris avec ou sans nourriture, avalés entiers (ni mâchés, ni cassés, ni écrasés).

Ce traitement peut être prescrit par tout médecin (sur une ordonnance classique depuis mai) et est disponible dans les établissements de santé et dans les pharmacies d’officine. La HAS s'est prononcée en faveur de son remboursement le 25 avril


Quelles contre-indications ?

– Patients ayant une insuffisance hépatique sévère (classe C de Child Pugh). En revanche, le traitement peut être utilisé sans ajustement de posologie chez les patients ayant une insuffisance hépatique légère (classe A de Child-Pugh) ou modérée (classe B de Child-Pugh).

– Patients ayant une insuffisance rénale sévère (DFG < 30 mL/min). Une adaptation de la posologie est nécessaire chez les patients ayant une insuffisance rénale modérée (1 seul comprimé de nirmatrelvir avec le comprimé de ritonavir toutes les 12 heures).

–  Pendant la grossesse et chez les femmes en âge de procréer n’utilisant pas de contraception, l’utilisation du Paxlovid n’est pas recommandée. De plus, le ritonavir peut réduire l’efficacité des contraceptifs hormonaux combinés : il convient donc de conseiller aux patientes utilisant ce type de contraception d’utiliser une méthode alternative efficace ou une méthode « barrière » supplémentaire pendant le traitement et jusqu’au cycle menstruel suivant l’arrêt du Paxlovid.

En outre, l’allaitement doit être interrompu pendant le traitement et jusqu’à 7 jours après sa fin.

Enfin, certaines interactions médicamenteuses constituent aussi des contre-indications (v. tableau ci-dessous). Dans ces cas, Paxlovid ne pourrait être administré que si ces traitements peuvent être interrompus le temps de la prise du Paxlovid.

Tableau 1

D’autres interactions médicamenteuses (v. 2 tableaux ci-dessous) permettent – avec, selon les cas, un arrêt provisoire ou une adaptation des doses des médicaments déjà pris – la prescription concomitante du Paxlovid et des traitements déjà suivis par le patient. Ces interactions nécessitent la mise en place d’un suivi rapproché.

Tableau 2

Tableau 2 bis

Se référer au RCP pour une information complète, notamment aux rubriques 4.3 et 4.5.

La Société française de pharmacologie et de thérapeutique a élaboré des recommandations sur les conduites à tenir dans le cadre de l'association de divers médicaments au Paxlovid : elles sont accessibles sur ce lien.

En cas de contre-indication, le recours à l’anticorps monoclonal Xevudy (sotrovimab) est possible en curatif. En outre, le traitement prophylactique par anticorps monoclonaux Evusheld (tixagévimab-cilgavimab) doit être proposé aux patients éligibles (la combinaison Ronapreve [casirivimab-imdévimab] ne doit plus être utilisée, car inefficace contre omicron).

Enfin, la HAS rappelle que ces préconisations sont susceptibles d’évoluer en fonction de nouvelles données.


*Liste des personnes sévèrement immunodéprimées concernées (établie par Conseil d’orientation de la stratégie vaccinale [COSV], avis du 19 novembre 2021) :

– transplantés d’organes solides ;

– transplantés récents de moelle osseuse ;

– patients dialysés ;

– atteints de maladies auto-immunes sous traitement immunosuppresseur agressif de type anti-CD20 (rituximab [Mabthéra, Rixathon, Truxima]) ou antimétabolites (mycophénolate mofétil [Cellcept, Myfortic], azathioprine [Imurel]) ;

– de certains types de lymphomes traités par anti-CD20 ou inhibiteurs de BTK ;

– de leucémie lymphoïde chronique ;

– de formes rares de déficits immunitaires primitifs ;

– de myélomes sous traitement ;

– ayant reçu dans l’année un traitement lymphopéniant et qui n’ont pas de lymphocytes B circulants.

**Liste des patients à très haut risque de forme sévère, d’après la HAS :

‒ atteints de polypathologies chroniques et ayant au moins deux insuffisances d’organes ;

‒ de certaines maladies rares et particulièrement à risque en cas d’infection (liste spécifique établie par le COSV et les filières de santé maladies rares, p. 8 de la fiche « Réponses rapides » de la HAS) ;

‒ de trisomie 21 ;

– patients cités ci-dessus (atteints de cancers et de maladies hématologiques malignes en cours de traitement par chimiothérapie, de maladies rénales chroniques sévères, dont dialysés, transplantés d’organes solides et cellules souches hématopoïétiques…).


LMA, La Revue du Praticien

Pour en savoir plus :

DGS. Mise à disposition l’antiviral du laboratoire Pfizer : Paxlovid (association de PF-07321332 150 mg et ritonavir 100 mg, comprimés pelliculés). 2 février 2022.

SFPT. Recommandations thérapeutiques dans le cadre d'associations de médicaments avec le nirmatrelvir/ritonavir (Paxlovid). 4 février 2022.

HAS. Covid-19 : accès précoce accordé au Paxlovid en traitement curatif. 21 janvier 2022.

HAS. Réponse rapide dans le cadre du COVID-19. Traitement par antiviral des patients à risque de forme grave de la Covid-19. 20 janvier 2022.

HAS. Protocole d’utilisation thérapeutique et de recueil de données (PUT-RD). Accès précoce – Paxlovid (PF-07321332/ritonavir). 20 janvier 2022.