La psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent en France est actuellement traversée de paradoxes : elle est en crise alors même qu’elle est de plus en plus sollicitée ; elle se diversifie et s’ouvre sur différents champs médicaux et non médicaux, ce qui la nourrit mais la menace d’étiolement et de diminution de la qualité de ses services.

 

Tandis que son domaine s’étend – car entre 1950 et aujourd’hui elle est « sortie de l’asile » pour décrire plus finement, repérer et prendre en charge plus largement la souffrance psychique des enfants –, le nombre de pédopsychiatres est en chute libre : en 2017, ils n’étaient plus que 600, dont 80 % de plus de 60 ans !

Ayant souffert d’une réduction des postes pour des motifs économiques depuis 3 décennies, dont la gravité est accentuée par le fait que cette spécialité n’est pas clairement distinguée en France de la psychiatrie générale (contrairement au reste de l’Europe), la discipline doit également faire face à une réorganisation issue de nouvelles cliniques et pratiques et de la multiplication des modèles théoriques. 

Cette diversification (psychiatrie du bébé et périnatalité, troubles du spectre de l’autisme, du langage, des apprentissages, de l’abus, la carence ou la maltraitance, ainsi que la psychiatrie de l’adolescent avec les troubles du comportement alimentaire, les conduites à risque, le suicide et les addictions, entre autres) rend, par exemple, difficile une offre complète dans chaque centre médico-psychologique (CMP) ou hôpital de jour. 

Autrefois clé de voûte de l’organisation des soins en pédopsychiatrie, le CMP étouffe donc aujourd’hui par une demande massive et hétérogène, aggravée par les carences des services sociaux, de l’éducation spécialisée et de la justice qui font des dispositifs de pédopsychiatrie l’ultime recours de nombreuses familles en situation de précarité.

Alors que la psychiatrie de l’enfant et l’adolescent est définie au niveau international comme une priorité de santé publique (l’OMS estime que l’accroissement de la demande de soins dans ce domaine sera de 50 % dans les 10 prochaines années), comment la pédopsychiatrie française pourra-t-elle se renouveler et s’adapter aux changements ? Et, surtout, lui en donnera-t-on les moyens ?

C’est à lire dans :

Marcelli D. Pédopsychatrie : plébiscitée mais menacée de disparition. Rev Prat 2020;70:713-4.

Georgieff N. Enjeux et transformations de la pédopsychiatrie en France. Rev Prat 2020;70:715-8.

L.M.A., La Revue du Praticien