Essai randomisé en double aveugle contrôlé par placebo, ACTT-1 fut mené sur 1 062 patients hospitalisés aux États-Unis, dont 541 furent assignés aux bras remdésivir, recevant 200 mg de l’antiviral le premier jour, puis 100 mg/j les 9 jours suivants. Le temps médian de récupération de ces sujets fut de 10 jours, contre 15 pour le groupe placebo. De plus, une amélioration clinique significative à J15 était plus fréquemment constatée dans le groupe remdésivir que dans le groupe placebo.
Néanmoins, l’effet de ce traitement sur la mortalité (11,4 % contre 15,2 % pour le groupe contrôle, à J29) n’est pas considéré comme statistiquement significatif : celle-ci a beaucoup fluctué selon la sévérité initiale de la maladie, créant de facto de nombreux sous-groupes dont l’effectif était insuffisant pour en tirer des conclusions significatives. Ce résultat rejoint les conclusions de l’essai Solidarity qui, ayant évalué l’effet sur la mortalité à 28 jours de quatre traitements (remdésivir, hydroxychloroquine, lopinavir-ritonavir et interféron-β1) chez des patients hospitalisés, conclut qu’aucun n’a montré une efficacité significative sur ce critère.
Le remdésivir disposait en France, dès le mois de juillet, d’une autorisation de mise sur le marché conditionnelle pour le traitement des patients ayant une pneumonie associée à la Covid-19 et recevant une oxygénothérapie. Mais dans un rapport datant de mi-septembre, la HAS considérait que les incertitudes sur l’efficacité et la tolérance de ce médicament étaient encore trop grandes, et restreignait son remboursement aux seuls patients hospitalisés pour Covid-19 nécessitant une oxygénothérapie à faible débit. Elle estimait que la pertinence clinique était discutable (réduction globale de 4 jours du délai de rétablissement, à savoir 11 au lieu de 15 par rapport au placebo, et en complément des soins de support ; sans effet global sur la mortalité à 14 jours), et attendait justement les résultats de l’essai ACTT-1 pour une réévaluation, notamment avec les données de mortalité à 29 jours.
L’OMS, pour sa part, a émis le 20 novembre une recommandation conditionnelle contre l’utilisation du remdésivir chez les patients hospitalisés, quelle que soit la gravité de la maladie. Le panel chargé d’élaborer ces recommandations a considéré non pas que la molécule n’avait aucun bénéfice, mais que dans l’état actuel des connaissances, il n’y a pas suffisamment d’évidence sur les potentiels effets bénéfiques de ce médicament en termes de survie ou d’amélioration clinique – à la différence des corticoïdes.
Des preuves plus solides et une pharmacovigilance renforcée sont ainsi nécessaires, d’autant plus que les coûts et ressources impliquées dans l’utilisation de cette molécule sont importants. C’est pourquoi l’OMS a encouragé la poursuite des recrutements dans les essais évaluant le remdésivir.
Pour en savoir plus
Beigel JH, Tomashek KM, Dodd LE, et al. Remdesivir for the Treatment of Covid-19 — Final Report. NEJM 2020
WHO Solidarity Consortium. Repurposed antiviral drugs for COVID-19; interim WHO SOLIDARITY trial results (preprint). Medrxiv, 15 octobre 2020.
HAS. Évaluation des traitements de la Covid-19 : la HAS publie son évaluation du remdésivir. Communiqué de presse du 17 septembre 2020.
WHO recommends against the use of remdesivir in COVID-19 patients. 20 novembre 2020.
Laura Martin Agudelo, La Revue du Praticien