L’arthrose digitale érosive est une pathologie fréquente et handicapante, caractérisée par des douleurs particulièrement intenses, une destruction articulaire et une gêne fonctionnelle. Peu de traitements sont disponibles ou à l’étude dans cette affection. Une nouvelle approche non médicamenteuse semble prometteuse…

 

L’arthrose digitale est fréquente, surtout chez la femme en périménopause (67 % après 55 ans vs 55 % chez les hommes). Sa prévalence radiologique est estimée à 10 % dans la tranche d’âge 40-49 ans ; après 70 ans, elle serait de 90 % chez la femme et 80 % chez l’homme.

La forme la plus sévère est l’arthrose dite érosive : elle est caractérisée par des douleurs particulièrement intenses, d’horaire inflammatoire (avec réveils nocturnes), une évolution par poussées de plusieurs semaines, une inflammation articulaire et une destruction articulaire visible sur les radiographies. Qualité de vie, force de préhension et mobilité y sont plus altérées que dans l’arthrose digitale classique. Son vécu serait proche de celui de la polyarthrite rhumatoïde.

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(Crédit images : diapothèque du Collège français des enseignants en rhumatologie)

 

 

Pour autant, peu de traitements sont disponibles (anti-inflammatoire non stéroïdien [AINS] topique, paracétamol, infiltrations) ou à l’étude dans cette affection, finalement délaissée, en dépit de sa fréquence élevée.

La médecine bioélectronique pourrait être une stratégie thérapeutique innovante. En effet, des travaux scientifiques menés depuis une vingtaine d’années ont montré que le nerf vague, qui classiquement régule la fréquence cardiaque et la motricité digestive, a également une action anti-inflammatoire et antalgique. Ceci a conduit les rhumatologues à s’intéresser à sa stimulation notamment dans les maladies rhumatologiques inflammatoires et/ou douloureuses.

Comment faire en pratique ? On utilise un appareil électrique appelé TENS VAGUSTIM, relié à une électrode auriculaire stimulant une zone de l’oreille innervée par le nerf vague, la cymba conchae (figure ci-dessous).

En 2019, grâce à la Fondation Apicil, une étude pilote conduite à l’hôpital Saint-Antoine chez 18 patients souffrant d’arthrose des mains douloureuse a montré la bonne tolérance de ce dispositif, une diminution de la douleur à 1 mois ainsi que la faisabilité d’une telle approche thérapeutique.

Ces résultats préliminaires, sans groupe contrôle, ont permis de mettre en place un essai randomisé contrôlé afin d’évaluer l’effet d’une stimulation active du nerf vague (une séance de 20 minutes par jour pendant 3 mois) sur la douleur des mains (versus stimulation factice). Cette étude – appelée ESTIVAL – est financée par le programme hospitalier de recherche clinique (ministère de la Santé), promue par l’Assistance Publique – Hôpitaux de Paris, et soutenue par la Fondation Arthritis et l’Association française de lutte anti-rhumatismale (AFLAR). Les 18 services hospitaliers participant, répartis sur l’ensemble du territoire (Paris, Créteil, Montpellier, Dijon, Caen, La Roche-sur-Yon, Orléans, Nice, Lyon, Besançon, Bordeaux, Brest, Marseille, Strasbourg, Saint-Etienne, Clermont-Ferrand), recrutent actuellement 160 patients souffrant d’arthrose des mains douloureuse. 

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Figure : électrode auriculaire et VAGUSTIM (source : diapothèque du Collège français des enseignants en rhumatologie)

Cinzia Nobile, La Revue du Praticien

Pour en savoir plus

Investigateurs : Pr Jérémie Sellam, Dr Alice Courties, Dr Camille Deprouw (AP-HP, Hôpital Saint-Antoine, Paris) : 01-49-28-25-20 ou estival.aphp@gmail.com

Détails sur ESTIVAL : https://clinicaltrials.gov/ct2/show/NCT04520516

 

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Baron D. Arthrose digitale. Rev Prat Med Gen 2018;32:451-4.