La décision de Haute Autorité de santé (HAS), le 25 septembre, d’autoriser l’utilisation et le remboursement des tests antigéniques à visée diagnostique chez les patients symptomatiques soulève plusieurs questions quant à leur réelle contribution à l’efficacité de la stratégie de dépistage.
Comme pour les tests virologiques RT-PCR, ils se font sur prélèvement nasopharyngé, mais à la différence de ceux-ci, ils peuvent rendre des résultats en 30 minutes. La technique d’analyse plus rapide, cherchant non pas le matériel génétique mais une protéine du virus, a aussi l’avantage de ne pas nécessiter d’équipement spécifique, raison pour laquelle ces tests pourraient être déployés non seulement au sein des laboratoires de biologie médicale, mais aussi dans des pharmacies ou des cabinets de médecine générale – ce qui pourrait, selon la HAS contribuer à désengorger les laboratoires.
Ce n’était pas l’avis du Syndicat des biologistes médicaux, qui, suivant celui du Pr Bruno Lina (CHU de Lyon, membre du Conseil scientifique Covid-19), pense que ces tests ne permettront pas un tel désengorgement, parce qu’ils ne suffiront pas à diminuer la demande des RT-PCR pour la confirmation des cas.
La sensibilité de ces tests est en effet au cœur de la question : moindre que celle des RT-PCR, elle serait compensée selon la HAS par l’impact positif sur les délais – postulat avec lequel le SDB a également exprimé son désaccord.
Un article publié en septembre dans Nature News, alors que ces tests venaient également de recevoir une approbation d’urgence de la part de la Food and Drug Administration, souligne cependant que, bien qu’il y ait un risque de ne pas détecter des sujets potentiellement contaminants, cette moindre sensibilité pourrait aussi être un atout, car beaucoup de tests PCR reviennent positifs alors que le sujet n’est plus contagieux (certains chercheurs suggèrent même de baisser le seuil à partir duquel un échantillon est considéré comme positif). Ainsi un test qui demanderait une charge virale plus importante pour être positif – comme le test antigénique – serait mieux à même d’identifier rapidement les personnes contagieuses, selon Marion Koopmans (virologue, université de Rotterdam). Mais, poursuit-elle, le problème est que le seuil en deçà duquel une personne contaminée ne serait plus contagieuse n’est pas du tout clair…
L’une des solutions pourrait consister à effectuer le test antigénique plusieurs fois par semaine : certaines études suggèrent que tester les gens deux fois par semaine avec un test moins sensible serait plus efficace que d’utilisation un test plus précis mais à un intervalle plus grand, car la charge virale peut augmenter considérablement en seulement quelques heures, explique Micheal Mina (immunologue, université de Harvard).
Cela rejoint la proposition du Pr Lina, pour qui ce type de tests pourraient être utilisés dans des suivis longitudinaux, lorsque la même population doit être dépistée régulièrement (soignants, par exemple, ou sportifs). Il propose aussi, rejoint par le SDB, de les utiliser pour procéder à des dépistages systématiques dans des établissements collectifs où il y a un fort risque de contamination (Ehpad, écoles, entreprises), ce qui permettrait de faire un premier tri rapide avant confirmation par RT-PCR. C’est pourquoi le SDB a déploré que la HAS ne se soit pas prononcée précisément à ce sujet – dans l’attente de données sur la fiabilité de cette technique chez les sujets asymptomatiques.
Laura Martin Agudelo, La Revue du Praticien
Pour en savoir plus
HAS. Covid-19 : les tests antigéniques sont performants chez les patients symptomatiques. 25 septembre 2020.
SDB. Dépistage Covid-19 : il n’y aura pas de miracle du test antigénique. 28 septembre 2020.
Guglielmi G. Fast coronavirus tests: what they can and can’t do. Nature 2020;585:496-48.