Le tremblement essentiel affecte 5 % des plus de 60 ans. On relève deux pics de survenue, l’un lors de la 2e et l’autre lors de la 6e décennie.
Une histoire familiale est retrouvée chez 30 à 70 % des patients : plus de 80 % des sujets atteints avant l’âge de 40 ans ont un parent du 1er degré concerné.
Le diagnostic est clinique
Tremblement isolé, bilatéral (± symétrique) des membres supérieurs, évoluant depuis au moins 3 années, avec ou sans tremblement d’autres parties du corps :
– tête (de type « non-non ») ;
– voix chevrotante ;
– membres inférieurs (plus rare, un tiers des cas).
Absence d’autres signes neurologiques, tels que la dystonie, l’ataxie, le parkinsonisme.
Affecte l’action, que ce soit le maintien d’une posture/attitude (manœuvre du bretteur et/ou du serment) ou un mouvement cinétique (écriture, insertion d’une clé dans la serrure, verser de l’eau...).
Tremblement rapide (de 6 à 12 Hz), majoré par le stress ; souvent calmé par la prise d’alcool (50-70 % des cas).
Évolution lentement progressive mais source possible de handicap social et fonctionnel majeur lorsqu’il devient intense (surtout chez le sujet âgé car sa fréquence diminue mais son amplitude augmente au cours du temps).
Dans certaines situations diagnostiques difficiles, on peut recourir à des examens complémentaires, tels que l’enregistrement du mouvement anormal en vue de sa caractérisation (condition de survenue, fréquence, muscles impliqués, distractibilité…).
Écarter les diagnostics différentiels
Tremblement parkinsonien, le principal :
– rechercher des signes associés mineurs (parkinsonisme, signe de Froment, roue dentée…) ;
– l’absence d’akinésie ne permet pas d’éliminer un Parkinson ;
– en cas de doute : avis neurologique spécialisé et éventuellement DAT-scan (dénervation dopaminergique en faveur d’un syndrome parkinsonien dégénératif).
Tremblement postural :
– faible amplitude, rapide (8-12 Hz), concerne les doigts ;
– parfois physiologique, peu ou pas gênant, ne nécessite pas de traitement ;
– accentué par : anxiété, stress, fatigue musculaire, sevrage alcoolique, certains toxiques (café, nicotine), corticoïdes, bêtastimulants, surdosage en hormones thyroïdiennes, thyrotoxicose, etc.
Iatrogénie +++ ; à évoquer devant tout tremblement, en considérant :
– la relation temporelle avec la prise d’un médicament ;
– la probabilité de son imputabilité via la consultation du Dictionnaire Vidal (souvent en cause : neuroleptiques, bêtamimétiques, corticoïdes…) ;
– l’évolution à l’arrêt du médicament suspecté.
Tremblement fonctionnel (psychogène) : début soudain, contexte psychologique difficile, fréquence et localisation variables, avec une éventuelle suggestibilité, distractibilité et/ou phénomène d’entraînement lors de tâches mentales ou motrices.
Prise en charge (v. algorithme ci-dessous)
Un patient non gêné ne doit pas être traité (rapport bénéfices-risques défavorable).
Si les symptômes sont gênants, on peut proposer en 1re ligne, le propranolol, bêtabloquant traversant la barrière hémato-encéphalique (40-240 mg/j) ou les barbituriques comme la primidone (125-750 mg/j).
En cas d’échec (30 % des cas), un traitement de 2e ligne peut être discuté, au cas par cas :
– antiépileptiques : topiramate (150-400 mg/j) ou gabapentine (800-3 600 mg/j) ;
– bêtabloquants : aténolol (50-150 mg/j) ou sotalol (80-160 mg/j, hors AMM) ;
– benzodiazépines : clonazépam (0,5-4 mg/j) ou alprazolam (0,125-3 mg/j).
La toxine botulique peut être utile pour les tremblements du chef (muscles rotateurs) ou laryngés (corde vocale).
L’instauration des traitements se fait progressivement par paliers, en l’absence de contre-indication et en tenant compte des interactions médicamenteuses et des antécédents des patients.
Cinzia Nobile, La Revue du Praticien
D’après : Degos B. Tremblement essentiel. Rev Prat Med Gen 2020;34:773-4.