Phénomène de Raynaud
Affirmer le diagnostic par la clinique
En chercher la cause
Interrogatoire et examen clinique
Ils doivent chercher des arguments en faveur d’un phénomène de Raynaud primitif (parfois appelé « maladie de Raynaud ») ou secondaire (En particulier, une connectivite est d’emblée fortement suspectée devant un phénomène de Raynaud secondaire bilatéral : sclérodermie systémique, syndrome de Gougerot-Sjögren, polyarthrite rhumatoïde, lupus, syndrome de Sharp, plus rarement dermatomyosite. Il s’agit donc de rechercher la présence de symptômes tels qu’une photosensibilité, des arthralgies, un syndrome sec (xérophtalmie et xérostomie), une faiblesse ou des douleurs musculaires, une dysphagie, des antécédents ou atteintes concomitantes pulmonaires et/ou rénales.
Chez l’homme, les causes de syndrome de Raynaud secondaire sont dominées par les artériopathies, les hémopathies et les causes professionnelles (syndrome du marteau hypothénar, syndrome des vibrations ;
Dans la grande majorité des cas, les patients sont asymptomatiques entre les crises. La persistance de douleurs digitales en intercritique est en faveur d’une ischémie digitale permanente.
Examens complémentaires
L’indication et la nature des examens complémentaires ne sont pas consensuelles, et doivent être orientées par les éléments cliniques et de l’interrogatoire.Si le caractère secondaire est fortement suspecté, une consultation spécialisée est indiquée d’emblée.
Si l’examen et l’interrogatoire ne permettent pas d’orienter vers une origine primitive ou secondaire, la question de réaliser un bilan minimal systématique se pose. La Société française de médecine vasculaire a ainsi proposé en 2012 la réalisation d’une capillaroscopie et la recherche d’anticorps antinucléaires.1 La capillaroscopie est un examen simple qui permet de visualiser les capillaires périunguéaux sur toute leur étendue par une technique simple de transillumination. Elle est difficile à interpréter chez les patients de peau sombre et chez les travailleurs manuels.
En deuxième intention, l’échographie-doppler des axes vasculaires des membres est très utile dans la recherche étiologique, notamment pour le phénomène de Raynaud unilatéral et lorsqu’il y a une anomalie à l’examen des axes vasculaires.
Prise en charge
Les mesures de protection contre le froid sont indispensables (port de gants, voire de sous-gants de soie lors d’épisodes de froid important). L’arrêt du tabac, du cannabis et des médicaments (vasoconstricteurs, y compris par voie nasale, bêtabloquants) pouvant aggraver le phénomène de Raynaud est également nécessaire.
Dans les formes les plus invalidantes – situation plus fréquente dans les phénomènes de Raynaud secondaires –, un traitement par inhibiteur calcique peut être proposé. Les dihydropyridines (nifédipine 10 mg 3 fois par jour) peuvent être utilisés dans cette indication. Cependant, la nifédipine est rarement supportée chez les patients jeunes ayant une labilité vasomotrice. Le diltiazem est alors une bonne alternative, à la dose de 60 mg 3 fois par jour.
Enfin, dans les formes secondaires, le traitement comprend bien évidemment celui de la cause. En particulier, les objets vibrants sont naturellement à proscrire lorsqu’une cause professionnelle est retenue (déclaration de maladie professionnelle).
Érythromélalgie (ou érythermalgie)
Dans les formes associées à un syndrome myéloprolifératif, l’aspirine peut apporter un bénéfice clinique.
Engelures
Aucun examen complémentaire n’est indiqué dans les formes typiques. En revanche, dans les formes sévères, atypiques (notamment en cas de survenue estivale), associées à un phénomène de Raynaud, ou d’apparition tardive, un bilan peut être justifié, guidé par le tableau clinique et les éventuels signes associés. La réalisation d’une biopsie cutanée et d’un bilan biologique sont alors utiles pour rechercher une pathologie systémique sous-jacente ou un diagnostic différentiel. Le dosage d’anticorps antinucléaires peut notamment être utile pour rechercher une connectivite. Une cryoglobulinémie, un cryofibrinogène, des agglutinines froides pourront être recherchés, tout comme une vascularite systémique, des embolies de cristaux de cholestérol et une thrombophilie. Il s’agit également de recenser les facteurs de risque cardiovasculaire associés et la prise de médicaments.
La prise en charge repose sur des mesures d’éviction du froid et du tabac ainsi que sur l’administration de crèmes émollientes. Les dermocorticoïdes peuvent être prescrits lors de poussées invalidantes. L’utilisation de vasodilatateurs (inhibiteurs calciques) peut être discutée en cas d’échec des mesures précédentes.
Acrocyanose
Une association avec un phénomène de Raynaud ou des engelures est possible.
Aucun examen complémentaire n’est indiqué en cas d’acrocyanose isolée.
Il est recommandé au patient de se protéger du froid. Il n’existe pas de traitement pharmacologique améliorant la symptomatologie. Il convient cependant de traiter une cause éventuelle d’amaigrissement.
Acrocholose
Ischémie et nécrose digitales
Les principales causes des ischémies et nécroses digitales sont les connectivites (phénomène de Raynaud sévère de la sclérodermie), les artériopathies professionnelles, les vascularites systémiques (maladie de Buerger chez le sujet de moins de 45 ans avec intoxication tabagique importante), les emboles (cardiopathie emboligène, maladie des emboles de cholestérol), l’athérome (principale cause pour les membres inférieurs), les syndromes myéloprolifératifs, les syndromes paranéoplasiques.
1. Syndrome de Raynaud secondaire : deux principales causes professionnelles
Syndrome du marteau hypothénar
Cette pathologie s’observe chez les sujets utilisant leur éminence hypothénar comme un marteau dans le cadre d’une activité professionnelle (métallurgistes, maçons, carreleurs, couvreurs, menuisiers, carrossiers) ou sportive (base-ball, volley-ball, karaté, badminton). Les microtraumatismes répétés de l’éminence hypothénar provoquent la formation de lésions artérielles anévrismales au niveau de la terminaison de l’artère ulnaire.
La manœuvre d’Allen (encadré 2) permet d’objectiver l’artériopathie ulnaire distale.
L’échographie-doppler artériel est l’examen de choix pour détecter l’anévrisme ulnaire thrombosé ou non. Sous réserve d’une exposition minimale de cinq ans et d’une artériographie en faveur, la reconnaissance en maladie professionnelle doit être demandée (tableau n° 69 du régime général).
Syndrome des vibrations
Lié à l’utilisation d’engins vibrants (tronçonneuse, marteau-piqueur), ce syndrome se caractérise par des manifestations vasculaires (phénomène de Raynaud) et neurologiques (paresthésies et/ou hypoesthésie pulpaires permanentes). Sous réserve d’une exposition d’au moins cinq ans, la reconnaissance en maladie professionnelle doit être demandée (tableau n° 69 du régime général).
2. Diagnostic clinique d’une artériopathie distale : la manœuvre d’Allen
La manœuvre d’Allen permet d’objectiver une artériopathie distale. Elle se déroule comme suit :
– demander au patient de serrer la main très fortement à plusieurs reprises pour vider le sang veineux ;
– comprimer l’artère radiale et l’artère ulnaire au poignet ;
– faire ouvrir la main, qui apparaît blanche ;
– lever la pression sur l’une des deux artères comprimées.
Le résultat est normal si la main se recolore rapidement (< 5 secondes) ; il est pathologique en cas d’inhomogénéité ou de retard de recoloration.
– répéter la manœuvre pour la deuxième artère.
Que dire à vos patients ?
Le phénomène de Raynaud est un trouble bénin.
S’il est invalidant, il est possible d’associer un traitement par inhibiteur calcique aux mesures de lutte contre les facteurs déclenchants (froid, vasoconstricteurs).
Une forme atypique doit faire rechercher une forme secondaire : artériopathie, hémopathie, maladie professionnelle.
L’ischémie digitale est une urgence vasculaire.
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