La date de découverte est une information essentielle car elle permet de différencier les adénopathies aiguës (apparues depuis moins de 8 jours) des subaiguës (depuis 2 à 3 semaines) ou chroniques (plus de 2 mois). Cette distinction est importante car les formes aiguës-subaiguës sont plutôt d’origine infectieuse, alors que les ganglions persistants doivent faire éliminer avant tout un cancer ou un lymphome des voies aérodigestives supérieures (VADS).
Aucune biopsie chirurgicale ne doit être réalisée à l’aveugle, avant d’avoir recherché l’étiologie et pratiqué un examen de la muqueuse des VADS.
Éliminer ce qui n’est pas un ganglion
Adénopathies cervicales aiguës
Lorsque la tuméfaction est volumineuse et douloureuse, 2 étiologies principales :
– la surinfection d’un kyste congénital sous-digastrique (mou ou rénitent, lisse, bien limité), surtout chez les sujets jeunes ;
– un adénophlegmon
S’il y a un doute sur une collection suppurée, une antibiothérapie à spectre large (Augmentin) peut être proposée. En l’absence d’amélioration rapide, le patient est adressé au spécialiste, pour incision et drainage chirurgical.
Subaiguës ou chroniques
L’examen clinique est également contributif. Il apprécie le siège de la tuméfaction et l’état des téguments en regard. La palpation précise ses caractéristiques : consistance (dure, ferme, rénitente, molle), forme, sensibilité (douloureux ou indolore), mobilité (adhérence ou non aux plans superficiels ou aux plans profonds), caractère pulsatile
Imagerie : quel bilan ?
Devant un ou plusieurs ganglion(s) unique ou multiples non suspects de moins de 2 cm, en l’absence d’altération de l’état général ou de symptômes ORL associés, une surveillance clinique est suffisante (parfois une échographie de référence est faite, au cas par cas).
Lorsque la tuméfaction est supérieure à 2 cm, le bilan est impératif. L’échographie cervicale est pratiquée si l’on suspecte une affection non ganglionnaire, notamment sous-mandibulaire, thyroïdienne ou parotidienne.
En cas de pathologie réellement ganglionnaire, l’examen de référence est le scanner. Bien que plus coûteux, il a une grande reproductibilité et permet une exploration complète, notamment des chaînes ganglionnaires profondes. Il est pratiqué si le patient est fumeur (plus de 30 ou 40 paquets/années) ou si l’examen évoque une maladie générale (tuberculose, sarcoïdose). Dans le contexte d’un cancer ORL ou d’un lymphome, il fait partie du bilan d’extension.
IRM et TEP sont réservées à des maladies spécifiques (tumeur de la parotide, certains cancers des VADS, lymphome) ; elles sont éventuellement demandées par le spécialiste d’organe, une fois le diagnostic posé, pour compléter le bilan.
Examens biologiques
En l’absence d’orientation, une cytoponction à l’aiguille fine est réalisée, souvent par un anatomopathologiste, parfois guidée par l’échographie (pour prélever dans du tissu charnu plutôt que dans la nécrose) surtout si le ganglion est profond. Si elle ramène un matériel purulent, celui-ci doit être adressé en bactériologie et mis en culture en milieux standard ou de Koch (BK) ; une partie est étalée sur lames afin de vérifier qu’il s’agit bien de pus constitué de polynucléaires plus ou moins altérés. L’examen cytologique peut également révéler des cellules d’une tumeur maligne, un lymphome ou une adénite chronique.
Si ce bilan et l’examen ORL sont normaux, une prise en charge par un service spécialisé est requise pour rechercher une pathologie infectieuse (toxoplasmose, mononucléose à CMV, tuberculose, VIH, maladie des griffes du chat, syphilis, lymphogranulomatose, tularémie) ou inflammatoire chronique (sarcoïdose, lupus, maladie de Gougerot-Sjögren).
Si les différents examens paracliniques ne permettent pas de poser le diagnostic, l’analyse histologique d’un ganglion, après exérèse, est l’examen de référence.
L’adénectomie est faite sous anesthésie locale ou générale, toujours après un examen ORL complet par un spécialiste cervico-facial.
Des informations doivent être fournies à l’anatomopathologiste avec le prélèvement ganglionnaire : âge, sexe, siège du prélèvement, tableau clinique, diagnostic envisagé.
Dans la mesure du possible, il faut l’éviter si on suspecte une tuberculose car il y a un risque important de fistulisation et d’écoulement chronique.
1. Diagnostics différentiels
Tuméfaction unique
• Kyste congénital : haut situé et rénitent
• Lipome, lymphangiome kystique : mou à la palpation
• Paragangliome : battant, en regard du bulbe carotidien
• Tumeur nerveuse ou schwannome (rare) : formation solide profonde ou dans le creux sus-claviculaire
• Tumeur de la parotide : sous le lobe de l’oreille (fig. 2)
• Thyroïde : ascendante à la déglutition
• Kyste du tractus thyréoglosse : haut, en regard de l’os hyoïde, antécédents d’épisodes inflammatoires éventuels (fig. 3)
2. Que rechercher à l’interrogatoire ?
– Jeune : cancer du cavum si ethnie évocatrice (Maghreb, Asie du Sud-Est), tuberculose, VIH– Avancé : cancer des VADS – Tout âge : lymphomeOrigine ethnique
– Maghreb/Asie du Sud-Est : cancer du cavum
– Afrique/Amérique du Sud : infection par le VIH ou mycoses (histoplasmose)
– Conditions de vie défavorisées : tuberculose
– Alcool-tabac : cancer des VADS
– Chat : maladie des griffes du chat
– Gibier : tularémie
– Maladie de système et lymphome
– VIH : tuberculose, lymphome
– Dysphonie, dysphagie : cancers des VADS
– Surdité unilatérale (otite séreuse), obstruction nasale : cancer du cavum
– Altération de l’état général, fièvre, sueurs : lymphome, tuberculose
– Cancer des VADS
– Tumeur cutanée
– Métastase (sein, poumon, thyroïde)
– Importante : cause infectieuse (tularémie, maladie des griffes du chat)
– Peu intense : tuberculose, syphilis
– Absente : lymphome, cancer
Caractéristiques cliniques
✔ Unique : diagnostic différentiel (kyste branchial, chémodectome – tumeur bénigne développée à partir du glomus carotidien – , lipome, lymphangiome), cancer ORL, tuberculose
✔ Multiples : lymphome, pathologie infectieuse (VIH)
✔ Mode évolutif : fluctuant (lymphome), rapide (cancer agressif), fistulisation (infection)
✔ Postérieur : cancer du cavum, toxoplasmose
✔ Bas situé : ganglion de Troisier, schwannome du plexus brachial
✔ Souple : diagnostic différentiel (kyste branchial, lipome, lymphangiome), ganglion kystique
✔ Dur : cancer des VADS ; pierreux : tumeur ++
✔ Arrondi : lymphome, cancer
✔ Oblongue : infectieux ou inflammatoire
✔ Peu mobile : cancer, chémodectome (sur le bulbe carotidien et battant)
✔ Réaction cutanée : tuberculose, ganglion tumoral évolué, maladie des griffes du chat, actinomycose
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