Les Caisses d’allocations familiales (CAF) ont été créées en 1946. Dans l’immédiat après-guerre, l’objectif était d’améliorer le niveau de vie des familles, de faciliter leur accès à un logement de qualité, d’atténuer les inégalités de revenus (prestations sous conditions de ressources) et d’accompagner le mouvement de reprise démographique, le fameux baby-boom. Actuellement, 33,1 millions de personnes bénéficient de leurs prestations, soit près d’un habitant sur deux en France.

La branche « Famille », créée en 1967, est l’une des six composantes du régime-général de la Sécurité sociale, avec les branches « Maladie », « Risques professionnels », « Vieillesse », « Recouvrement » et, plus récemment, « Autonomie ». Elle constitue l’un des principaux acteurs de la politique familiale française, mobilisant entre 2,7 et 4,7 % du produit intérieur brut (PIB), un des taux les plus importants au monde.1  

Actuellement, la branche « Famille » a trois missions prioritaires : aider les familles au quotidien en facilitant, en particulier, l’articulation entre vie familiale et vie professionnelle ; soutenir les allocataires avec des aides personnelles au logement, notamment pour l’amélioration du cadre de vie ; développer la solidarité envers les plus vulnérables, dont les personnes en situation de handicap.

Pour remplir ces missions, elle s’appuie sur deux leviers :

  •  versement de prestations financières aux familles (prestations familiales, aides au logement, prime d’activité, minima sociaux tels que le revenu de solidarité active et l’allocation aux adultes handicapés) ;
  • accompagnement des familles et mise en place ou cofinancement de différents services et équipements collectifs qui leur sont destinés, comme les crèches. Son objectif est de proposer une offre globale de services, au plus près des besoins des habitants, en luttant contre les inégalités territoriales et sociales (fig. 1 et 2).

Quelles sont les conditions nécessaires pour bénéficier d’une intervention de la CAF ?

L’accompagnement par un travailleur social de la CAF du Pas-de-Calais, d’une durée maximale de vingt-quatre mois, ne peut s’effectuer que si :

  • l’allocataire a signalé un changement de situation et/ou événement de vie (séparation, naissance, décès, grossesse, chômage…) ;
  • l’allocataire a la charge d’un enfant de moins de 20 ans (même en situation de garde alternée) ;
  • l’événement concerne une naissance multiple, le décès du conjoint ou de l’enfant, un impayé de loyer dans le cadre d’un bailleur privé, une séparation ou un projet de séparation, l’insertion socioprofessionnelle (revenu de solidarité active).
 

Aucun autre événement de vie ne peut faire l’objet d’un accompagnement par un travailleur social de la CAF. Toutefois, pour les autres situations, l’intervention d’un travailleur social du conseil départemental, chef de file de l’action sociale, peut être sollicitée.

Exemple du territoire du Pas-de-Calais, marqué par de fortes difficultés sociales

Sur un territoire regroupant près de 1,5 million d’habitants, 774 190 d’entre eux bénéficient d’au moins une prestation légale versée par la CAF, soit 53 % de la population totale.2 Ce taux varie de 26 à 54 % selon les communautés de communes du Pas-de-Calais. Dans ce département, 41 % des allocataires sont isolés sans enfant, 36 % sont des couples avec enfant(s), 15 % sont des familles monoparentales et 6 % sont des couples sans enfant ; 5 507 étudiants bénéficient d’une aide, soit 2 % de l’ensemble des allocataires (6 % au niveau national).

Les aides versées par la CAF visent à soutenir le niveau de vie des familles et à réduire les inégalités de revenus. Dans le Pas-de-Calais, 16 % des allocataires ont la totalité de leurs ressources financières composées de prestations légales (15 % au niveau national).

Le département se caractérise par une proportion importante de foyers allocataires vivant sous le seuil de bas revenus mensuels, avec un niveau de vie inférieur à 1  135 euros (37 % dans le Pas-de-Calais, 32 % au niveau national). Dans ces foyers précaires vivent 118 970 enfants.

La CAF du Pas-de-Calais assure un service de proximité sur tout le département grâce à : 

  • un accueil des allocataires dans les locaux centraux ;
  • un accueil de proximité dans les locaux des CAF de tout le département (Arras, Béthune, Boulogne-sur-Mer, Bruay-la-Buissière, Calais, Carvin, Étaples-sur-Mer, Lens, Saint-Omer)  ;
  • un réseau de permanences réparties sur le département ;
  • un partenariat avec 49 espaces « France services » ;
  • des ordinateurs en libre-service installés dans les locaux des partenaires (mairies, centres communaux d’action sociale…) permettant aux allocataires d’effectuer leurs démarches au plus près de leur domicile.

Réponse pluridisciplinaire et individualisée : quelques exemples

Les professionnels de santé, et notamment les médecins généralistes, en plus de traiter les pathologies de leur patientèle, sont également confrontés à des problématiques sociales diverses et propres à chaque patient. Exposer quelques exemples de situations rencontrées et le premier niveau de réponse apporté peut permettre aux professionnels de santé d’orienter plus efficacement un patient dont la situation serait similaire. Il  convient toutefois de rappeler que seule l’expertise sociale de la CAF permet d’apporter une réponse précise et adaptée. 

Accompagnement à la suite du décès du conjoint

Une femme vit seule, avec ses deux enfants âgés de 12 et 18 ans. Elle est accompagnée par un travailleur social de la CAF depuis juin 2023, à la suite du décès de son mari. 

Ses seules ressources sont constituées d’allocations mensuelles (revenu de solidarité active, allocation de soutien familial et allocation logement). Elle avait dû quitter son travail afin de s’occuper à plein temps de son époux gravement malade.

Sans emploi et dépourvue de moyens, elle doit cependant s’acquitter de la facture des frais d’obsèques. 

Le travailleur social a effectué une demande de capital décès auprès de la Caisse primaire d’assurance maladie (CPAM) et de l’employeur du mari décédé. En complément, le conseil départemental et la Ligue contre le cancer ont été sollicités pour une aide financière. Afin de soutenir la famille dans cette épreuve, une aide individuelle de la CAF du Pas-de-Calais a également été versée aux pompes funèbres.

Les objectifs d’accompagnement proposés par le travailleur social sont de permettre l’actualisation des droits, l’aide aux démarches et le maintien de l’équilibre budgétaire.

Père célibataire de deux jeunes enfants

Un père est en situation de monoparentalité avec deux enfants en bas âge à charge (2 ans et demi et 1 an). Il s’est séparé en décembre 2021 et son ex-compagne a quitté le domicile familial. 

Il est accompagné par un travailleur social depuis janvier 2022, à la suite de la séparation conjugale.

La situation est très conflictuelle et il a engagé une procédure avec un avocat pour la garde des enfants. Il a déménagé avec ses deux enfants dans une nouvelle maison d’un bailleur social.

Les objectifs sont ici nombreux :

  • favoriser la construction d’une nouvelle organisation familiale ;
  • faciliter l’appropriation du logement ;
  • permettre l’accès aux droits (démarches et ouverture des droits) ;
  • faciliter l’accès aux services d’aide à domicile et modes de garde ;
  • favoriser la socialisation des enfants ;
  • accompagner la gestion du budget et travailler à la résorption des dettes.
 

En parallèle, un suivi par le service de Protection maternelle et infantile du conseil départemental est mis en place. Une orientation a été faite vers les services d’aide à domicile (SAAD), et une technicienne d’intervention sociale et familiale (TISF) vient au domicile quatre heures par semaine pour seconder le père dans la prise en charge des enfants.

Il occupe désormais un emploi à temps partiel et a pris conscience de l’importance de l’aide apportée par l’intervention de la TISF. Il a inscrit sa fille aînée à l’école pour la rentrée prochaine et souhaiterait une place en établissement d’accueil du jeune enfant (EAJE ; crèches collectives, multi-accueil) pour la benjamine. Les professionnels de la CAF peuvent le soutenir dans sa recherche d’un lieu d’accueil collectif.

Il a également été orienté vers le centre communal d’action sociale (CCAS) afin de bénéficier de l’épicerie solidaire. De plus, une aide ponctuelle pour compléter le budget alimentaire de la famille a été accordée.

Depuis son emménagement, la famille ne dispose pas de literie et a un réfrigérateur très vétuste et énergivore. Un prêt ne pouvant être souscrit en raison des faibles ressources, une aide individuelle de la CAF du Pas-de-Calais a permis à la famille de s’équiper.

Éloigner l’enfant d’un quotidien pesant

Une famille est accompagnée dans le cadre du décès de la mère, survenu en avril 2022. Le conjoint, salarié de la fonction publique, se retrouve seul avec son fils âgé de 9 ans. 

Il est perdu dans la gestion du quotidien et des démarches à effectuer. Néanmoins, il a accepté le départ en colonie de vacances de son fils afin de lui permettre de bénéficier pendant quelques jours d’un environnement différent et plus serein.

Les objectifs de l’accompagnement social sont d’aider dans les démarches afin de faciliter l’ouverture des droits et de mobiliser la famille sur un projet de vacances.

Une aide individuelle de la CAF du Pas-de-Calais a permis de prendre en charge le solde du séjour en colonie de vacances, versée directement au prestataire. Le reste à charge de la famille n’a été que de 30 euros.

Enfin, le père a été orienté vers le centre social de son quartier afin de bénéficier d’actions collectives lui permettant de retisser du lien social et de ne pas s’isoler.

L’arrivée de triplés bouleverse le quotidien

Un couple avec deux enfants de 4 et 6 ans voit sa vie chamboulée par la naissance de triplés en juin 2022. Les parents ont accepté le soutien du service de la CAF.

Les objectifs de l’accompagnement social sont la recherche d’un mode de garde, le répit parental et le soutien budgétaire.

Lors du premier contact, la mère apparaît très fatiguée et souhaite trouver un mode de garde pour ses enfants afin d’éviter un épuisement parental. De ce fait, pour affiner sa recherche d’accueil individuel (chez une assistante maternelle) ou collectif (dans un EAJE), elle est orientée vers le relais petite enfance – lieu d’information sur le territoire sur les modes de garde, l’accompagnement des assistantes maternelles et des familles dans les relations contractuelles. Concernant les enfants de 4 et 6 ans, la famille a été dirigée vers le service jeunesse de la mairie, pour les inscriptions en accueil de loisirs sans hébergement (ALSH).

Décès d’un enfant malade

Un couple est marié depuis 2004 ; de cette union sont nées deux filles. Monsieur et Madame exercent une activité salariée, mais la mère est en arrêt maladie depuis août 2022 et perçoit des indemnités journalières de la CPAM.

L’accompagnement est mis en place depuis octobre 2022, à la suite du décès d’une de leurs filles. L’objectif est de soutenir financièrement la famille dans cet événement afin de maintenir leur équilibre budgétaire.

La famille a été informée en août 2022 que leur fille de 16 ans était atteinte d’une maladie grave. Durant cette période, les parents étaient en arrêt maladie afin d’être présents auprès de leur fille. Malgré le traitement, le décès est survenu en septembre 2022.

Cette situation retentit sur le budget de la famille, les indemnités journalières étant inférieures au revenu habituel du couple. Le père a repris son activité. Cependant, la mère a besoin de davantage de temps avant de reprendre le travail. De plus, la perte de leur fille entraîne la fin de l’attribution des allocations familiales.

La famille a perçu l’aide nationale au décès d’enfant (versée selon les ressources de la famille). Cette somme a permis de régler une partie seulement des frais d’obsèques. Une demande d’aide financière auprès de la Ligue contre le cancer est envisagée ainsi qu’une aide financière auprès du conseil départemental. Afin de soutenir la famille dans cette épreuve, une aide individuelle de la CAF du Pas-de-Calais a enfin permis de réduire le reste à charge de la famille.

Suicide de son enfant 

Une femme est accompagnée à la suite du décès de sa fille survenu en 2023. Un rendez-vous lui a été proposé pour faire le point dans ses démarches, la soutenir au regard de ce changement de situation familiale et des problématiques survenues et elle a évoqué les circonstances douloureuses du décès : un suicide. L’intéressée a trois autres enfants âgés de 4, 6 et 8 ans. Elle est préoccupée par la santé mentale de son fils de 8 ans, qui a découvert la scène tragique au domicile familial. Depuis ce choc, il tient des propos inquiétants (idées noires) et, au vu du contexte, la mère craint qu’il ne finisse par passer à l’acte lui aussi. Après évaluation par le travailleur social, une orientation vers une thérapie familiale a été préconisée.

La question du relogement s’est posée lors de l’entretien, la mère ne souhaitant plus rester dans le logement actuel. Une démarche a été envisagée en ce sens. Elle a obtenu une proposition de logement d’un bailleur social, qu’elle a acceptée.

Encadre

Que dire à vos patients ? 

  • Dans ces situations de détresse sociale, il est important que les familles sachent qu’elles peuvent être accompagnées par les Caisses d’allocations familiales, les centres communaux (ou intercommunaux) d’action sociale, les maisons des solidarités des conseils départementaux, les secteurs associatifs et caritatifs.
  • Une coopération des acteurs de la sphère solidarité est en place sur les territoires pour répondre à leurs besoins. 
  • Pour bénéficier d’un accompagnement selon les critères définis, les familles peuvent se rapprocher directement de leur CAF respective, contacter le 32 30, se rendre sur le site www.caf.fr et sur les pages locales afin d’obtenir les informations spécifiques.
Encadre

Que sont les Maisons des 1 000 premiers jours et de la parentalité ?

Une Maison des 1 000 premiers jours est un lieu où rencontrer des professionnels mais aussi, tout simplement, d’autres parents. Dans ses locaux sont organisés des ateliers collectifs, par exemple sur le sommeil, l’alimentation, l’allaitement, l’usage et l’impact des écrans ou encore des séances collectives de préparation à la naissance et à la parentalité…

Les professionnels de la petite enfance peuvent aussi y avoir accès. Ressource utile pour eux, la Maison des 1000 premiers jours est un lieu de rencontres, de travail, de formation, où il est possible d’apprendre à se connaître et d’imaginer des actions communes, au bénéfice des familles.

La création d’une Maison par département est préconisée. D’autres projets sont prévus afin de mailler le territoire. Pour plus d’informations : https ://www.1000 -premiers-jours.fr/fr  

Une Maison de la parentalité est un lieu d’information et d’orientation où sont abordées les problématiques familiales par le biais d’une prestation juridique (droit de la famille), via un espace de rencontre, par une thérapie familiale ou conjugale, un point d’écoute jeunes ou la médiation familiale. Il en existe sur tout le territoire.

Références 
1. CAF. Plaquette branche Famille 2022 : https://bit.ly/3SmoLsf 
2. CAF du Pas-de-Calais. Portrait social CAF du Pas-de-Calais, novembre 2022 : https://bit.ly/3QkbChM 

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essentiel

Le travailleur social est un professionnel en mesure d’évaluer la situation sociale d’une famille et de mettre en place une ou plusieurs interventions individuelles et/ou collectives en fonction de la situation.

Les structures petite enfance, enfance-jeunesse, de soutien à la parentalité ou de l’animation de la vie sociale peuvent être des lieux d’accueil et d’orientation.

Le réseau des CAF, en France métropolitaine et dans les départements et régions d’outre-mer, dispose d’une ingénierie sociale pour accompagner les familles lors d’événements de vie difficiles.

D’autres partenaires institutionnels et associatifs peuvent accompagner les familles fragilisées.