Il n’est pas toujours facile de savoir comment conseiller et accompagner les patients ayant une alimentation végétarienne. En France, il n’existe pas de recommandations sur cette alimentation qui est la cible de craintes souvent injustifiées dans le cas où elle est bien menée.

Pour rappel, l’alimentation végétarienne exclut la consommation de viande et de poisson ; l’alimentation végétalienne (ou végane) exclut, quant à elle, tous les produits d’origine animale (viande, poisson, produits laitiers, œufs, miel).

Recommandations internationales

L’Académie américaine de nutrition et de diététique fait valoir que, sous réserve de complémentations et de vigilance, « une alimentation végétarienne bien menée […] peut satisfaire les besoins de personnes de tout âge, y compris les femmes enceintes ou allaitantes, les enfants et les adolescents ». Ce positionnement est approuvé par les instances nutritionnelles du Royaume-Uni, de l’Australie et de la Nouvelle-Zélande, du Canada et des États-Unis, de la Belgique, d’Israël et de la Suisse.

En France, la proportion de patients ayant une alimentation végétarienne est estimée à 1,1 % (0,8 % de végétariens et 0,3 % de végétaliens).2 Ce choix alimentaire peut avoir plusieurs raisons : éthiques, environnementales, sanitaires ou financières.

Conseils alimentaires et complémentation

Protéines

La consommation de protéines est moins importante dans les alimentations végétariennes que dans l’alimentation carnée, mais elle resterait supérieure aux apports nutritionnels recommandés, selon une revue de la littérature.3 Ces apports nutritionnels doivent se situer entre 0,83 et 2,2 g/kg/j pour un adulte de moins de 60 ans, selon l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses).

Toutes les protéines végétales comportent l’ensemble des acides aminés essentiels existants (un peu moins de lysine dans les céréales, mais les sources peuvent se compléter).

Il convient de consommer des protéines végétales variées (céréales, légumineuses et oléagineux).

Vitamine B12

La vitamine B12 est présente uniquement dans les produits d’origine animale. Sa carence peut être responsable d’une anémie macrocytaire et de troubles neurologiques parfois irréversibles.

Une complémentation en vitamine B12 doit donc être systématique chez les végétariens et végétaliens (tableau).

Le dosage sanguin de la vitamine B12 est rarement nécessaire chez un patient complémenté en bonne santé. En revanche, il est pertinent en cas de suspicion clinique de carence ou de refus de complémentation.

Iode

L’iode est nécessaire à la synthèse des hormones thyroïdiennes. La consommation de produits laitiers pour les végétariens et d’algues pour les végétaliens permet d’assurer les apports nécessaires. Cependant, la teneur en iode des algues est variable, et il existe un risque de dysthyroïdie en cas de dépassement du seuil de sécurité.

Une complémentation en iode s’impose chez les végétaliens. Elle est encouragée chez les végétariens ne consommant que très peu de produits laitiers (tableau).  

Lipides (oméga 3)

La famille des oméga 3 comprend l’acide alphalinolénique (ALA), d’origine végétale, l’acide eicosapentaénoïque (EPA) et l’acide docosahexaénoïque (DHA), présents dans les poissons gras. L’ALA permet la synthèse de l’EPA, qui est le précurseur du DHA. Les éventuelles conséquences cliniques d’une insuffisance d’apport en DHA sont mal identifiées en dehors de la grossesse (prématurité).

Il convient de : 

  • consommer des aliments riches en ALA (noix, graines de colza, de lin et leurs huiles…) ;
  • complémenter en DHA végétal la femme enceinte et éventuellemenl’enfant en bas âge (tableau).

Calcium

Les apports alimentaires en calcium sont suffisants chez les végétariens et végétaliens ayant une alimentation adaptée.

Il faut conseiller la consommation d’aliments riches en calcium (choux, soja, haricots blancs, amandes, eaux ou produits enrichis…).

Vitamine D

Les besoins et apports en vitamine D sont les mêmes que ceux de la population générale.

Fer

Les études ne trouvent pas davantage d’anémie ferriprive chez les patients ayant une alimentation végétarienne que chez ceux ayant une alimentation carnée.4 L’absorption du fer non héminique est majorée lors d’une alimentation végétarienne (car la ferritine est plus basse).

Il faut consommer des aliments riches en fer (légumineuses, légumes verts, oléagineux) et en optimiser l’absorption par une association avec des aliments riches en vitamine C, une diminution des apports en tanin (café, thé) et un trempage des légumineuses avant cuisson.

Une surveillance, accompagnée éventuellement d’une complémentation, est nécessaire chez les femmes enceintes et menstruées (comme en population générale).

Zinc

Bien que les apports en zinc soient plus faibles chez les patients ayant une alimentation végétarienne, sa concentration sanguine n’est pas inférieure.

Les aliments riches en zinc sont les graines de courge, le chanvre, les haricots, les oléagineux, l’avoine.

Vigilance dans certaines situations

Patientes enceintes ou allaitantes

La complémentation en vitamine B12 (± en iode pour les végétaliennes) et en DHA est obligatoire. 

Petite enfance

L’allaitement maternel exclusif est recommandé jusqu’à la diversification. En cas de végétalisme, il est possible d’utiliser des préparations pour nourrissons à base de protéines végétales spécifiquement élaborées pour répondre aux besoins nutritionnels.

Les laits animaux ainsi que les boissons végétales non infantiles ne sont pas adaptés à l’alimentation des nourrissons.

La complémentation en vitamine B12 (± en iode) de l’enfant doit débuter au moment de la diversification.

Suivi diététique

Il ne faut pas hésiter à orienter les patients vers des diététiciens formés à l’alimentation végétale. Une liste est consultable sur le site de l’Observatoire national des alimentations végétales : https ://onav.fr.

Médicaments

En France, les médicaments sont testés sur les animaux et ne sont donc pas véganes. Néanmoins, il existe parfois des alternatives, et il est intéressant d’en discuter avec le patient. Cela permet d’éviter une rupture du lien de confiance ou une mauvaise observance.

Le site vegeclic.com fournit des arbres décisionnels et des recommandations pour les professionnels de santé ainsi que des informations pour les patients.

Références
1. Melina V, Craig W, Levin S. Position of the Academy of Nutrition and Dietetics: Vegetarian Diets. J Acad Nutr Diet 2016;116(12):1970-80.
2. IFOP, FranceAgriMer. Études consommation. Végétariens et flexitariens en France en 2020. 2021 (en ligne, consulté en novembre 2023). Disponible sur https://bit.ly/3Sw65Gs 
3. Mariotti F, Gardner CD. Dietary Protein and Amino Acids in Vegetarian Diets-A Review. Nutrients 2019;11(11): 2661.
4. Henjum S, Groufh-Jacobsen S, Stea TH. Iron Status of Vegans, Vegetarians and Pescatarians in Norway. Biomolecules 2021;11(3):454.

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