Aliments en cause

Les allergies alimentaires sont de plus en plus fréquentes chez l’enfant (prévalence de 6-8 % en Europe, 3 fois plus que chez l’adulte).
Principaux aliments incriminés :
– lait de vache et œuf (en particulier avant 2 ans) ;
– arachide, fruits à coque (noix de cajou, pistaches et noisettes) ;
– poissons et crustacés.
Manifestations cliniques très variables :
– syndrome oral (picotements de la langue, du pharynx et/ou des lèvres, parfois accompagnés d’une tuméfaction labiale discrète) ;
– angioœdème aigu ;
– anaphylaxie pour les formes aiguës ;
– dermatite atopique (chronique).
Nouvelles formes d’allergies :
– à l’alpha-gal (viande rouge) ;
– syndrome d’entérocolite induite par les protéines alimentaires (SEIPA) responsable de signes digestifs survenant le plus souvent entre 2 et 4 heures après l’ingestion de l’aliment allergène.

Diagnostic allergologique

Interrogatoire :
– âge de début des symptômes, antécédents atopiques et facteurs de risque (asthme surtout) ;
– mode d’alimentation et lien avec les manifestations allergiques : âge de la diversification, nombre d’aliments concernés, quantité, effets d’une éviction/réintroduction, mode de consommation (cru, cuit)…
Examens complémentaires, réalisés secondairement par l’allergologue :
prick-tests (aliments natifs) ;
– examens biologiques (dosage des IgE spécifiques, allergènes moléculaires recombinants pour certains aliments) ;
– test de provocation orale en milieu hospitalier en cas de doute persistant ou pour déterminer un seuil de réactivité, évaluer une immunothérapie.
Après confirmation du diagnostic :
– l’allergologue détermine un régime d’éviction ciblé, les aliments autorisés, le mode de cuisson permettant la tolérance de l’aliment, et la nécessité éventuelle d’une trousse d’urgence et d’un projet d’accueil individualisé (PAI) ;
– un modèle peut être téléchargé sur le site de l’Association française pour la prévention des allergies (AFPRAL) à l’adresse suivante : https://bit.ly/34UeQ2G

Prise en charge par le généraliste (encadré 1)

Dans l’idéal, le suivi sera pluridisciplinaire (diététicienne, psychologue), le médecin généraliste ayant un rôle central de coordination des différents acteurs.
Le généraliste prescrit également, en cas d’allergie avérée, un PAI pour encadrer la scolarité ; il sera réévalué et adapté si besoin chaque année.
Un protocole d’urgence en cas de réaction allergique, clair et personnalisable, doit y être joint.
Prise en charge médicamenteuse (encadré 2) :
– adrénaline (10 μg/kg en intramusculaire ; au maximum 0,5 mg par injection) : traitement de première intention ; utiliser les auto-injecteurs ;
– antihistaminique oral, bronchodilatateurs inhalés pour la trousse d’urgence le cas échéant (pas de consensus).
L’éducation thérapeutique est primordiale, tant sur le plan alimentaire que médicamenteux.
Encadre

1. Rôles du généraliste (selon ses compétences propres et en lien avec un allergologue)

• Répondre à la demande des parents

• S’assurer que l’histoire de l’enfant est bien celle d’une allergie (alimentaire)

• Vérifier que l’indication du projet d’accueil individualisé (PAI) est conforme aux recommandations

• Recueillir le souhait des parents et de l’enfant s’il est en âge de l’exprimer et l’autorisation expresse de la famille

• Encourager les parents à initier la démarche quand une indication possible de PAI est retenue par le médecin

• Informer les parents des modalités encadrant sa mise en place.

• Fournir, dans le PAI, des informations claires, concises, écrites sur le(s)aliment(s) et/ou ingrédient(s) dont il faut faire l’éviction et préciser :

– si l’(les) aliment(s) peut(peuvent) être consommé(s) cuit(s)

– si de faibles quantités de cet(ces) aliment(s) peuvent être consommées

– les besoins spécifiques éventuels : lors des activités d’arts plastiques ou ateliers, lors des sorties scolaires

• Proposer des recommandations écrites dans le PAI sur les modalités de restauration (panier repas amené par les parents, repas fourni par la restauration scolaire tenant compte de(s) l’éviction(s), repas collectif autorisé sous la responsabilité des parents…) et lors des goûters et anniversaires (aliments amenés par les parents exclusivement ou non)

• Suggérer, dans le PAI, une conduite à tenir écrite, claire, facile à lire pour des personnels non soignants en cas de réaction allergique (www.lesallergies.fr ou www.sp2a.fr).

• Joindre une ordonnance pour les médicaments contenus dans la trousse d’urgence

• Cette dernière est à prescrire (notamment un auto-injecteur d’adrénaline) selon les recommandations

• Montrer régulièrement l’utilisation des médicaments prescrits dans la trousse d’urgence, le cas échéant, et notamment de l’auto-injecteur d’adrénaline (avec un dispositif factice) et des bronchodilatateurs inhalés (avec éventuellement une chambre d’inhalation selon l’âge, le dispositif et les possibilités de l’enfant)

• Favoriser le lien avec les différents personnels en milieu scolaire (médecin, infirmier(ère), personnels enseignants et de la restauration…), l’enfant et sa famille

• Informer régulièrement le médecin de l’Éducation nationale et les autres partenaires médicaux (allergologue, pédiatre…) du suivi et de la survenue d’éventuelles réactions allergiques, du traitement (médicament, induction de tolérance…) et du régime alimentaire

• Renouveler les prescriptions pour la trousse d’urgence si nécessaire. Tout nouveau dispositif (auto-injecteur d’adrénaline) doit faire l’objet d’une démonstration avec un dispositif factice

Encadre

2. L’adrénaline dans les allergies alimentaires pédiatriques en 3 questions

Quand prescrire ?

– Indications absolues : anaphylaxie à un aliment ou antécédent d’asthme traité et allergie alimentaire à l’exclusion des syndromes aliments-pollens (si syndrome oral seul).

– Indications relatives : réaction allergique légère/modérée à l’arachide ou aux fruits à coque (sauf syndrome oral et allergie aux pollens), ou chez l’adolescent, ou éloignement d’une structure médicale, ou liée à de faibles quantités d’aliments


À quelle posologie ?

– 0,15 mg par dose entre 7,5 et 25 kg ;

– 0,30 mg par dose si poids > 25 kg ;

– 0,50 mg si poids > 60 kg.


Comment faire en pratique ?

– Adrénaline utilisée avec un auto-injecteur dans un de ses 3 dosages.

– Elle doit être injectée dès que possible, par voie intramusculaire, dans la partie moyenne de la cuisse, enfant déshabillé.

– En cas d’efficacité insuffisante, une seconde dose peut être administrée après 10 à 15 minutes.

Pour en savoir plus
Pouessel G. Allergie alimentaire de l’enfant et accueil en milieu scolaire : quelles précautions ? Rev Prat 2018;68:647-53.

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