Allergie alimentaire IgE-médiée et anaphylaxie
Un contact préalable avec l’allergène suspecté est indispensable pour occasionner une sensibilisation et la production d’IgE spécifiques.
Les manifestations cliniques de l’allergie alimentaire immédiate médiée par les IgE peuvent être cutanées (urticaire, œdème, prurit), respiratoires (rhinoconjonctivite, asthme et œdème laryngé), digestives (douleurs abdominales, vomissements et diarrhées), cardiovasculaires (choc anaphylactique avec hypotension et tachycardie).
Ces manifestations cliniques surviennent la plupart du temps moins de deux heures après l’ingestion d’un allergène alimentaire.
L’anaphylaxie est l’expression de la sévérité de l’allergie alimentaire. La définition de Sampson et al. est celle d’une atteinte d’au moins deux organes dans les minutes ou les heures suivant l’exposition à un allergène potentiel identifié avec la possible survenue d’une hypotension artérielle ou d’un malaise.2
Les réactions anaphylactiques sont classées selon leur gravité (
Comment s’orienter devant une suspicion d’allergie alimentaire ?
D’abord, interroger le patient
Un interrogatoire diététique complète la recherche d’allergie alimentaire sur la consommation antérieure d’allergènes.
Exploration allergologique
Trois situations possibles
• si une allergie médiée par les IgE est confirmée – histoire clinique compatible et tests allergologiques positifs –, la mise en place d’un régime d’éviction du ou des aliments incriminés avec la prescription d’une trousse d’urgence est indispensable. Pour les enfants, il ne faut pas oublier la mise en place d’un projet d’accueil individuel (PAI) pour la collectivité. L’une des étapes indispensables est l’éducation thérapeutique sur les étiquetages de précaution et les signes cliniques de l’allergie alimentaire, en insistant sur les signes sévères et sur le maniement du stylo auto-injecteur d’adrénaline ;
• en cas de doute diagnostique – histoire clinique et tests allergologiques peu contributifs –, un test de provocation orale (TPO) en milieu hospitalier pour l’allergène en cause peut être nécessaire. Le patient doit alors être adressé dans un centre spécialisé. La trousse de secours doit être maintenue jusqu’à la fin des explorations ;
• si l’allergie alimentaire médiée par les IgE n’est pas confirmée – histoire clinique non compatible et tests allergologiques négatifs –, il faut lever le régime d’éviction.
À qui prescrire de l’adrénaline ?
Induction de tolérance orale
Il s’agit de protocoles toujours pratiqués dans des centres spécialisés en allergie alimentaire, étalés sur plusieurs mois, en deux étapes : une phase de montée des doses et une phase palier.
De nouvelles voies d’immunothérapie sont en cours de recherche, notamment cutanée et sublinguale.
Prévenir les allergies avec une diversification alimentaire optimisée
La plupart des sociétés savantes recommandent ainsi l’introduction d’aliments solides à partir de 4 à 6 mois chez tous les nourrissons, indépendamment de la présence d’un risque d’atopie : fruits et légumes, œufs, viande, poisson, blé mais aussi lait de vache, arachide et fruits à coque.6
Quelques exemples pratiques d’introduction d’aliments
Concernant l’arachide et les fruits à coque, il existe désormais des pâtes (beurre ou purée) qui peuvent être ajoutées dans un biberon ou une compote.
Tout aliment introduit doit ensuite être régulièrement consommé
De fait, une fois introduit dans l’alimentation, l’allergène doit être consommé régulièrement durant toute l’enfance pour éviter la survenue d’une allergie ; en effet, la consommation d’un allergène suivie d’une période d’éviction risquerait d’entraîner une allergie.
Gare à la voie transcutanée en cas d’atopie sévère !
Les enfants ayant une dermatite atopique modérée à sévère ou une mutation de la filaggrine ont un risque augmenté de développer des allergies alimentaires. La peau, dont la barrière cutanée est altérée, est alors une voie de sensibilisation préférentielle. Il faut conseiller aux parents d’éviter l’exposition à des protéines alimentaires par l’application d’émollients en contenant (huile d’amande, de coco, crème à base de sésame, avocat, lait, avoine). Un traitement précoce et actif de l’eczéma du nourrisson par des émollients et dermocorticoïdes pour restaurer la barrière cutanée est recommandé dans cette population. Une évaluation sans tarder par un allergologue peut permettre de guider les réintroductions alimentaires et éviter l’apparition d’allergie.
2. Sampson HA, Muñoz-Furlong A, Campbell RL, et al. Second symposium on the definition and management of anaphylaxis: summary report--Second National Institute of Allergy and Infectious Disease/Food Allergy and Anaphylaxis Network symposium. J Allergy Clin Immunol 2006;117(2):391‑7.
3. Ring J, Brockow K, Behrendt H. History and classification of anaphylaxis. Novartis Found Symp 2004;257:6‑16; discussion 16-24, 45‑50, 276‑85.
4. Pouessel G, Beaudouin E, groupe de travail « Anaphylaxie » de la Société française d’allergologie. Quelle trousse d’urgence dans l’allergie alimentaire chez l’enfant ? Rev Fr Allergol 2009;60(6-7):571-5.
5. Sabouraud-Leclerc D, Bradatan E, Moraly T, et al. Primary prevention of food allergy in 2021: Update and proposals of French-speaking pediatric allergists. Arch Pediatr Organe Off Soc Francaise Pediatr 2022;29(2):81‑9.
6. Sabouraud-Leclerc D, Bradatan E, Moraly T, et al. Prévention primaire de l’allergie alimentaire du jeune enfant, actualités et propositions. Rev Fr Allergol 2022;62(4):407‑22.