Ã Taux d’hémoglobine (Hb) < 13 g/dL chez l’homme, 12 g/dL chez la femme (10,5 si enceinte).
Ã Nécessite l’analyse complète :
– des paramètres des globules rouges : surtout le volume globulaire moyen (VGM normal : de 80 à 100 μ3) ;
– de l’hémogramme : y a-t-il d’autres anomalies ?
– du compte des réticulocytes (normal de 25 000 à 120 000/mm3) si anémie non microcytaire ;
– du frottis sanguin si hémogramme anormal ;
– des hémogrammes antérieurs : indispensables.

Anémie microcytaire

VGM inférieur à 80 μ3. Origine toujours centrale.
ÃDeux grandes causes : carence martiale et inflammation chronique.
Ã Carence martiale : ferritinémie basse (< 10 μg/L) ; ou association fer sérique bas (< 11 μmol/L chez la femme, 12 μmol/L chez l’homme) et capacité de fixation de la transferrine (ou sidérophiline) élevée. Rechercher la cause : saignement digestif d’abord, gynécologique chez la femme non ménopausée, selon le contexte.
ÃInflammation : se fonder sur la CRP plutôt que sur la VS (fréquemment accélérée par l’anémie : 25-35 mm à la 1re heure).
Ferritinémie souvent élevée, fer sérique bas, mais capacité de fixation de la transferrine basse. Seules les inflammations chroniques se compliquent d’anémie microcytaire.
Ã Si pas de carence martiale ni d’inflammation : anomalie de l’hémoglobine (thalassémie).
Anémie modérée contrastant avec une microcytose très marquée, déjà présente sur les hémogrammes antérieurs. Contexte familial évocateur.
À l’électrophorèse de l’hémoglobine : augmentation de l’HbA2 (> 3,5 %) si bêta-thalassémie mineure (populations méditerranéennes et Asie du Sud-Est). Normale si alpha-thalassémie mineure (sujets noirs et Asie du Sud-Est).

Anémie régénérative

ÃHausse des réticulocytes, inversement proportionnelle au taux d’hémoglobine. Plus l’anémie est sévère, plus leur taux s’élève : habituellement > 150 000/mm3.
Dans le cas contraire, rechercher une cause centrale. VGM parfois un peu augmenté.
ÃTrois causes

Régénération d’une anémie centrale traitée (carence en fer, en vitamine B12), dite crise réticulocytaire. Ne dure pas, le contexte conforte le diagnostic.
Hémorragie aiguë. Réticulocytose retardée par rapport au début de l’hémorragie (2-3 jours habituellement). Contexte évocateur.
Anémie hémolytique : surtout si ictère et splénomégalie. Hyperréticulocytose et signes d’hyperhémolyse : augmentation de la bilirubine non conjuguée et parfois des LDH, baisse de l’haptoglobine (très sensible). Deux origines (encadré). Bilan initial clinique (antécédents, histoire familiale, adénopathies) et biologique : frottis sanguin (sphérocytose) et test de Coombs direct globulaire (en faveur d’une cause immune).

Anémie arégénérative normo- ou macrocytaire

ÃArégénérative = réticulocytes < 150 000/mm3.
ÃFaiblement macrocytaire (VGM < 105 μ3) : 5 causes.
Insuffisance rénale chronique : baisse prolongée du débit de filtration rénal (DFG) < 20-30 mL/min/1,73 m2. Par carence en érythropoïétine : corrigeable.
Inflammation chronique : avant d’être microcytaire, l’anémie est normocytaire.
Hypothyroïdie : VGM toujours < 110 µ3. Doser la TSH us.
Alcoolisme patent : VGM toujours < 110 µ3.
Hémodilution (fausse anémie) : grossesse, splénomégalie volumineuse, IgM monoclonale.
Ces causes éliminées, suspecter une anémie centrale : myélogramme +++.
ÃTrès macrocytaire (VGM > 105 µ3) : nécessite un myélogramme.
Insuffisance quantitative : érythroblastopénie, infiltration tumorale (leucémie, myélome, lymphome ou cancer solide), aplasie médullaire ou myélofibrose. Dans ces deux derniers cas, les autres anomalies de l’hémogramme et le myélogramme pauvre font pratiquer une biopsie ostéomédullaire.
Insuffisance qualitative : carence vitaminique (B9, folates ou B12) si mégaloblastose avec anomalies des autres lignées. Dosages vitaminiques et enquête étiologique : endoscopie digestive, recherche d’anticorps anti-facteur intrinsèque (maladie de Biermer).
En l’absence de mégaloblastose, penser à une myélodysplasie : atteinte d’une ou plusieurs lignées sanguines et souvent anomalie(s) cytogénétique(s). Sa fréquence augmente avec l’âge.
ÃTaux de réticulocytes < 10 000/mm3 : érythroblastopénie. Faire un myélogramme : hypoplasie de la lignée érythroblastique. Impose une enquête étiologique (parvovirus B19, thymome).

Prise en charge

Elle dépend de la cause :
– traitement martial dans la carence en fer (100 à 200 mg/j de fer métal per os pendant 4 mois) ;
– érythropoïétine dans l’insuffisance rénale ;
– corticoïdes dans l’anémie hémolytique auto- immune.
ÃTraitement urgent rarement nécessaire sauf mauvaise tolérance (dyspnée, douleurs thoraciques, malaise). Très important car la correction d’une anémie aiguë (essentiellement par transfusion sanguine) modifie les résultats biologiques nécessaires à l’enquête étiologique : par exemple le bilan martial ou vitaminique. Dans ces cas, prélever AVANT transfusion +++.
Encadre

Causes des anémies hémolytiques

 Corpusculaires

• Pathologie de l’hémoglobine : drépanocytose, etc.

• Défaut de la membrane des globules rouges : microsphérocytose héréditaire (maladie de Minkowski-Chauffart)…

• Anomalie des enzymes du globule rouge : déficit en G6-PD…

• Seule maladie acquise : hémoglobinurie paroxystique nocturne.

 Extracorpusculaires

• Infectieuse : paludisme...

• Allo-immune : accident transfusionnel (ABO, rhésus).

• Auto-immune : secondaire à une hémopathie (leucémie lymphoïde chronique), lupus…

• Mécanique : valves cardiaques, micro-angiopathie thrombotique.