La perte de l’odorat figure parmi les symptômes les plus fréquents associés à la Covid-19, aussi bien à la phase aiguë que dans les suites de celle-ci (« Covid long »). Mais quelles sont sa durée et son pronostic ? Quel est le rôle de la rééducation olfactive dans la récupération ? Le point avec le Dr Marion Renaud, première auteure d’une étude française publiée dans le JAMA ayant suivi des patients pendant 1 an…

 

Une étude de cohorte menée dans les hôpitaux de Strasbourg a suivi pendant 1 an 97 patients ayant eu une infection par le SARS-CoV-2 confirmée par PCR, avec une anosmie subséquente (69 % de femmes ; âge moyen : 39 ans). La perte d’odorat aiguë devait durer au moins 7 jours ; les patients ont ensuite été invités à remplir un questionnaire à intervalles de 4 mois sur une année, et leur fonction olfactive a été évaluée par des tests psychophysiques. Ceux qui ont eu à la fois un test olfactif subjectif et objectif représentaient 53 % de la cohorte ; 47 % ont eu seulement une évaluation subjective de l’évolution de l’anosmie.

Conclusion : 12 mois après l’infection aiguë, 96 % des participants avaient objectivement récupéré l’odorat – des résultats plus encourageants que ceux présentés dans d’autres études évaluant le pronostic à 6 mois, où ce pourcentage oscillait autour de 85 %.

À 4 mois, parmi les 51 patients dont la récupération était évaluée à la fois subjectivement et objectivement, 45 % ont rapporté une récupération complète à l’évaluation subjective. Dans ce même groupe, les tests objectifs psychophysiques ont montré que 84 % étaient normosmiques, confirmant ces autodéclarations et montrant de plus que 70 % de ceux qui s’étaient auto-évalués comme « partiellement rétablis » l’étaient en fait totalement.

À 8 mois, l’évaluation objective a confirmé une récupération complète chez 49 des 51 sujets (96,1 %). Deux patients sont restés hyposmiques à 1 an, avec des anomalies persistantes (1 avec un seuil olfactif anormal et 1 avec une parosmie entraînant une identification anormale).

Parmi ceux qui ont eu seulement une évaluation subjective (par questionnaire), 13 des 46 patients, soit 28,2 %, ont rapporté une récupération satisfaisante à 4 mois (7 avec une récupération totale et 6 avec une récupération partielle) ; les 33 patients restants (71,7 %) l’ont fait à 12 mois, dont 32 avec une récupération totale et 14 avec une récupération partielle.

Ces résultats suggèrent, d’une part, que l’anosmie liée à la Covid-19 est probablement due à une inflammation périphérique (plutôt qu’à une présence du virus dans le bulbe olfactif) allant dans les sens des conclusions des études sur les animaux (imagerie, pathologie post-mortem…). D’autre part, ils confirment l’existence de divergences entre l’auto-évaluation et les tests objectifs, les participants ayant tendance à sous-évaluer le retour à la normosmie, ce qui souligne l’importance d’utiliser les deux méthodes pour évaluer les troubles olfactifs post-viraux. Ces divergences pourraient s’expliquer par des troubles qualitatifs perturbant l’auto-évaluation (comme la parosmie) et/ou par la capacité limitée des tests olfactifs à capturer un retour complet à la fonction chez les personnes ayant des capacités olfactives plus élevées à l’origine.

Dans cette étude, le rôle de la rééducation olfactive dans la récupération de l’odorat n’est pas précisé. Le Dr Marion Renaud, première auteure du texte, nous a cependant précisé que « tous les patients ont reçu une fiche explicative sur les modalités de la rééducation olfactive, son intérêt et les supports à utiliser, mais seuls 50 % l’ont menée à bien, avec une observance variable ». Toutefois, « plusieurs études ont montré que la rééducation olfactive permet d’accélérer et d’améliorer la récupération de l’odorat ».

Laura Martin Agudelo, La Revue du Praticien

Pour en savoir plus :

Renaud M, Thibault C, Le Normand F, et al. Clinical Outcomes for Patients With Anosmia 1 Year After Covid-19 Diagnosis.JAMA 2021;4(6):e2115351.

À lire aussi :

Nguyen DT, Jankowski R, Gallet P, et al. Rééducation olfactive dans l’anosmie post-infectieuse.Rev Prat 2020;70(7);703-8.

Anosmie dans la Covid : quels traitements ?Rev Prat janvier 2021.

Nguyen DT, Masson V, Jankowski R, et al. De la physiopathologie à la prise en charge thérapeutique de la perte de l’odorat dans la Covid-19.Rev Prat 2021;71(1);13-9.

Nguyen DT, Ancel L, Tran TD. Covid : les lavages de nez sont-ils recommandés ?Rev Prat 7 avril 2021.