L’adéno-amygdalectomie est le traitement de référence mais son efficacité est moyenne.
Par Nicolas Leboulanger*
* Service d’ORL et de chirurgie cervico-faciale, hôpital universitaire Necker-Enfants malades, AP-HP, 75015 Paris ; faculté de médecine Paris-5 René-Descartes. nicolas.leboulanger@aphp.fr
Le syndrome d’apnées obstructives du sommeil (SAOS), survenue nocturne d’épisodes récurrents d’occlusion partielle (hypopnée) ou complète (apnée) des voies aériennes supérieures (VAS), atteindrait entre 0,5 et 3 % de la population pédiatrique (de 2 à 5 ans) selon les études.1 Le ronflement simple, sans gravité, serait plus fréquent : jusqu’à 6 %.2
Le diagnostic est essentiellement clinique (tableau) fondé sur l’anamnèse et l’examen somatique. La nasofibroscopie précise le volume des végétations, la position du voile et des amygdales, la mobilité et l’aspect laryngé, la taille de la base de la langue, les mouvements de déglutition et de phonation.

Étiologie

C’est une hypertrophie des amygdales et/ou des végétations dans la très grande majorité des cas (fig. 1). La première est en général cotée de 0 à 4 ;
– 0 : amygdales entièrement dans la loge ;
– 1 : petites, elles laissent apercevoir le pilier postérieur du voile, prenant moins de 25 % de l’espace ;
– 2 : elles en occupent entre 25 et 50 % ;
– 3 : entre 50 et 75 % ;
– 4 : amygdales jointives ou quasi jointives.3 L’hypertrophie des végétations adénoïdes, seule ou associée, est objectivée quand c’est nécessaire via une fibroscopie du cavum par voie nasale, réalisable à tout âge quand on dispose du matériel adapté.
L’obstruction pharyngée, haute, peut se conjuguer avec d’autres facteurs plus ou moins fréquents, voire rares : obésité, important trouble de l’articulé dentaire, macroglossie (notamment d’une trisomie 21), malformation crânio-faciale, etc.

Exploration

Différents types d’enregistrements du sommeil sont possibles. Tous ne sont pas réalisés en routine et validés chez l’enfant. Ceux de type 1 (examen de référence, mais peu accessible car complexe et hospitalier) et 2, ou polysomnographie, sont les plus complets car ils incluent entre autres un électroencéphalogramme (EEG). Dans le type 3, ou polygraphie ventilatoire, il n’y a pas d’EEG mais tous les autres paramètres (SaO2, flux aériens, efforts respiratoires…) sont mesurés. Le type 4, enfin, regroupe un ensemble de techniques plus simples et en général moins onéreuses, développées en alternative et parfois réalisables à domicile.
Les 3 premiers donnent un résultat chiffré et notamment l’index d’apnée-hypopnée (IAH), nombre d’événements par heure (e.h-1).4 Un IAH supérieur à 1,5 e.h-1 est pathologique chez l’enfant, et supérieur à 5, il témoigne d’un SAOS avec somnolence, difficultés d’apprentissage et ronflement plus fréquent. Il est dit léger entre 1,5 et 5 ; modéré entre 5 et 10 ; sévère au-delà de 10 (rapport de la SFORL 2017).
Un enregistrement du sommeil est réservé aux : doute sur l’efficacité potentielle de l’adéno-amygdalectomie (obésité morbide, malformation crânio-faciale, maladie neuromusculaire…), examen discordant (normal alors qu’un SAOS est décrit, ou au contraire importante obstruction constatée cliniquement sans anomalie du sommeil rapportée par les parents), et risque opératoire élevé (âge < 3 ans, trouble de l’hémostase, pathologie cardiaque, grande prématurité et SAOS cliniquement sévère). En France et en dehors des cas cités ci-dessus, l’enregistrement n’est pas indiqué avant adéno-amygdalectomie pour SAOS.
L’endoscopie du sommeil, au cours d’une anesthésie générale, est encore imparfaitement validée chez l’enfant. Localisant plus précisément les zones et mécanismes en cause, elle pourrait être utile en cas d’obstruction complète multisite et échec des techniques classiques.2
Dans de rares cas, une imagerie peut être nécessaire, explorant l’articulé dentaire osseux (rayons X) ou les tissus mous linguaux et pharyngés (IRM).

Prise en charge

L’adéno-amygdalectomie est le traitement de référence des troubles respiratoires obstructifs du sommeil en cas d’hypertrophie de ces organes, y compris chez l’enfant obèse. De nouvelles techniques permettant une exérèse partielle des amygdales et une approche favorisant les interventions ambulatoires ont récemment modifié la prise en charge. Plus de 30 000 amygdalectomies sont réalisées tous les ans en France, toutes populations confondues. Pour mémoire, un ronflement simple n’est pas une indication.

Quelle technique ?

L’adénoïdectomie est faite classiquement à la curette par voie buccale. Un contrôle sous optique peut être utile en cas de récidive. L’amygdalectomie la plus pratiquée aujourd’hui est totale, extracapsulaire. Elle emporte l’amygdale en bloc en exposant les muscles de sa loge. Plus de 50 % des patients sont soulagés (moins si surpoids ou pathologie associée).
Partielle, intracapsulaire, elle consiste à enlever le tissu amygdalien véritablement obstructif, qui dépasse des piliers. Elle est de plus en plus réalisée, y compris dans les angines à répétition. Elle s’accompagne d’un risque faible de repousse, mais d’une diminution des douleurs, de l’hémorragie et de la consommation d’antalgiques, la reprise alimentaire est plus précoce. Sa place exacte par rapport à l’amygdalectomie totale sera précisée dans les quelques années à venir.5

Ambulatoire ou traditionnel ?

Plus de 90 % des adénoïdectomies sont réalisées en ambulatoire. Cette tendance concerne aussi l’amygdalectomie, même chez l’enfant. Les règles en sont bien définies.4 En résumé, une amygdalectomie ambulatoire peut être pratiquée si l’enfant a plus de 3 ans, en l’absence de comorbidités majorant le risque respiratoire et d’anomalie de l’hémostase. On s’assure également de la bonne compréhension des consignes par les parents et de leur possibilité de consulter jour et nuit (moyen de transport, localisation du domicile). L’hospitalisation est recommandée en postopératoire en cas de difficultés respiratoires à l’induction anesthésique ou lors du réveil. L’éventuelle amygdalectomie ambulatoire est alors transformée en chirurgie avec hospitalisation conventionnelle

Indications

Pour la très grande majorité des enfants, les indications et démarches diagnostiques sont résumées figure 2. Certains traitements médicaux (corticostéroïdes locaux et montélukast per os pendant 1 mois) peuvent être prescrits si le SAOS est léger et modéré (ou si SAOS résiduel après chirurgie) et quand une surveillance peut être régulière.

Ventilation non invasive (VNI)

La VNI est une technique d’assistance respiratoire qui respecte les voies aériennes du patient. Elle est tout à fait applicable à l’enfant quel que soit son âge. Pour un apnéïque, elle consiste en général en la délivrance pendant le sommeil et par un masque nasal (plus rarement nasobuccal ou facial) d’une pression positive continue (PPC) d’au moins 6 cm d’H2O.
L’indication de cette VNI est en général posée si le SAOS est sévère, persiste après une chirurgie ou en cas d’obstruction non opérable. Technique très efficace elle fait depuis quelques années partie intégrante de l’arsenal thérapeutique. Elle ne peut néanmoins être adaptée et surveillée que par une équipe spécifiquement entraînée à la pédiatrie.
L’auteur déclare avoir été sous contrat ponctuel avec les sociétés Allergan France et Smith & Nephew.
Fréquent, il est essentiellement dû à une hypertrophie des amygdales et/ou des végétations.
Le diagnostic étant clinique, un enregistrement du sommeil n’est pas systématiquement nécessaire. À faire en cas de doute ou pathologie associée.
Le traitement est chirurgical dans la plupart des cas.
références
1. Redline S, Tishler PV, Schluchter M, et al. Risk factors for sleep-disordered breathing in children. Associations with obesity, race, and respiratory problem. Am J Respir Care Med 1999;159 (5 Pt 1):1527-32.

2. Marianowski R, Monteyrol PJ. Syndrome d’apnées-hypopnées obstructives du sommeil de l’enfant. Rapport 2016 de la SFORL. Paris: Elsevier Masson; 2016: 141 p.

3. Friedman M, Tanyeri H, La Rosa M, et al. Clinical predictors of obstructive sleep apnea. Laryngo-scope 1999;109:1901-7.

4. Berry RB, Budhiraja R, Gottlieb DJ, et al. Rules for scoring respiratory events in sleep: update of the 2007 AASM Manual for the Scoring of Sleep and Associated Events. Deliberations of the Sleep Apnea Definitions Task Force of the American Academy of Sleep Medicine. J Clin Sleep Med 2012; 15:597-619.

5. Windfuhr JP, Savva K, Dahm JD, Werner JA. Tonsillotomy: facts and fiction. Eur Arch Otorhinolaryngol 2015;272:949-69.

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essentiel

Fréquent, il est essentiellement dû à une hypertrophie des amygdales et/ou des végétations.

Le diagnostic étant clinique, un enregistrement du sommeil n’est pas systématiquement nécessaire. À faire en cas de doute ou pathologie associée.

Le traitement est chirurgical dans la plupart des cas.