En 2007, la radiothérapie a été marquée, en France, par une crise sanitaire consécutive à des accidents de sur-irradiation dont ont été victimes des patients dans deux sites. L’Observatoire national de la radiothérapie a analysé l’évolution des centres entre 2012 et 2016.
À la suite de la crise sanitaire de 2007 affectant la radiothérapie, des actions très concrètes ont immédiatement été mises en place, au niveau national, afin de garantir la qualité et la sécurité des pratiques en radiothérapie et de rétablir la confiance avec les patients et leurs proches.
Parmi ces actions, la mise en place de l’Observatoire national de la radiothérapie a permis, depuis 2007, de recueillir annuellement, auprès de l’ensemble des centres de radiothérapie en activité, les données relatives aux équipements, à l’activité des centres et aux effectifs médicaux et paramédicaux spécifiques à la radiothérapie. Un tel dispositif permet aux instances impliquées dans l’organisation, la réglementation et la pratique de la radiothérapie (notamment les sociétés savantes, les agences sanitaires et le ministère en charge de la Santé) de suivre l’évolution de l’activité des centres de radiothérapie et d’évaluer l’impact d’actions mises en œuvre au niveau national, à travers différents paramètres suivis, en s’appuyant sur des données homogènes et communes.
Les premiers résultats de l'Observatoire national de la radiothérapie montraient notamment une croissance et une amélioration lentes du parc d’équipements, ainsi qu’un retard dans la généralisation des techniques modernes de radiothérapie.1, 2 Un nouveau recueil a permis de décrire l’évolution de l’activité des centres de radiothérapie en France, par la mise en perspective des principaux résultats de l’Observatoire national de la radiothérapie en 2016 avec ceux obtenus depuis l’année 2012.

Le parc d’appareils se développe et se renouvelle

Le nombre d’appareils de traitement (hors curiethérapie) augmente constamment au cours de la période étudiée (de 470 à 527 appareils, soit une augmentation de 12 % depuis 2012) ; avec notamment pour conséquence l’évolution du nombre de centres possédant au moins trois appareils (39 % en 2012 vs 47 % en 2016) et une disparition progressive des centres ne possédant qu’une seule machine (10 % en 2012 vs 8 % en 2016) [v. figure].
De plus, le parc d’appareils se renouvelle de manière importante. Même si la part d’accélérateurs polyvalents reste prépondérante (89 % en 2012 vs 79 % en 2016), les accélérateurs disponibles se spécialisent avec l’apparition et la diffusion de machines dédiées (CyberKnife, TomoTherapy et Novalis) [+ 200 % de ce type d’appareils sur la période étudiée].
En matière de techniques liées aux équipements additionnels d’accélérateurs linéaires, on observe un plus grand recours à des dispositifs avancés tels les systèmes de repositionnement de la table à distance (52 % en 2012 vs 83 % en 2016). Sur la fin de période étudiée, on constate une augmentation des techniques sécurisant les patients, avec une majorité d’accélérateurs linéaires permettant un repositionnement non seulement sur le patient mais aussi sur la cible (64 % en 2015 vs 70 % en 2016). Enfin, une plus grande mise à disposition de techniques innovantes est observée, en fin de période étudiée, tel que l’asservissement respiratoire (24 % en 2015 vs 26 % en 2016) ou encore les irradiations en conditions stéréotaxiques (19 % en 2014 vs 39 % en 2016).
Enfin, concernant la préparation des traitements, on observe, sur les deux dernières années étudiées, une augmentation des centres de radiothérapie déclarant avoir accès à une tomodensitométrie possédant un module d’acquisition 4D (49 % en 2015 vs 54 % en 2016) et une stabilité des centres ayant accès à la tomographie par émission de positons (TEP) en position de traitement (41 % en 2015 comme en 2016).

L’activité des centres augmente en nombre de patients et en nombre de séances

Depuis 2012, l’activité globale des centres de radiothérapie a augmenté de 10 % (en nombre de patients) et de 5 % (en nombre de séances) pour atteindre 192 000 patients et un peu plus de 4,1 millions de séances en 2016.
Les techniques de traitement évoluent également. La radiothérapie conformationnelle avec modulation d’intensité (RCMI), technique qui permet de traiter des volumes complexes en limitant l’irradiation des tissus sains, progresse, et son implantation tend même à se généraliser à l’ensemble des centres de radiothérapie. En 2016, 95 % d’entre eux déclarent pratiquer la RCMI (avec ou sans arcthérapie volumique) contre 50 % en 2012. L’implantation de la stéréotaxie progresse également, qu’elle soit intracrânienne (18 % en 2012 vs 40 % des centres en 2016) ou extracrânienne (19 % en 2012 vs 38 % en 2016).
En termes de traitement, l’activité de RCMI représente, en 2016, 33 % du volume total de premières pré­parations (contre 22 % en 2014), alors que les activités d’irradiation en conditions stéréotaxiques intra- et extra­crâniennes ne représentent, l’une comme l’autre, qu’environ 3 % des premières préparations (contre 2 % en 2014) [tableau 1].
Enfin, l’implantation de l’activité de curiethérapie reste stable sur les quatre années étudiées (36 % en 2012 comme en 2016). Cette activité est essentiellement proposée dans les centres de lutte contre le cancer, les centres hospitaliers universitaires, les centres hospitaliers régionaux et les cabinets libéraux. En 2016, parmi ces centres proposant la curiethérapie, 73 % d’entre eux déclarent réaliser de la curiethérapie en haut débit, 49 % de la curie­thérapie en bas débit et 37 % de la curiethérapie en débit pulsé.

Plus de personnel médical et paramédical en charge de l’activité de radiothérapie

Le nombre moyen d’équivalents temps plein (ETP) d’onco­logues radiothérapeutes par centre de radiothérapie a légèrement augmenté entre 2012 et 2016 (de 3,6 à 3,8 ETP) alors que le nombre moyen d’équivalents temps plein physiciens médicaux par centre a augmenté plus sensiblement sur cette même période (de 3,1 à 3,5 ETP).
L’analyse de la répartition par tranche d’âge fait ressortir deux catégories majoritaires chez les oncologues radiothérapeutes : celle des 55-65 ans (31 % en 2012 vs 28 % en 2016) et celle des 35-45 ans (26 % en 2012 vs 28 % en 2016). Chez les physiciens médicaux, la tranche d’âge la plus représentée est celle de 30-40 ans (41 % en 2012 vs 42 % en 2016).
Le nombre moyen d’équivalents temps plein manipulateurs en électroradiologie par centre a progressé de 13,9 à 14,9 en l’espace de quatre années. Enfin, le nombre moyen d’équivalents temps plein dédiés à la planimétrie par centre (manipulateurs dédiés à la planimétrie ou dosimétristes non manipulateurs) est égal, en 2016, à 2,4 (tableau 2).

Renforcer les moyens humains

Comme pour les années 2007 à 2012,1, 2 l’augmentation et la modernisation du parc d’appareils de traitement (hors curiethérapie) se poursuivent entre 2012 et 2016. À la fin de cette période, la moitié des centres de radiothérapie possèdent au moins trois accélérateurs, néanmoins il subsiste toujours un faible effectif d’entre eux ne possédant qu’un seul appareil de traitement.
Même si le nombre de patients traités et le nombre de séances augmentent chaque année entre 2012 et 2016, le nombre de séances progresse moins que le nombre de patients. Ce phénomène peut s’expliquer par les évolutions technologiques qui permettent, au fil du temps, de diminuer le nombre de séances par patient pour un traitement équivalent.
L’utilisation de la RCMI est bien implantée sur le territoire français. Elle est disponible dans la quasi-totalité des centres et représente un tiers des premières préparations en 2016. Le bénéfice de la RCMI est reconnu, en France, par la Haute Autorité de santé dans le traitement des cancers localisés de la prostate, des voies aérodigestives supérieures et du canal anal.3 Elle est également souvent utilisée dans le traitement des tumeurs du névraxe, les tumeurs pelviennes chez la femme et les lymphomes nécessitant de grands volumes d’irradiation.4
L’implantation de l’activité de curiethérapie n’évolue pas entre les années 2012 et 2016 alors que l’implantation de la stéréotaxie (intra- ou extracrânienne) croît sur cette même période.
Enfin, les effectifs de personnel médical et paramédical en charge de l’activité de radiothérapie ont globalement augmenté entre 2012 et 2016. Néanmoins, le nombre sans cesse croissant de patients traités ainsi que l’évolution permanente des techniques de radiothérapie impliquent un renforcement de moyens humains pour la préparation des traitements, la dosimétrie et le déroulement des séances.5 De la même façon, les progrès accomplis dans la sécurité des traitements et le contrôle qualité en radiothérapie engendrent la mobilisation de plus en plus de personnel en charge de ces activités.
Remerciements Les auteurs expriment toute leur reconnaissance à la SFRO, au SNRO, à la SFPM, à l’ASN et à la CNAM, qui ont été associés, depuis le début, au suivi et au bon déroulement de l’Observatoire national de la radiothérapie.
Encadre

Recueil de l’Observatoire national de la radiothérapie

Ce recueil s’appuie sur un questionnaire mis à la disposition des centres de radiothérapie par l’intermédiaire d’une plateforme informatique sécurisée et dédiée aux enquêtes menées par l’Institut national du cancer (INCa).

Un comité de suivi composé de l’INCa, de la Caisse nationale d’assurance maladie (CNAM), de la Société française de radiothérapie oncologique (SFRO), du Syndicat national de la radiothérapie oncologique (SNRO), de la Société française de physique médicale (SFPM) et de l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) est en charge d’analyser et de discuter les résultats issus de ces enquêtes annuelles et de proposer d’éventuelles modifications du questionnaire afin de tenir compte des retours des centres participants, d’améliorer la qualité des données recueillies et de suivre l’évolution des pratiques de la spécialité.

Entre 2012 et 2016, les taux de participation à l’enquête de l’Observatoire national de la radiothérapie sont compris entre 96 et 98 % (sur plus de 170 centres ciblés).

En 2016, les centres de radiothérapie sont répartis de la façon suivante : 48 % de cabinets libéraux, 20 % de centres hospitaliers (CH), 13 % de centres hospitaliers régionaux et/ou universitaires (CHU/CHR), 13 % de centres de lutte contre le cancer (CLCC), 3 % d’établissements de santé privés (ES privés) et 2 % d’établissements de santé privés d’intérêt collectif (ESPIC) hors-CLCC.

Références
1. Chauvet B, Bolla M, Alies-Patin A, et al. Observatoire national de la radiothérapie : rapport de l’enquête conduite en 2008 sur l’année 2007. Cancer/Radiothérapie 2009;13:466-70.
2. Observatoire national de la radiothérapie. Rapport d’enquête : situation fin 2012 et évolution depuis 2007. Collection État des lieux et des connaissances. Boulogne-Billancourt : INCa, 2014.
3. Haute Autorité de santé. Radiothérapie conformationnelle avec modulation d’intensité dans le cancer du canal anal. Actualisation du rapport de 2006, HAS 2015.
4. Bibault JE, Giraud P. Techniques innovantes en radiothérapie externe. Innov Ther Oncol 2016;2:119-25.
5. Société française de radiothérapie oncologique. Livre blanc de la radiothérapie en France. SFRO 2013.

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