objectifs
ÉVALUER le degré d’autonomie et de dépendance du sujet âgé.
DÉPISTER les facteurs de risque de déclin fonctionnel et ARGUMENTER les mesures préventives à mettre en œuvre.

Introduction

Le dépistage et la prise en charge des déterminants du déclin fonctionnel de tous les sujets âgés sont des enjeux majeurs de santé publique, en vue d’éviter l’installation d’une dépendance irréversible. La dépendance n’est pas une conséquence obligatoire de l’avancée en âge, et ne doit pas être assimilée au vieillissement normal. La gériatrie est en constante évolution afin de répondre au mieux à cette problématique, avec un passage au cours des dernières années d’une médecine centrée sur les maladies et leur traitement vers une médecine centrée sur la personne, le maintien de ses capacités fonctionnelles ainsi que le respect de ses souhaits.

Définitions importantes

L’autonomie et la dépendance sont définies par le Collège des enseignants de gériatrie de la manière suivante :
« L’autonomie est la capacité à se gouverner soi-même, ce qui présuppose la capacité de jugement (capacité de prévoir et de choisir), ainsi que la liberté de pouvoir agir, accepter ou refuser en fonction de son jugement, dans le respect des lois et des usages communs. »
« La dépendance est pour une personne la perte partielle ou totale de la capacité à réaliser les actes de la vie quotidienne, qu’elle soit physique, psychique ou sociale, et de s’adapter à son environnement. »
La fragilité est un syndrome clinique qui reflète une diminution des capacités physiologiques de réserve altérant les mécanismes d’adaptation au stress. Son expression clinique est modulée par les comorbidités et des facteurs psychologiques, sociaux, économiques et comportementaux. Le syndrome de fragilité est un marqueur de risque de mortalité et d’événements péjoratifs, notamment d’incapacités, de chutes, d’hospitalisations et d’entrée en institution. L’âge est un déterminant majeur de fragilité mais n’explique pas à lui seul ce syndrome. La prise en charge des déterminants de la fragilité peut réduire ou retarder ses conséquences. Ainsi, la fragilité s’inscrirait dans un processus potentiellement réversible.
Les capacités intrinsèques sont la combinaison de cinq fonctions physiques et mentales d’un individu. L’Organisation mondiale de la santé (OMS) a défini cinq domaines de capacités intrinsèques : mobilité, cognition, nutrition, statut psychologique, fonctions senso­­rielles (vision et audition). Ces cinq fonctions sont les plus corrélées au risque de dépendance.
Les capacités fonctionnelles sont la combinaison et l’interaction entre les capacités intrinsèques et l’environnement dans lequel évolue une personne.
Le vieillissement en bonne santé est défini par l’OMS « comme étant le processus de développement et de maintien des capacités fonctionnelles qui permet aux personnes âgées de jouir d’un état de bien-être. » Vieillir en santé, c’est continuer de faire ce qui est important pour chacun d’entre nous.

Épidémiologie de la dépendance

D’après les données du Plan grand âge de mars 2019 (tableau 1) et de la Direction de la recherche, des études, des évaluations et des statistiques (DREES), on peut estimer qu’en France en 2015, 1 459 000 personnes de plus de 60 ans résidant à domicile étaient en perte d’autonomie, auxquelles s’ajoutent les personnes résidant en établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD), soit 584 000 personnes, soit au total près de 2 millions de personnes. Si l’on considère uniquement les bénéficiaires de l’allocation personnalisée d’autonomie (APA), et de la prestation de compensation du handicap (PCH) ou de l’allocation compensatrice pour tierce personne (ACTP) de plus de 60 ans, on retrouve respectivement 1 265 000 et 74 000 personnes. Selon les différentes définitions, on peut donc approximer que 9 à 14 % des personnes de plus de 60 ans seraient en perte d’autonomie. D’après les projections de la DREES, on peut attendre une augmentation du nombre de personnes âgées en perte d’autonomie de 20 000 par an jusqu’en 2030, puis de 40 000 par an jusqu’en 2040.

Histoire naturelle du processus de dépendance : passer du stade de robustesse à ceux de préfragile, de fragile, puis de dépendant

L’effet du vieillissement sur l’organisme se traduit par une diminution progressive des capacités intrinsèques, conduisant à une baisse des capacités fonctionnelles, variable d’un individu à un autre. Cette baisse des capacités peut conduire à un état de vulnérabilité ou de fragilité.
Le passage des états de robustesse à celui de préfragilité et de fragilité est potentiellement réversible, car accessible à des mesures thérapeutiques centrées sur les déterminants de la fragilité, en particulier la prise en charge des composantes nutritionnelle, psychique, sociale, thérapeutique et le maintien d’une activité physique.
L’absence de prise en charge précoce de la fragilité peut entraîner face à un stress un passage à l’état de dépendance, celui-ci étant, en revanche, le plus souvent irréversible.

Causes de la perte d’autonomie et de la dépendance

Un système de santé qu’il faut adapter au vieillissement de la population en prenant en compte la notion de fonction

Notre système de santé a été créé après la Seconde Guerre mondiale pour traiter les pathologies aiguës de l’adulte jeune. Il n’est plus adapté au vieillissement de la population. À côté d’une médecine centrée sur la recherche et le traitement de pathologies, il faut rajouter l’évaluation, le maintien et la prise en charge des fonctions.

Comorbidités et risque de perte d’autonomie

La présence de pathologies associées au vieillissement est un risque important de perte d’autonomie et de fonction. Ces pathologies sont à l’origine d’une diminution des capacités intrinsèques et fonctionnelles, pouvant faire évoluer les sujets âgés vers un état de fragilité, voire de dépendance : il est donc essentiel de les prendre en charge. À titre d’exemple, on estime que les démences telles que la maladie d’Alzheimer sont à l’origine de 50 % de la dépendance.

La dépendance iatrogène

La dépendance liée à l’hospitalisation est définie par la Haute Autorité de santé (HAS) comme « une perte fonctionnelle aux activités de base de la vie quotidienne entre l’entrée et la sortie d’hospitalisation ». Elle est secondaire à trois causes qui interagissent entre elles :
  • la pathologie entraînant l’hospitalisation (type, sévérité) ;
  • les capacités de base du patient ;
  • les processus de soins : ce sont eux qui, s’ils ne sont pas adaptés aux personnes âgées, vont être source d’une dépendance iatrogène liée à l’hospitalisation (tableau 2).
Quelques rappels épidémiologiques : selon les données de la HAS en 2017 en France, 3 millions de patients âgés de 70 ans et plus sont hospitalisés au moins une fois pour un problème médical aigu chaque année, et les patients âgés représentent 5,4 millions de séjours hospitaliers par an.
L’incidence de la dépendance liée à l’hospitalisation serait estimée entre 30 et 60 %, tandis que l’incidence de la dépendance iatrogène liée à l’hospitalisation serait de 10 %, avec une part évitable estimée à 80 %.
Parmi les principaux facteurs de dépendance iatrogène à l’hôpital, on peut citer :
  • l’absence de mobilisation et de reprise rapide de la marche ;
  • l’absence de stimulation du patient à la réalisation de la toilette, de l’habillage ;
  • la pose inutile de protections et/ou de sondes urinaires, de perfusions ;
  • le maintien à jeun inutile, l’absence de prise en charge nutritionnelle ;
  • le risque de confusion ;
  • l’absence de réévaluation des traitements, en particulier d’antalgiques et de psychotropes.
S’il est essentiel de prendre en charge la pathologie aiguë ayant justifié l’hospitalisation, il l’est aussi de prévenir les risques évitables de dépendance iatrogène en plaçant au centre de cette prise en charge la personne et ses caractéristiques gériatriques. Cette prévention implique une formation des équipes soignantes à la prise en charge spécifique des personnes âgées, et la mise en place de dispositifs d’avis et de recours spécialisés comme les équipes mobiles de gériatrie. Aussi, il faut anticiper dès l’entrée en hospitalisation la mise en place des mesures pouvant permettre un retour à domicile, et consolider le lien ville-hôpital pour permettre ce retour.

La perte des capacités avec l’avancée en âge

Avec l’avancée en âge, les capacités intrinsèques diminuent progressivement (fig. 1), ce qui entraîne une diminution des capacités fonctionnelles. Il ne faut pas confondre la diminution progressive et lente des capacités intrinsèques (physiologique lors du vieillissement) avec les déficiences en lien avec des pathologies d’organes. Les déficiences rendent les sujets âgés plus vulnérables en cas de pathologies aiguës, et cette baisse peut conduire à un état de fragilité, voire, en l’absence d’intervention, à un état de dépendance. Il est donc important de prévenir la perte des capacités intrinsèques qui apparaît tôt dans les stades du vieillissement, et la monitorer au-delà de 70 ans.

Conséquences du déclin fonctionnel et de la perte d’autonomie

Les conséquences du déclin fonctionnel et de la perte d’autonomie peuvent être lourdes :
  • pour les patients : confinement à domicile, isolement social, problématiques familiales et financières, hospitalisations à répétition, maintien au domicile difficile et possibilité d’entrée en institution ;
  • pour les aidants. Qu’ils soient formels (professionnels) ou informels (familiaux : conjoints, enfants, petits-enfants) : risque d’épuisement physique et psychique avec répercussions familiales, professionnelles et financières, risque d’infantilisation et de maltraitance ;
  • pour la société : selon la DREES, le « surcoût » lié à la perte d’auto­nomie des personnes âgées représentait 1,4 % du produit intérieur brut, soit 30 milliards d’euros en 2014 (fig. 2).

Dépister les personnes âgées fragiles, prévention de la perte d’autonomie

Repérer les personnes âgées fragiles et préfragiles, définition de la fragilité, critères de Fried

Le repérage du syndrome de fragilité est une première étape essentielle dans l’évaluation globale de la personne âgée, puisqu’il va permettre de limiter par des interventions spécifiques le risque de perte d’autonomie, de chutes, d’institutionnalisation, de décès et d’hospitalisation répétées.
Il repose sur la recherche de 5 critères, définissant le phénotype de L. Fried :
  • perte de poids involontaire dans la dernière année ;
  • impression subjective de fatigue ;
  • réduction des activités physiques ;
  • diminution de la vitesse de marche ;
  • diminution de la force musculaire (mesurée par « hand grip »).
Une personne âgée peut être considérée comme « robuste » en l’absence de tous ces critères. Elle sera considérée comme « préfragile » en présence de 1 ou 2 critères, et comme « fragile » si 3 critères ou plus sont retrouvés.

Le programme ICOPE de l’OMS

À la suite du rapport mondial sur le vieillissement et la santé, l’OMS a publié récemment les recommandations ICOPE ou « Integrate Care for Older People », fondées sur le modèle du vieillissement en santé, centré sur les capacités intrinsèques et fonctionnelles du sujet âgé, et non sur une approche basée sur les maladies.
L’objectif de ces recommandations est de fournir une communication claire sur le dépistage dès les soins primaires, l’évaluation et la prise en charge de la baisse des capacités intrinsèques, à l’intention du patient, de ses proches, des acteurs sociaux et des professionnels de santé.
Cette prise en charge est fondée sur l’évaluation de cinq domaines en interrelation (cognition, mobilité, nutrition, fonctions sensorielles, psychologie) [fig. 3], tout en favorisant une prise en charge intégrée de la santé prenant en compte les capacités du sujet âgé, les pathologies associées, l’environnement et le mode de vie.
Cinq étapes (ou « steps ») sont détaillées.
Le STEP 1 (tableau 3) s’adresse à toutes les personnes âgées, quel que soit leur degré d’autonomie. Il consiste en l’évaluation des 5 domaines listés ci-dessus réalisable par la personne âgée elle-même, un aidant ou un professionnel de santé. C’est une évaluation simple et rapide (6-7 minutes), qui doit être répétée dans le temps. En l’absence d’altération, des recommandations générales sont délivrées (hygiène de vie, nutrition, activité physique), alors qu’en cas d’altération une évaluation plus poussée est nécessaire en passant au STEP 2.
Le STEP 2 (fig. 4) est l’évaluation approfondie des capacités du sujet âgé, réalisable en soins primaires. Elle prend en compte l’environnement, les besoins sociaux et les pathologies sous-jacentes. Par exemple, en cas d’altération dans le domaine de la mobilité, l’évaluation au STEP 2 comporte la réalisation d’un SPPB (short performance physical battery), la recherche de pathologies sous-jacentes orthopédiques ou rhumatologiques, de sarcopénie, de douleurs, ou d’autres facteurs intrinsèques favorisant le risque de chute, la recherche d’une polymédication, et la recherche de facteurs environnementaux favorisant le risque de chute.
Le STEP 3 correspond à la mise en place d’un plan personnalisé de soins, multidisciplinaire et centré sur le patient en le rendant acteur de sa propre santé. Il doit prendre en compte ses souhaits et ses aspirations, et s’associer à une prise en charge sociale et environnementale.
Le STEP 4 correspond au suivi du plan de soins et à l’orientation vers une prise en charge spécialisée (soins hospitaliers, recours à un gériatre) en cas de situations complexes.
Le STEP 5 est la dernière étape, et correspond au soutien aux aidants, et à l’implication de la communauté.
Une application ICOPE pour smartphone a été lancée en octobre 2019 par l’OMS : elle permet la réalisation simple du STEP 1 et du STEP 2, ainsi qu’un suivi dans le temps de l’évolution des capacités fonctionnelles. À terme, le monitorage des fonctions du sujet âgé pourra se faire via l’application mobile soit en auto-­évaluation, soit par le médecin traitant.

Importance des interventions multi-domaine : exercice physique, nutrition, cognitif, prévention des facteurs de risque vasculaires et métaboliques

La prise en charge du sujet âgé se doit d’être globale, avec des interventions coordonnées :
  • de maintien d’une activité physique, entretien des capacités de marche et de l’équilibre, si nécessaire par le biais de soins de kinésithérapie ;
  • de prise en charge nutritionnelle, avec au minimum la surveillance régulière du poids, un dépistage systématique de la dénutrition et si nécessaire l’intervention avec une prise en charge diététique personnalisée ;
  • de maintien et d’entretien du statut cognitif, par le biais du maintien de l’insertion sociale, l’accès aux moyens de communication et à la culture, un dépistage des altérations des capacités cognitives ;
  • de prévention des facteurs de risque vasculaires et métaboliques.

Un système de santé qu’il faut adapter au vieillissement de la population

Un plan national d’action de prévention a été élaboré par le gouvernement en septembre 2015 et décliné dans la loi relative à l’adaptation de la société au vieillissement. Ce plan s’articule autour de 6 axes d’action :
  • préservation de l’autonomie et prévention primaire : améliorer les grands déterminants de la santé et de l’autonomie (éduquer à la santé, développer une culture de l’autonomie tout au long de la vie) ;
  • prévention secondaire : prévenir les pertes d’autonomie évitables au cours de l’avancée en âge ;
  • prévention tertiaire : éviter l’aggravation des situations déjà caractérisées par une incapacité ;
  • réduire les inégalités sociales et territoriales de santé ;
  • former les professionnels à la prévention de la perte d’autonomie ;
  • développer la recherche et les stratégies d’évaluation.
Plus récemment, le rapport du Plan grand âge, paru en mars 2019 à la suite d'une concertation de grande ampleur et comprenant la participation de plus de 400 000 citoyens, a permis l’élaboration de nombreuses propositions, avec pour objectifs principaux l’inclusion, l’autonomie et l’amélioration de la prise en charge des personnes âgées.

Évaluation de la personne âgée en perte d’autonomie et/ou dépendante

Évaluation gériatrique standardisée

L’évaluation gériatrique standardisée est un processus diag­nostique multidimensionnel et interdisciplinaire du sujet âgé, à destination des médecins, avec comme objectif l’identification systématique des problèmes médicaux et des capacités psycho­sociales et fonctionnelles.
Les différents domaines d’évaluation sont :
  • la nutrition ;
  • les capacités fonctionnelles ;
  • les fonctions cognitives et thymiques ;
  • les troubles sensoriels ;
  • la polymédication ;
  • l’évaluation de l’environnement et des ressources socio-économiques.

Outils d’évaluation du sujet dépendant (v. Focus)

L’évaluation du sujet dépendant est essentielle pour la création d’un plan personnalisé de santé adapté, et permet un suivi de l’efficacité des différents domaines d’intervention et des mesures rééducatives. Elle fait appel à :
  • l’échelle des activités de la vie quotidienne ou ADL (activities of daily living), cotée sur 6 items : continence, alimentation, habillage, déplacement jusqu’aux toilettes, toilette, mobilité ;
  • l’échelle des activités instrumentales de la vie quotidienne ou IADL (instrumental activities of daily living), cotée sur 5 à 8 en fonction de l’applicabilité des critères : utiliser le téléphone, faire les courses, préparer les repas, faire le ménage, s’occuper du linge, utiliser les transports, prendre ses traitements, gérer ses finances.

Grille AGGIR, outil médico-économique

La grille nationale AGGIR (Autonomie, Gérontologie, Groupe Iso-Ressources) permet de mesurer le degré de perte d’autonomie d’une personne âgée de 60 ans et plus demandeuse de l’allocation personnalisée d’autonomie (APA). Elle sert à déterminer si la personne demandeuse de l’APA peut en bénéficier et à quelle hauteur. Les degrés de perte d’autonomie sont classés en 6 groupes dits « iso-ressources » (GIR) : à chacun correspond un niveau de besoins d’aides pour accomplir les actes essentiels de la vie quotidienne.
Une personne âgée peut bénéficier de l’APA pour des GIR 1 à 4 (tableau 4).

Mettre en place un plan d’aide à domicile

Entourage familial

La famille et les aidants non professionnels jouent un rôle essentiel dans la prise en charge de la dépendance au quotidien et doivent toujours être pris en considération et soutenus, en tenant compte des difficultés familiales et financières, et du risque d’épuisement.

Aides professionnelles et services d’aides à la personne

Soins infirmiers : ils permettent la réalisation de soins techniques, de toilettes médicalisées, ainsi que l’administration ou la surveillance de la prise des traitements. Leur mise en place se fait par prescription médicale, on peut avoir recours à des infirmiers libéraux ou à des services de soins infirmiers à domicile (SSIAD, constitués d’aides-soignants et d’infirmiers).
Aides ménagères et auxiliaires de vie : elles assurent l’aide à la réalisation des actes de la vie quotidienne tels que les tâches ménagères, les courses, l’aide à la toilette et à l’habillage. Leur financement peut se faire via les caisses de retraite, les mutuelles, le département et/ou l’APA.
Autres intervenants à domicile : la rééducation à domicile par une orthophoniste peut être demandée, pour le travail de la communication dans le cadre de la démence, ou dans le cadre de troubles de la déglutition. La kinésithérapie peut également avoir un rôle clé dans la prévention de la perte d’autonomie fonctionnelle ou du risque de chute (travail de la marche, de l’équilibre, rééducation, prise en charge antalgique, kinésithérapie respiratoire).
Ergothérapie : l’intervention d’un ergothérapeute à domicile peut se faire dans le cadre des équipes spécialisées Alzheimer (ESA), qui permettent l’adaptation personnalisée du domicile en fonction des besoins de la personne âgée et de ses aidants.
Services, aides matérielles et techniques : des services et des aides techniques ou matérielles peuvent être financés par la Sécurité sociale, l’APA, les mairies ou les conseils départementaux :
  • portage des repas à domicile (souvent proposé par les mairies) ;
  • service de téléassistance, avec un dispositif d’appel (bouton d’appel en bracelet, collier), nouvelles technologies (tablettes, smartphones adaptés) ;
  • adaptation du domicile par la location ou l’achat (sur prescription) de matériel médical (lit médicalisé, matelas anti-escarre, chaises garde-robe, lève-malade, fauteuil de transfert, déambulateur).
Mesures de répit :
  • accueil de jour : ce service s’adresse principalement aux personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer ou de syndromes apparentés, et aux personnes en perte d’autonomie, avec un double objectif : d’un côté, de permettre pour les personnes âgées l’entretien de leurs capacités, un suivi et un accompagnement adaptés, et de l’autre, pour leurs proches, de leur libérer du temps et de leur permettre de s’absenter ponctuellement ;
  • hébergement temporaire : il permet aux personnes âgées vivant à domicile de trouver des solutions d’hébergement de courte durée dans un établissement pour personnes âgées ou chez des accueillants familiaux. De cette manière, les aidants peuvent passer le relais de manière ponctuelle. Il peut aussi être un premier essai avant une entrée définitive en EHPAD.

Prise en charge financière et sociale

L’allocation personnalisée pour l’autonomie (APA) est une allocation destinée aux personnes âgées de 60 ans et plus en perte d’autonomie qui a pour vocation d’aider à payer les dépenses nécessaires pour rester vivre à domicile malgré la perte d’autonomie. Elle est versée par le conseil départemental.
Pour bénéficier de l’APA, il faut :
  • être âgé de 60 ans ou plus ;
  • résider en France de façon stable et régulière ;
  • être en perte d’autonomie, c’est-à-dire avoir un degré de perte d’autonomie évalué comme relevant du GIR 1, 2, 3 ou 4 par une équipe de professionnels du conseil départemental.
Il n’y a pas de conditions de revenu pour bénéficier de l’APA.
La déclaration d’une maladie chronique inscrite sur la liste des affections longue durée (ALD 30) permet une prise en charge à 100 % par la Caisse primaire d’assurance maladie, avec exonération du ticket modérateur.
Afin d’accompagner les patients et leur famille dans leur démarche, il est parfois nécessaire de les orienter vers une assistante sociale.
Il est aussi possible, dans certaines situations sociales complexes, d’avoir recours à la MAIA ou « Méthode d’Action pour l’Intégration des services d’aide et de soin dans le champ de l’Autonomie », qui est une structure ayant pour objectif de favoriser le maintien à domicile, et d’organiser la continuité du parcours de santé, dans des situations difficiles.
La demande d’une mesure de protection juridique auprès du juge des tutelles peut être nécessaire en cas d’altération des facultés d’une personne conduisant à une incapacité à défendre ses propres intérêts.

L’entrée en maison de retraite : savoir l’anticiper et bien la préparer

Décision, choix et objectifs de l’entrée en institution

L’institutionnalisation est une décision qui peut être difficile, à la fois pour les aidants et pour les sujets âgés. En effet, selon le dernier rapport Grand Âge, 80 % des Français considèrent qu’entrer en EHPAD signifie perdre sa liberté de choix. Une réflexion en amont peut permettre d’associer le patient à la décision, par exemple en visitant différents établissements, afin de choisir celui qui correspond le mieux au projet de vie de la personne. Il est essentiel de choisir un établissement adapté aux comorbidités du patient, tout particulièrement dans le cadre de troubles cognitifs avec risque d’évolutivité, ou pour éviter les transferts répétés. Il faut si possible choisir un établissement disposant d’une unité protégée. Il est possible en cas d’indécision, d’épuisement des aidants ou d’attente de place de commencer par un hébergement temporaire.
La prise en charge devra maintenir et préserver les fonctions existantes, s’assurer d’une qualité de vie et du respect des choix de la personne. Elle devra également savoir poser l’indication des soins de fin de vie.

Coût d’une institutionnalisation

Le coût d’une institutionnalisation est loin d’être négligeable. Les prestations de soins sont prises en charge par la Sécurité sociale, tandis que les dépenses liées à la dépendance sont prises en charge environ aux deux tiers par l’APA ; en revanche, les prestations dites d’hébergement restent à la charge des ménages : elles comprennent les frais d’hôtellerie, la restauration et les animations. L’allocation au logement et les réductions d’impôts peuvent permettre de réduire ces charges, selon les revenus. Au total, selon la DRESS (rapport 2016), ce reste à charge atteint un niveau médian de 1 850 €.
Si le reste à charge est trop élevé, il est possible d’avoir recours à l’aide sociale à l’hébergement (via le conseil départemental), mais celle-ci donne lieu à une obligation alimentaire des descendants (pension alimentaire fixée par la commission départementale d’aide sociale en fonction des ressources et des charges) ainsi qu’à une récupération sur succession.
Relecture : Laurent Balardy, Yves Rolland, Fatemeh Nourhashemi, Sandrine Andrieu (université Toulouse-III), Sandrine Sourdet, Bruno Vellas.
Points forts
Autonomie et dépendance chez le sujet âgé

POINTS FORTS À RETENIR

La perte d’autonomie n’est pas une conséquence obligatoire de l’avancée en âge, et ne doit pas être confondue avec le vieillissement normal.

9 à 14 % des personnes âgées de plus de 60 ans peuvent être considérées en perte d’autonomie.

L’absence de prise en charge précoce de la fragilité peut entraîner à la suite d'un stress aigu, un passage vers un état de dépendance, le plus souvent irréversible.

L’incidence de la dépendance iatrogène liée à l’hospitalisation est de l’ordre de 10 %, avec une part évitable estimée à 80 %.

Message auteur

Autonomie et dépendance chez le sujet âgé

Pour l’examen classant national, il est important de ne pas faire l’impasse sur cet item central de gériatrie. En effet, il aborde des notions essentielles à l’exercice de tout médecin, mais il peut aussi facilement être la source de nombreux QCM, et il permet d’apporter de la transversalité en fin de dossier. L’exemple type est celui du dossier qui commence par une fracture de hanche chez un sujet âgé, avec ensuite les complications du décubitus et l’iatrogénie hospitalière, et enfin la mise en place d’un plan d’aide sociale, avec des questions sur les conditions d’attribution de l’APA. Par ailleurs, il est important d’avoir un ordre d’idée de l’épidémiologie de la dépendance, et il semble aussi essentiel de bien connaître certaines échelles de gériatrie, telle que l’ADL, l’IADL, la classification des GIR. Enfin, il est essentiel de bien connaître les cinq critères de la classification de Fried. Exemples de QCM Vrai ou faux ?

Critères de Fried

A. Les critères de Fried ont pour but d’évaluer le statut nutritionnel.

B. Une perte de 5 % du poids du corps en moins d’un an correspond à un critère de Fried.

C. Il existe 6 critères de Fried.

D. À partir de 3 critères de Fried, on peut considérer une personne comme « fragile ».

E. La présence d’un MMSE inférieur à 25 correspond à un critère de Fried.

APA

A. La demande de l’APA est possible à partir de l’âge de 65 ans.

B. Elle permet de financer un passage infirmier quotidien.

C. Elle permet de financer la location d’un lit médicalisé.

D. Elle est attribuée uniquement aux personnes classées GIR 1 à 4.

E. La demande d’APA s’effectue auprès de la Sécurité sociale.

Dépendance iatrogène

A. L’incidence liée à l’hospitalisation est de l’ordre de 30 %.

B. L’incidence liée à l’hospitalisation est de l’ordre de 10 %.

C. Dans le syndrome d’immobilisation on peut retrouver une perte des automatismes posturaux.

D. Lors d’une hospitalisation, l’aide à l’habillage doit être systématique.

E. La prévention d’une constipation par laxatif en cas d’utilisation d’antalgiques opioïdes doit être systématique chez le sujet âgé.

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