Une étude américaine a évalué, pour la première fois, les troubles à long terme liés à la prise de benzodiazépines, persistant même plusieurs mois après l’arrêt du traitement. Des données importantes à connaître, alors que la France en est le deuxième plus grand consommateur en Europe…

Les symptômes liés au sevrage des benzodiazépines (BZD) sont connus, mais ceux persistant à long terme même après l’arrêt du traitement ont été peu étudiés. Pour combler cette lacune, des chercheurs américains ont mené une enquête en ligne chez plus de 1 000 patients prenant ou ayant pris des BZD (136 en prenaient encore, 294 étaient en période de sevrage et 763 les avaient complètement arrêtées).

L’enquête portait sur 23 symptômes, notamment anxiété (88,1 % des répondants), troubles du sommeil (86,9 %), manque d’énergie (86,2 %), difficultés pour se concentrer (85,3 %). Une grande partie des répondants ont rapporté que ces symptômes survenaient après l’arrêt complet des BZD et persistaient à long terme : ainsi, parmi toutes les réponses positives sur l’existence de symptômes, dans 76,6 % des cas il s’agissait de symptômes perdurant des mois, voire une année entière ou plus. Plus de la moitié des personnes ayant rapporté un manque d’énergie, des difficultés pour se concentrer, une perte de mémoire, de l’anxiété ou la nervosité, entre autres, ont déclaré que ces symptômes duraient depuis un an ou plus.

De plus, un retentissement négatif sur la qualité de vie, corrélé avec ces symptômes persistants, a souvent été décrit. Plus de la moitié des participants rapportaient en effet des conséquences significatives sur les relations, et des idéations suicidaires voire des tentatives de suicide ; près de la moitié déclaraient également avoir perdu leur emploi.

Par ailleurs, ces symptômes étaient souvent d’apparition nouvelle, c’est-à-dire qu’ils ne correspondaient pas à ceux pour lesquels les BZD avaient été prescrites en premier lieu. Ainsi, plus de la moitié des répondants ayant décrit une anxiété ou une insomnie après le sevrage avaient pris des BDZ pour une raison autre que l’anxiété ou l’insomnie. Il ne s’agissait donc pas d’un « simple » retour des symptômes après l’arrêt du traitement.

Or, soulignent les auteurs, l’absence de nomenclature pour désigner la persistance de ces symptômes, indépendamment du sevrage, entrave à la fois son identification clinique et la prise en compte de ce risque au moment d’instaurer le traitement et d’en discuter avec les patients. C’est pourquoi le terme de « dysfonctionnement neurologique induit par les benzodiazépines » (benzodiazepine-induced neurological dysfunction, BIND) a été proposé.

Ils signalent toutefois que le BIND ne concerne pas tous les patients prenant des BZD, et que les facteurs de risque prédisposant à un BIND, ainsi que la pathogenèse de ce dernier, doivent encore être élucidés. Enfin, une limite importante de l’étude est qu’il s’agissait d’une enquête sur la base du volontariat et sans groupe contrôle.

Pour en savoir plus
Ritvo AD, Foster DE, Huff C, et al. Long-term consequences of benzodiazepine-induced neurological dysfunction: A survey. Plos one 29 juin 2023.