L’hypertension artérielle (HTA) constitue le premier facteur de risque cardiovasculaire modifiable. En 2015, 1,13 milliard de personnes étaient hypertendues dans le monde, dont 15 millions en France, soit 1 adulte sur 3. Pourtant, ce facteur de risque est sous-diagnostiqué : en France, 1 patient sur 2 ne se sait pas hypertendu selon les registres Monica. Pire, le contrôle tensionnel n’est obtenu que chez la moitié des hypertendus connus. Ceci n’est pas acceptable au vu des multiples possibilités thérapeutiques et des risques d’une HTA non contrôlée. Malheureusement, ces chiffres ne sont pas meilleurs ces dernières années. Chez les femmes, ils se sont même aggravés.
Afin d’optimiser la prise en charge globale des patients hypertendus, il est donc nécessaire d’améliorer le dépistage de l’HTA et son traitement.
Le dépistage repose sur la mesure de la pression artérielle (PA) par le médecin traitant. En cas de chiffres élevés, une confirmation par automesure ou mesure ambulatoire est impérative pour éliminer un effet « blouse blanche » et éviter un traitement inutile.
Lorsque le diagnostic d’HTA est posé, le rappel des règles hygiéno-diététiques est indispensable mais ne doit plus faire retarder l’introduction d’un traitement.
La Société européenne d’hypertension recommande actuellement de débuter une bithérapie antihypertensive d’emblée chez la grande majorité des patients, si possible combinée.1 Cette stratégie n’est pas encore officiellement validée par la Société française d’hypertension artérielle.
Afin d’optimiser la prise en charge globale des patients hypertendus, il est donc nécessaire d’améliorer le dépistage de l’HTA et son traitement.
Le dépistage repose sur la mesure de la pression artérielle (PA) par le médecin traitant. En cas de chiffres élevés, une confirmation par automesure ou mesure ambulatoire est impérative pour éliminer un effet « blouse blanche » et éviter un traitement inutile.
Lorsque le diagnostic d’HTA est posé, le rappel des règles hygiéno-diététiques est indispensable mais ne doit plus faire retarder l’introduction d’un traitement.
La Société européenne d’hypertension recommande actuellement de débuter une bithérapie antihypertensive d’emblée chez la grande majorité des patients, si possible combinée.1 Cette stratégie n’est pas encore officiellement validée par la Société française d’hypertension artérielle.
Monothérapie initiale : à oublier ?
Insuffisamment efficace
L’HTA primaire (anciennement appelée « HTA essentielle ») fait intervenir plusieurs mécanismes interdépendants : rétention hydrosodée, augmentation des résistances vasculaires, activation du système rénine-angiotensine-aldostérone (SRAA)... Chaque classe médicamenteuse a une action privilégiée sur l’un de ces mécanismes, conduisant fréquemment à l’hyperactivation compensatrice d’un autre (par exemple, l’ajout d’un diurétique induit une activation du SRAA via une augmentation de la rénine). Cela peut conduire à un échappement thérapeutique : l’efficacité antihypertensive d’une molécule diminue du fait de la contre-régulation. L’utilisation de molécules complémentaires et synergiques permet d’éviter ce phénomène en agissant à différents niveaux de régulation.
Par ailleurs, dans certaines HTA secondaires, ou avec un mécanisme particulier, certaines classes médicamenteuses sont plus efficaces que d’autres (certains patients sont par exemple plus sensibles aux diurétiques). En prescrivant d’emblée une bithérapie, on augmente les chances de prescrire au moins une molécule efficace.
Enfin, l’HTA se définissant par une PA systolique (PAS) > 140 mmHg, on vise une baisse de plus de 10 mmHg pour atteindre l’objectif de PAS < 130 mmHg. Or cette diminution est difficile à atteindre avec une monothérapie.
Au total, la prescription d’une bithérapie d’emblée est associée à une plus grande efficacité antihypertensive.2
Par ailleurs, dans certaines HTA secondaires, ou avec un mécanisme particulier, certaines classes médicamenteuses sont plus efficaces que d’autres (certains patients sont par exemple plus sensibles aux diurétiques). En prescrivant d’emblée une bithérapie, on augmente les chances de prescrire au moins une molécule efficace.
Enfin, l’HTA se définissant par une PA systolique (PAS) > 140 mmHg, on vise une baisse de plus de 10 mmHg pour atteindre l’objectif de PAS < 130 mmHg. Or cette diminution est difficile à atteindre avec une monothérapie.
Au total, la prescription d’une bithérapie d’emblée est associée à une plus grande efficacité antihypertensive.2
Inconvénients du traitement séquentiel
Pendant de nombreuses années, l’approche incrémentale a été privilégiée : initiation d’une monothérapie, puis ajout séquentiel d’autres molécules, jusqu’à obtenir un contrôle tensionnel adéquat. Cette approche nécessite un suivi très rapproché des patients, qu’il est difficile d’assurer, compte tenu de la fréquence de cette pathologie.
De plus, l’ajout successif de molécules peut être perçu par le patient comme un échec à chaque étape ou comme une aggravation de son état.
Par ailleurs, la nécessité d’ajouter une molécule ou un comprimé alors que l’objectif tensionnel est « presque atteint » peut être un frein pour le médecin et contribuer à une inertie thérapeutique, l’une des grandes responsables du mauvais contrôle de l’HTA.
Le temps passé à obtenir le contrôle tensionnel est un élément majeur de la prise en charge ; quand il s’allonge, il est associé à un risque cardiovasculaire aggravé.3
Enfin, lorsque la PAS est > 150 mmHg, il semble très peu probable d’obtenir une baisse de plus de 20 mmHg avec une seule molécule.
De plus, l’ajout successif de molécules peut être perçu par le patient comme un échec à chaque étape ou comme une aggravation de son état.
Par ailleurs, la nécessité d’ajouter une molécule ou un comprimé alors que l’objectif tensionnel est « presque atteint » peut être un frein pour le médecin et contribuer à une inertie thérapeutique, l’une des grandes responsables du mauvais contrôle de l’HTA.
Le temps passé à obtenir le contrôle tensionnel est un élément majeur de la prise en charge ; quand il s’allonge, il est associé à un risque cardiovasculaire aggravé.3
Enfin, lorsque la PAS est > 150 mmHg, il semble très peu probable d’obtenir une baisse de plus de 20 mmHg avec une seule molécule.
Bithérapie d’emblée
Une option sûre ?
L’utilisation de bithérapies médicamenteuses pour leurs effets synergiques est déjà fréquente dans de nombreuses spécialités (amoxicilline-acide clavulanique, budésonide-formotérol, pilules œstroprogestatives…).
La prescription d’une monothérapie antihypertensive permet en moyenne une baisse de PA de 7 à 10 mmHg ; le recours à la bithérapie permet une diminution de 15 à 20 mmHg.4
De plus, il a été montré que la prescription d’emblée d’une bithérapie est bien tolérée, avec un risque faible d’hypotension orthostatique, même chez les patients avec une HTA de grade 1 (PAS entre 140 et 160 mmHg et PA diastolique [PAD] entre 90 et 100 mmHg).4
La prescription d’une monothérapie antihypertensive permet en moyenne une baisse de PA de 7 à 10 mmHg ; le recours à la bithérapie permet une diminution de 15 à 20 mmHg.4
De plus, il a été montré que la prescription d’emblée d’une bithérapie est bien tolérée, avec un risque faible d’hypotension orthostatique, même chez les patients avec une HTA de grade 1 (PAS entre 140 et 160 mmHg et PA diastolique [PAD] entre 90 et 100 mmHg).4
Avantages
La bithérapie en première ligne est associée à une diminution du risque d’arrêt du traitement antihypertenseur.5 En effet, il existe un large choix de bithérapies combinées permettant la prise du traitement en un seul comprimé par jour. Il faut cependant savoir que les bithérapies combinées n’ont à l’heure actuelle pas d’autorisation de mise sur le marché (AMM) en France en initiation d’un traitement antihypertenseur.
La bithérapie initiale permet souvent une moindre incidence des effets indésirables dépendants de la classe, puisque les doses utilisées sont comparativement plus faibles.
Enfin, elle permet en général d’obtenir plus rapidement le contrôle tensionnel, ce qui est bénéfique pour le patient et représente un gain de temps pour le médecin.
La bithérapie initiale permet souvent une moindre incidence des effets indésirables dépendants de la classe, puisque les doses utilisées sont comparativement plus faibles.
Enfin, elle permet en général d’obtenir plus rapidement le contrôle tensionnel, ce qui est bénéfique pour le patient et représente un gain de temps pour le médecin.
Quelle bithérapie choisir ?
La bithérapie est généralement initiée par deux molécules à demi-dose. On conseille des associations à demi-vie longue qui permettent ensuite de doubler la dose facilement.
L’association d’un bloqueur du SRAA (inhibiteur de l’enzyme de conversion [IEC] ou antagoniste des récepteurs de l’angiotensine II [ARA II]) avec un diurétique ou un inhibiteur calcique est privilégiée (tableau ).
Dès l’initiation, le patient est informé qu’un contrôle tensionnel doit être effectué à un mois avec une automesure (et associé à un dosage de la kaliémie et de la créatininémie). Si l’objectif n’est pas atteint, la posologie de la bithérapie initiale peut être doublée pour parvenir à la dose maximale, ou une troisième molécule peut être ajoutée.
En cas d’hypotension ou d’HTA « trop bien contrôlée » (rarement grave), il faut alors diminuer le traitement à une unique molécule.
Il est important d’accompagner le patient par des messages positifs, encourageant l’observance et soulignant l’efficacité du traitement.
En bref, une bithérapie d’emblée peut être proposée à la grande majorité des patients avec une HTA de grade 1 ou 2 (PAS entre 140 et 180 mmHg et/ou PAD entre 90 et 110 mmHg) [figure ].
L’association d’un bloqueur du SRAA (inhibiteur de l’enzyme de conversion [IEC] ou antagoniste des récepteurs de l’angiotensine II [ARA II]) avec un diurétique ou un inhibiteur calcique est privilégiée (
Dès l’initiation, le patient est informé qu’un contrôle tensionnel doit être effectué à un mois avec une automesure (et associé à un dosage de la kaliémie et de la créatininémie). Si l’objectif n’est pas atteint, la posologie de la bithérapie initiale peut être doublée pour parvenir à la dose maximale, ou une troisième molécule peut être ajoutée.
En cas d’hypotension ou d’HTA « trop bien contrôlée » (rarement grave), il faut alors diminuer le traitement à une unique molécule.
Il est important d’accompagner le patient par des messages positifs, encourageant l’observance et soulignant l’efficacité du traitement.
En bref, une bithérapie d’emblée peut être proposée à la grande majorité des patients avec une HTA de grade 1 ou 2 (PAS entre 140 et 180 mmHg et/ou PAD entre 90 et 110 mmHg) [
Quelques exceptions
Dans certains cas, il peut rester souhaitable de débuter par une monothérapie (figure ). Il en est ainsi :
– pour les patients avec une HTA de grade 1, une PAS < 150 mmHg et un faible risque cardiovasculaire ;
– lorsque la PA est à la limite haute (PAS entre 130 et 140 mmHg et/ou PAD entre 80 et 90 mmHg) et associée à un haut risque cardiovasculaire ;
– pour les personnes de plus de 80 ans et fragiles chez qui la sensibilité du baroréflexe est souvent diminuée et le risque d’hypotension orthostatique majoré.
– pour les patients avec une HTA de grade 1, une PAS < 150 mmHg et un faible risque cardiovasculaire ;
– lorsque la PA est à la limite haute (PAS entre 130 et 140 mmHg et/ou PAD entre 80 et 90 mmHg) et associée à un haut risque cardiovasculaire ;
– pour les personnes de plus de 80 ans et fragiles chez qui la sensibilité du baroréflexe est souvent diminuée et le risque d’hypotension orthostatique majoré.
Références
1. Williams B, Mancia G, Spiering W, et al. 2018 ESC/ESH Guidelines for the management of arterial hypertension: The Task Force for the management of arterial hypertension of the European Society of Cardiology (ESC) and the European Society of Hypertension (ESH). Eur Heart J 2018;39(33):3021-104.
2. MacDonald TM, Williams B, Webb DJ, et al. Combination Therapy Is Superior to Sequential Monotherapy for the Initial Treatment of Hypertension: A Double-Blind Randomized Controlled Trial. J Am Heart Assoc 2017;6(11):e006986.
3. Xu W, Goldberg SI, Shubina M, et al. Optimal systolic blood pressure target, time to intensification, and time to follow-up in treatment of hypertension: population based retrospective cohort study. BMJ 2015;350:h158.
4. Wald DS, Law M, Morris JK, et al. Combination Therapy Versus Monotherapy in Reducing Blood Pressure: Meta-analysis on 11,000 Participants from 42 Trials. Am J Med 2009;122(3):290-300.
5. Corrao G, Parodi A, Zambon A, et al. Reduced discontinuation of antihypertensive treatment by two-drug combination as first step. Evidence from daily life practice. J Hypertens 2010;28(7):1584-90.
2. MacDonald TM, Williams B, Webb DJ, et al. Combination Therapy Is Superior to Sequential Monotherapy for the Initial Treatment of Hypertension: A Double-Blind Randomized Controlled Trial. J Am Heart Assoc 2017;6(11):e006986.
3. Xu W, Goldberg SI, Shubina M, et al. Optimal systolic blood pressure target, time to intensification, and time to follow-up in treatment of hypertension: population based retrospective cohort study. BMJ 2015;350:h158.
4. Wald DS, Law M, Morris JK, et al. Combination Therapy Versus Monotherapy in Reducing Blood Pressure: Meta-analysis on 11,000 Participants from 42 Trials. Am J Med 2009;122(3):290-300.
5. Corrao G, Parodi A, Zambon A, et al. Reduced discontinuation of antihypertensive treatment by two-drug combination as first step. Evidence from daily life practice. J Hypertens 2010;28(7):1584-90.