Certains facteurs de risque sociodémographiques (sexe féminin, présence d’enfants) et liés aux conditions de travail (surcharge de travail, temps insuffisant avec les patients, désorganisation du travail…) sont connus.
En France, par exemple, un tiers des médecins généralistes déclaraient, en 2022, avoir au moins un symptôme de burn out , selon une enquête de l’organisation britannique The Health Foundation, et ces taux étaient corrélés à des perceptions très défavorables exprimées par les médecins sur la qualité des soins. Ainsi, près de 40 % des médecins français pensaient que la qualité des soins qu’ils étaient en mesure de prodiguer avait empiré depuis la pandémie, et ils étaient jusqu’à 76 % à penser que la qualité des soins en général – prenant en compte tout le système de santé – s’était détériorée.
Cependant, les facteurs psychologiques, individuels et interpersonnels sont moins bien étudiés. C’était l’objectif de cette enquête belge, dont les résultats viennent d’être publiés dans le BJGP .
Un échantillon de 301 médecins généralistes (73 % de femmes ; pratiquant depuis en moyenne 17 ans) a été interrogé, en 2023, de façon anonyme au moyen d’un questionnaire. Ce dernier permettait d’évaluer, par autodéclaration, le niveau d’épuisement professionnel, les caractéristiques psychosociales et de l’environnement de travail et les « compétences émotionnelles » (c’est-à-dire la capacité d’identifier, comprendre et réguler ses émotions). Le but était d’identifier des facteurs qui, contrairement aux facteurs sociodémographiques, pourraient être modifiés, pour mieux prévenir le burn out en médecine générale.
L’exercice en groupe pluripro serait protecteur
Près de la moitié des répondants (45 %) exerçaient en solo, 26 % dans un groupe monodisciplinaire et 29 % dans un groupe pluriprofessionnel ; 36 % exerçaient dans des communes de plus de 30 000 habitants, 19 % dans des communes de 20 000 à 30 000 habitants, 33 % dans des communes de 10 000 à 20 000 habitants et 12 % dans des communes de moins de 10 000 habitants.
Dans cette étude transversale, les MG ont rapporté des niveaux moyens d’épuisement professionnel et de désengagement au travail (les deux composantes du burn out). L’analyse statistique visait à identifier les facteurs ayant le plus de poids dans leur survenue. Ainsi :
- les variables qui prédisaient le plus la survenue d’un épuisement étaient : le sexe féminin, une exigence émotionnelle perçue comme très importante, ainsi qu’un faible niveau d’autocompassion et de « compétences émotionnelles » ;
- les praticiens installés depuis moins longtemps et rapportant avoir peu d’opportunités de développement professionnel étaient les plus vulnérables au désengagement ;
- globalement, les variables les plus associées aux deux composantes du burn out réunies étaient : la perception d’un travail de faible qualité et d’un manque de sens du travail, des rôles peu clairs et un conflit entre la vie professionnelle et la vie personnelle.
Au contraire, l’exercice en groupe pluriprofessionnel a été identifié comme un facteur protecteur, car associé lui-même à un moindre niveau de conflit entre vie professionnelle et personnelle et un moindre besoin de cacher ses émotions.
D’après les auteurs, ces facteurs expliquaient une grande partie des variations dans les niveaux d’épuisement et de désengagement : jusqu’à 69 % et 63 % respectivement.
Ces résultats convergent avec ceux d’études antérieures montrant l’influence, dans la survenue de burn out chez les MG, de hautes exigences émotionnelles, du sexe féminin et du mauvais équilibre entre vie professionnelle et personnelle. Mais ils étendent aussi aux MG des résultats issus des travaux sur le burn out d’autres professionnels de santé, en particulier les effets protecteurs du sens perçu du travail, des compétences émotionnelles et de l’autocompassion.