La recherche de biomarqueurs permettant d’affiner le dépistage individuel du cancer de la prostate est un enjeu majeur, car le dosage du PSA (prostate specific antigen), peu spécifique, ne permet pas à lui seul de différencier les tumeurs agressives – qui requièrent un traitement – des tumeurs indolentes – pour lesquelles une surveillance simple est préconisée.
Actuellement, c’est l’IRM de la prostate qui permet de mesurer la probabilité d’avoir un cancer agressif ; couplée à des algorithmes décisionnels intégrant d’autres critères – PSA, antécédents familiaux… –, elle permet de guider l’indication éventuelle d’une biopsie (v. vidéo ci-dessus). Mais des tests de réalisation plus simple sont à l’étude, comme des tests sanguins cherchant des marqueurs épigénétiques ou des protéines associées à la progression tumorale…
Un nouveau test multiplex urinaire avec 18 marqueurs génétiques surexprimés par les cancers de haut grade pourrait-il répondre à ce besoin ?
Meilleures sensibilité et spécificité pour les cancers de haut grade que les tests existants
Une liste de 54 biomarqueurs a d’abord été établie grâce aux données de séquençage de l’ARN provenant de 775 échantillons (220 prostates bénignes, 71 cancers de grade 1 et de 484 cancers de grade 2 ou plus), issus du Cancer Genome Atlas, du portail Genotype-Tissue Expression et de l’Université du Michigan (États-Unis).
Cette liste a été ensuite affinée sur une cohorte composée de 761 hommes ayant une élévation du taux de PSA (âge médian : 63 ans ; taux médian de PSA : 5,6 ng/mL), sur lesquels des échantillons d’urine ont été prélevés avant biopsie, entre 2008 et 2020. Cela a abouti à un panel plus réduit de 18 gènes associés plus spécifiquement aux cancers de haut grade (≥ 2) et, finalement, à deux tests : MyProstateScore 2.0 (MPS2), incluant ce panel et des variables cliniques et paracliniques (âge, ethnie, antécédents familiaux, taux de PSA…), et MyProstateScore 2.0 Plus (MPS2 +) incluant, en plus, le volume de la prostate.
Ces deux tests ont été validés sur une cohorte prospective multicentrique comprenant 743 hommes (âge médian : 62 ans ; taux médian de PSA : 5,6 ng/mL), dont 151, soit 20 %, avaient un cancer de la prostate de haut grade.
Les valeurs médianes des tests MPS2 et MSP+ étaient significativement plus élevées chez les participants ayant un cancer de grade ≥ 2 (respectivement 0,44 et 0,54) que chez ceux ayant des cancers de grade 1 (0,20 et 0,25) ou des biopsies négatives (0,08). Ces tests montraient de meilleures performances comparées à d’autres marqueurs ou scores existants : en effet, les aires sous la courbe renseignant à la fois sur la spécificité et la sensibilité dans la détection de cancer de haut grade étaient de 0,81 et 0,82 respectivement pour le MSP2 et le MSP2 +, contre 0,60 pour le PSA seul, 0,66 pour le Prostate Cancer Prevention Trial risk calculator, 0,77 pour le Prostate Health Index ou encore 0,74 pour le MPS classique.
Les chercheurs ont estimé les conséquences cliniques de l’utilisation de ces biomarqueurs avant la réalisation d’une biopsie. Ils ont conclu que, à un seuil de sensibilité de 95 %, les deux tests MSP2 auraient permis d’éviter une proportion significative de biopsies non nécessaires (37 % avec le MPS2 et 41 % avec le MPS2 +, contre un cinquième à un quart avec d’autres marqueurs évalués). De plus, les chercheurs ont estimé que les tests MPS2 et MPS2 + avaient des valeurs prédictives négatives de 95 % et 99 % respectivement pour les cancers de grade ≥ 2 et de 99 % pour ceux de grade ≥ 3. Cela veut dire que l’utilisation des MPS2 pourrait éviter des biopsies inutiles tout en préservant la détection de 95 % des cancers de grade ≥ 2 qui auraient été diagnostiqués en utilisant une approche de biopsies généralisées.
Pour les auteurs, ces résultats sont en faveur de l’utilisation des tests MPS2 pour atténuer les inconvénients potentiels du dépistage (surdiagnostic, surtraitement) tout en préservant ses avantages à long terme.
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Badoudjian M. Dosage du PSA : pour qui ? Rev Prat Med Gen 2024;38(1086);165-6.
Mallordy F, Nobile C. Prostate : vers une surveillance active pour tous les cancers localisés ? Rev Prat (en ligne) 12 avril 2023.
Barbat V. Dépistage du cancer de la prostate : guide de survie pour le MG. Rev Prat (en ligne) 1er décembre 2021.