Le cancer du foie est le 4e le plus mortel chez l’homme et le 7e chez la femme. Plus de deux tiers des cas pourraient être prévenus grâce au repérage des patients à risque et à leur suivi. L’Institut national du cancer (INCa) vient de publier un référentiel de bonnes pratiques pour faciliter l’identification, en médecine générale, de ces patients.
En France, plus de 10 000 nouveaux cas de cancer du foie ont été diagnostiqués en 2018 ; cette même année, cette maladie a été responsable de 8 697 décès. Il s’agit du 4e cancer le plus létal chez les hommes et du 7e chez les femmes, avec une incidence en hausse chez ces dernières (+ 2,7 % par an depuis 2010), alors qu’elle reste globalement stable chez les premiers (+ 0,4 % par an depuis 2010).
La survie à 5 ans des patients atteints de cancer du foie est seulement de 18 %, mais elle augmente à 50 % pour ceux éligibles à la résection ou à l’ablation hépatique.
Les carcinomes hépatocellulaires (CHC), qui représentent 90 % des cancers du foie, se développent dans 90 % des cas sur un foie cirrhotique ; une faible proportion, sur des foies au stade précirrhotique (hépatites B et C notamment). En outre, la présence d’une NAFLD (« non-alcoholic fatty liver disease » ou stéatose hépatique) peut conduire à l’apparition d’un CHC sur foie non cirrhotique dans 25 % à 50 % des cas. Les CHC sur foie sain ne représentent qu’une proportion extrêmement faible de ces cancers.
Le rôle du médecin généraliste dans l’identification des patients atteints d’une cirrhose, souvent asymptomatique, est donc essentiel pour prévenir sa progression et assurer un suivi adapté, dans le but de réduire les risques d’évolution vers un cancer du foie. On estime que plus de deux tiers des cas pourraient être ainsi prévenus.
Repérage et exploration
Un patient, même asymptomatique, peut être à risque de cirrhose dans les situations suivantes :
- consommation excessive d’alcool et/ou tabagisme ;
- suspicion de stéatose hépatique : en cas de syndrome métabolique (tableau 1) et/ou stéatose à l’échographie et/ou cytolyse ;
- infection chronique par les virus de l’hépatite B ou C (tableau 2).
Une évaluation du risque de fibrose s’impose alors – à répéter chaque année –, suivi le cas échéant d’une échographie abdominale. Le calcul du score FIB-4 (fig. 1) permet une première appréciation de ce risque à partir de l’âge et des éléments du bilan sanguin (ASAT, ALAT et plaquettes : tableau 3) : un résultat < 1,30 écarte un risque de fibrose avancée ; un résultat > 2,67 évoque un très haut risque de fibrose avancée, mais il doit être confirmé par une mesure d’élasticité hépatique.
En cas de très haut risque : orienter vers un hépato-gastroentérologue avec les résultats du bilan sanguin et de l’échographie abdominale. Les patients ayant une infection chronique par le VHB ou VHC doivent également être adressés à un hépato-gastroentérologue avec les résultats du bilan sanguin.
Enfin, tout patient ayant au moins l’un de ces facteurs de risque doit être, bien entendu, pris en charge pour réduire le risque de développement ou d’évolution de la fibrose.
Suivi d’un patient cirrhotique
Les patients atteints de cirrhose ont un risque annuel compris entre 1 % et 5 % de développer un cancer du foie. Les personnes ayant au moins un signe de cirrhose constituée doivent donc être adressées au spécialiste avec les résultats de l’échographie abdominale et du bilan sanguin :
- À l’examen clinique :
– foie dur à la palpation ;
– angiomes stellaires ;
– splénomégalie.
- Sur le bilan biologique :
– thrombopénie ;
– diminution du temps de Quick.
- À l’imagerie :
– foie à contour bosselé ;
– dysmorphie du foie ;
– signes d’hypertension portale.
Le suivi conjoint (médecin généralise et hépatologue) des patients atteints de cirrhose doit comprendre :
- une échographie abdominale tous les 6 mois ;
- une consultation chez l’hépatologue une fois par ana minima.
Outre la prise en charge spécifique de la (ou les) cause(s) de la cirrhose, le suivi complet d’une cirrhose non compliquée comprend plusieurs examens à réaliser tous les 6 mois ou tous les ans (tableau 4) : le généraliste coordonne ce parcours de soins et synthétise les éléments issus de la prise en charge par les différents intervenants du parcours de soins.
N.B. : la surveillance des malades atteints de cirrhose non compliquée et la prévention primaire des complications ont fait l’objet d’une recommandation de bonne pratique par la HAS en 2007.
INCa. Cancer du foie. Repérage et suivi des patients à risque en médecine générale. Avril 2022.