Aux hôpitaux Saint-Louis et Robert-Debré (AP-HP, Paris), 300 patients adultes et enfants ayant un lymphome, une leucémie aiguë ou un myélome réfractaire ont bénéficié d’un traitement par CAR-T cells, avec des résultats encourageants récemment dévoilés. En quoi consiste cette approche thérapeutique révolutionnaire ?

 

Le traitement par les cellules « CAR-T » (Chimeric Antigen Receptor T-cellsest une immunothérapie fondée sur le recours aux propres cellules immunitaires du patient (spécifiquement les cellules T) génétiquement modifiées pour détruire les cellules tumorales. Ces cellules T sont d’abord recueillies dans le sang du patient grâce à la technique d’aphérèse. Ensuite, le gène d’un récepteur spécial appelé récepteur d’antigène chimérique (CAR) y est inséré en laboratoire. Ces cellules sont alors cultivées en laboratoire, puis administrées au patient par perfusion. Elles sont ainsi capables de se lier à un antigène présent sur les cellules cancéreuses et de les tuer.

Ce traitement s’adresse pour l’instant exclusivement aux patients dont la maladie est réfractaire aux traitements habituels ou en rechute après des traitements intensifs. Il constitue une véritable innovation pour le traitement des cancers du sang, notamment les lymphomes B agressifs (lymphome diffus à grandes cellules B) et les leucémies aiguëslymphoblastiques. Des essais cliniques sont en cours pour évaluer son intérêt dans des phases moins avancées la maladie.

Récemment, l’AP-HP a annoncé les résultats de ces thérapies sur 300 patients qui en ont bénéficié au sein des hôpitaux Saint-Louis et Robert-Debré : 200 adultes ayant un lymphome et 100 enfants, adolescents et jeunes adultes ayant une leucémie aiguë ou un myélome réfractaire. Avec le traitement par CAR-T cells, le taux de rémission complète des sujets atteints d’un lymphome diffus à grandes cellules B réfractaire 15 mois après le traitement est de 40 %, contre un taux variant de 5 à 10 % avec une chimiothérapie conventionnelle. Pour les enfants ou jeunes adultes (jusqu’à 25 ans) avec une leucémie aiguë lymphoblastique réfractaire au traitement, le taux de rémission à 3 mois est de 83 % contre 15 % avec un traitement classique ; la survie globale à 3 ans est supérieure à 50 %.

Ces patients ont été pris en charge depuis 2016 dans le service d’hémato-oncologie du Pr Catherine Thieblemont (pour les lymphomes) et dans l’unité d’hématologie pour adolescents et jeunes adultes du Pr Nicolas Boissel (pour les leucémies) de l’hôpital Saint-Louis (AP-HP, université de Paris) ; ceux de moins de 18 ans sont pris en charge dans le service d’hémato-immunologie du Pr André Baruchel de l’hôpital Robert-Debré (AP-HP, université de Paris). Ces hôpitaux, qui ont été parmi les premiers en Europe à disposer des CAR-T cells et à proposer cette approche thérapeutique, ont ainsi participé au premier essai multicentrique mondial, dont les résultats ont été publiés dans le New England Journal of Medicine, et sont impliqués dans plusieurs autres essais afin de poursuivre l’évaluation de ce traitement dans les lymphomes, les leucémies aiguës lymphoblastiques et les myélomes. Les résultats de ces études paraîtront prochainement dans Nature et le NEJM et seront présentées au congrès de l’American Society of Hematology courant décembre 2021. Des résultats préliminaires ont aussi été présentés à l’American Society of Clinical Oncology en juin dernier.

À noter que la réalisation de ce traitement nécessite une organisation comprenant de nombreux spécialistes chargés, d’une part, de recueillir et conditionner les cellules (cryopréservation, réinjection…) et, d’autre part, d’assurer la surveillance des effets secondaires dont la survenue nécessite un transfert en réanimation dans 20 à 30 % des cas.

Pour en savoir plus :

Fondation de l’AP-HP. Innovation thérapeutique et cancer à l’AP-HP : les hôpitaux Saint-Louis et Robert Debré ont traité par CAR-T cells 200 patients adultes présentant un lymphome et 100 patients enfants, adolescents et jeunes adultes avec une leucémie aiguë. 2 décembre 2021.