Les céphalées de l’enfant et de l’ado sont fréquentes et le plus souvent bénignes, mais elles imposent une imagerie cérébrale et/ou un avis spécialisé dans des cas bien précis. La HAS précise les indications de l’imagerie et ses modalités (type d’examen, délai…) selon les différentes situations, s’appuyant sur des outils pratiques et un arbre décisionnel avec la conduite à tenir.

Dans la très grande majorité des cas, il s’agit de céphalées primaires (migraine et/ou céphalée de tension) ou secondaires à un épisode fébrile bénin (infection virale, rhinosinusite aiguë). Il faut quand même savoir que la fréquence de la migraine est sous-estimée chez l’enfant. Les céphalées secondaires à une tumeur cérébrale, une hypertension intracrânienne (HTIC), une infection intracrânienne (méningite, méningoencéphalite, abcès cérébral, empyème) ou à un AVC sont rares et sont presque toujours associées à au moins une anomalie clinique, notamment neurologique. Les causes de céphalées sont indiquées dans le tableau 1.

Quand prescrire une imagerie cérébrale ?

Un arbre décisionnel (figure) avec la conduite à tenir pour les médecins généralistes est téléchargeable ici : « Céphalées de l’enfant et l’adolescent : indication de l’imagerie cérébrale ».

Un interrogatoire, un examen physique et neurologique rigoureux sont indispensables pour distinguer une céphalée primaire d’une secondaire (étapes précisées dans l’encadré).

Le diagnostic d’une céphalée primaire et de migraine est clinique et ne nécessite pas d’imagerie cérébrale (critères diagnostiques dans le tableau 2). Pour rappel, la migraine de l’enfant a quelques spécificités par rapport à celle de l’adulte : la durée des crises est souvent plus courte ; la céphalée est bilatérale, fronto-temporale (la douleur s’unilatéralise à l’adolescence) ; elle est parfois sévère (les enfants s’arrêtent de jouer, pleurent, s’isolent, s’allongent ou s’endorment) ; une pâleur inaugurale, des symptômes digestifs et des sensations vertigineuses sont souvent observés.

En revanche, les « drapeau(x) rouge(s) » suivants doivent faire suspecter une céphalée secondaire à une pathologie intracrânienne potentiellement grave et imposent une imagerie cérébrale :

• Céphalée « en coup de tonnerre » :

– début brutal, très intense, maximale en quelques minutes, inhabituelle.

• Céphalée et anomalie neurologique, avec ou sans fièvre :

– trouble de conscience ;

– crise épileptique (en dehors de la crise convulsive fébrile chez les enfants âgés de 6 mois à 5 ans) ;

– changement de comportement ;

– dysfonctionnement cognitif ;

– signe neurologique focal (même transitoire, en dehors des auras migraineuses visuelles) : déficit moteur, ataxie et trouble de la coordination ou atteinte des nerfs crâniens (notamment oculomoteurs).

– torticolis d’installation progressive, apyrétique, non congénital et non traumatique.

• Céphalée et signe(s) d’HTIC :

– vomissements répétés, en jets, en fin de nuit ou matinaux ;

– diplopie horizontale, paralysie du VI uni ou bilatérale, strabisme convergent ;

– œdème papillaire bilatéral au fond d’œil.

• Céphalée et trouble endocrinien central :

– symptôme endocrinien : aménorrhée, galactorrhée, diabète insipide ;

– trouble de la croissance staturo-pondérale ;

– trouble du développement pubertaire (puberté précoce ou retard pubertaire).

• Toute céphalée inhabituelle récente (évoluant depuis quelques semaines) et continue, d’intensité croissante, même en l’absence d’autre symptôme ou signe.

Dans le cas particulier de la céphalée post-traumatique après un traumatisme crânien (hors phase aiguë), il faut savoir que des troubles cognitifs et comportementaux peuvent être observés après un traumatisme crânien léger (syndrome post-commotionnel). Ils ne nécessitent pas d’exploration par imagerie en l’absence de drapeau(x) rouge(s).

Dans quel délai ?

Les délais de réalisation de l’imagerie cérébrale selon les différents tableaux cliniques (urgence immédiate, dans les 24 - 72 h, dans la semaine/mois) sont indiqués dans le tableau 3.

Quel type d’examen préférer ?

Lorsqu’une imagerie est indiquée, l’IRM cérébrale est préconisée en première intention en raison de sa meilleure sensibilité pour l’exploration du parenchyme cérébral et de son absence d’exposition aux rayonnements ionisants. Cependant, un scanner cérébral doit être réalisé d’emblée, étant donné sa rapidité et facilité d’acquisition et sa meilleure performance diagnostique dans certaines pathologies, dans les situations suivantes :

• état clinique instable, trouble de la conscience ;

• céphalée « en coup de tonnerre » ;

• indisponibilité de l’IRM dans les délais suggérés.

Quand demander un avis spécialisé ?

Avant une éventuelle imagerie

En l’absence de drapeau rouge un avis pédiatrique ou neuropédiatrique (en consultation) est requis en cas de :

• difficulté d’obtention d’une anamnèse ou d’un examen clinique fiable ;

• doute diagnostique ;

• céphalée réfractaire à un traitement approprié ;

• céphalée chronique (évoluant depuis plus de 3 mois).

Un avis ophtalmologique doit être demandé en cas de :

• céphalée chronique ;

• céphalée d’asthénopie (typiquement déclenchée par le travail de près, vespérale, présente les jours d’école et de moindre intensité, voire absente pendant les vacances) ;

• céphalée accompagnée de symptôme visuel hors drapeau rouge ou aura visuelle typique.

Après la réalisation de l’imagerie 

Si l’imagerie est normale : des signes d’HTIC sans cause évidente à l’IRM cérébrale doivent faire poursuivre les explorations diagnostiques en milieu hospitalier (avec avis neuropédiatrique et ophtalmologique) ; en cas de céphalée réfractaire à un traitement approprié, une consultation pédiatrique ou neuropédiatrique est indiquée.

Si l’imagerie cérébrale est anormale, un avis spécialisé est requis selon l’anomalie mise en évidence (neurochirurgical en cas de tumeur, abcès, malformation artérioveineuse, anévrysme ou hydrocéphalie ; neuropédiatrique et/ou neurovasculaire en cas de thrombophlébite cérébrale ou d’AVC ischémique ; ORL en cas de signes de sinusite chronique…).

Qu’en retenir ?

• Devant toute céphalée, réaliser un examen rigoureux, notamment neurologique, à la recherche de drapeaux rouges :

– céphalée « en coup de tonnerre » ;

– anomalie neurologique, avec ou sans fièvre ;

– signe(s) d’hypertension intracrânienne ;

– trouble endocrinien central ;

– céphalée récente inhabituelle et continue, d’intensité croissante.

• Ces drapeaux rouges imposent une imagerie : une IRM en première intention, sauf en cas d’état clinique instable, de trouble de la conscience ou de céphalée en coup de tonnerre (préférer dans ces cas un scanner).

• Une imagerie cérébrale n’est pas indiquée en cas de migraine et/ou céphalée de tension, en l’absence de drapeau rouge.

• Réaliser une imagerie qui n’est pas justifiée expose l’enfant aux risques liés aux rayonnements ionisants lors du scanner et à la découverte d’incidentalome à l’IRM (16 % des IRM cérébrales pédiatriques), c’est-à dire des anomalies de découverte fortuite sans lien avec la symptomatologie ayant motivé l’imagerie : kystes arachnoïdiens ou de la glande pinéale, hypersignaux de la substance blanche, opacité partielle des sinus, etc.

Outils pour la pratique

• Un arbre décisionnel pour les médecins généralistes et pédiatres de ville : « Céphalées de l’enfant et l’adolescent : indication de l’imagerie cérébrale ».

• Un document d’information pour les parents : « Mon enfant a mal à la tête. Une imagerie du cerveau est-elle nécessaire ? ».

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