Deux espèces à la saisonnalité différente
Ces larves ont été identifiées sur l’ensemble du territoire métropolitain – présence de l’une ou l’autre, quand ce n’est les deux en même temps. Bien que les deux espèces se distinguent par leur couleur (brun orangé pour celles du pin et gris argenté pour celles du chêne), il peut être difficile de les différencier en dehors de leur habitat. Elles peuvent mesurer jusqu’à quatre centimètres de longueur à la fin de leur croissance. Très faciles à identifier par leur comportement, ces chenilles sont grégaires, se déplaçant en groupe à la suite l’une de l’autre, d’où leur nom.
La chenille processionnaire du pin (Thaumetopoea pytiocampa) colonise des résineux de la famille des pins (pin sylvestre, pin noir, cèdre de l’Atlas…). L’exposition à ces chenilles est observée surtout de janvier à mai, avec un pic en mars.
La chenille processionnaire du chêne (T. processionea) colonise des feuillus de la famille des chênes (chêne sessile, chêne pédonculé…). L’exposition est observée entre avril et août, avec un pic en juin.
Les vagues de chaleur automnales et les hivers doux favorisent des développements larvaires précoces.
Des lésions possibles même sans contact direct
Ces chenilles sont couvertes d’une multitude de poils urticants (fig. 1 ), chacun relié à une glande à venin. Les poils se brisent facilement dès le premier contact, ce qui libère un venin à haut pouvoir nécrosant. Le contact avec les poils de ces insectes entraîne donc des réactions parfois graves.
La période la plus à risque est celle où les processionnaires du pin migrent le long du tronc (dernier stade larvaire où elles vont s’enfouir dans le sol pour se transformer en chrysalide), créant ainsi un « cordon » visible sur l’arbre et sur le sol, et pouvant être attrapées en particulier par les jeunes enfants (risque d’intoxication), voire les animaux domestiques.
Mais attention : le contact direct avec la chenille n’est pas nécessaire pour entraîner des symptômes, car ses poils urticants se détachent et sont transportés très facilement par le vent. Un rapport de toxicovigilance de l’Anses précisait ainsi que dans la moitié des cas, les personnes exposées l’avaient été indirectement : poils aéroportés, présents sur des surfaces (terrasse, pelouse), des objets (bâton, jouet, bois de chauffage…), des vêtements et des animaux domestiques.
En outre, le risque existe même hors saison : les nids vides (fig. 2) contiennent une grande concentration de poils urticants. Il faut contacter des spécialistes pour s’en débarrasser.
Quels symptômes ?
Les réactions se déclenchent dans les deux heures suivant une exposition aux poils des chenilles.
Le contact avec la peau provoque des irritations plus ou moins prurigineuses : rougeurs, démangeaisons, douleur cutanée, œdème localisé, urticaire et parfois petites cloques.
Le contact avec les yeux peut entraîner conjonctivite, larmoiement, douleur oculaire, éventuellement avec œdème ou démangeaison des paupières, et plus rarement kératite. D’après l’Anses, la voie d’exposition oculaire est celle ayant entraîné le plus grand nombre de cas graves.
Le contact avec les voies respiratoires peut provoquer toux, gêne respiratoire, bronchospasme, voire choc anaphylactique. Au niveau muqueux ou oculaire, ces lésions irritatives ou nécrotiques peuvent parfois être très importantes.
Des signes généraux peuvent être associés : fièvre, asthénie, adénopathies, œdème buccal ou facial, malaise…
Le traitement repose sur les antihistaminiques en cas de prurit, les corticoïdes et éventuellement un bronchodilatateur, en cas d’atteinte respiratoire. Les patients doivent consulter en urgence afin de détecter rapidement les lésions de nécrose.
Que dire à vos patients ?
En prévention
- Ne pas s’approcher et ne pas toucher les chenilles ou leur nid (en particulier pour les enfants) ; se tenir à distance des arbres porteurs de nids.
- Porter des vêtements longs en cas de promenade en forêt ou près d’arbres infestés.
- Éviter de se frotter les yeux pendant ou au retour d’une balade.
- Bien laver les fruits et les légumes de son jardin en cas d’infestation à proximité.
- Éviter de faire sécher le linge à côté d’arbres infestés.
En cas d’exposition
- En cas de suspicion d’exposition aux chenilles, prendre une douche et changer de vêtements (les laver à 60 °C).
- En cas de signes d’urgence vitale (détresse respiratoire…), appeler le 15 ou consulter aux urgences.
- En cas de contact avec la peau, celle-ci doit être rapidement savonnée et les poils incrustés dans le tégument cutané enlevés à l’aide d’un scotch.
- En cas de contact buccal (enfant en bas âge en particulier), nettoyer immédiatement la bouche et la langue avec un gant humide, puis consulter en urgence pour détecter rapidement les lésions de nécrose.
- En cas de contact oculaire, effectuer sans délai un rinçage de quelques minutes à l’eau claire ou sérum physiologique, et prévoir rapidement une consultation spécialisée pour évaluer l’ampleur des lésions.
- En cas de signes d’intoxication, consulter un médecin ou appeler le centre antipoison.
- Si contact direct, photographier la chenille pour en faciliter l’identification.
Si des animaux domestiques sont touchés, consulter un vétérinaire ou appeler un centre antipoison vétérinaire (Centre antipoison animal et environnemental de l’Ouest et Centre national d’informations toxicologiques vétérinaires).
Une brochure à destination des patients peut être téléchargée sur ce lien.
Anses. Chenilles processionnaires : gare aux poils urticants ! 30 mars 2020.
À lire aussi :
De Haro L. Chenilles processionnaires. Rev Prat Med Gen 2006;20(788):763.
Soula M. Un poil urticant… Réaction urticante aux chenilles processionnaires. Rev Prat Med Gen 2010;24(849):758.