Depuis l’émergence, à partir de 2005, d’un clone responsable d’épidémies sévères, des avancées majeures ont été réalisées dans cette pathologie, à la fois sur le plan épidémiologique, diagnostique et thérapeutique, justifiant de nouvelles recos par la Société européenne de microbiologie clinique et des maladies infectieuses. Une fiche pratique.

Clostridioides difficile est un bacille à Gram positif anaérobie sporulé responsable d’un large spectre d’infections digestives : de la diarrhée simple spontanément résolutive à la colite pseudomembraneuse qui peut se compliquer de mégacôlon toxique, de perforation, et entraîner le décès du patient. Il est impliqué dans 15 à 25 % des diarrhées associées à l’antibiothérapie et est responsable de 10 % des diarrhées associées aux soins.

Les formes compliquées sont rares (5 % des cas) mais associées à une mortalité pouvant atteindre 30 % malgré une prise en charge réanimatoire ou chirurgicale. Les récidives sont une autre complication, moins sévère mais plus fréquente : elles concernent 20 à 25 % des patients dans les deux mois suivant l’épisode initial.

Les principaux facteurs de risque d’infection à C. difficile (ICD) sont l’âge > à 65 ans ; l’utilisation récente d’antibiotiques ; des antécédents d’hospitalisation ; des maladies chroniques (insuffisance rénale, cancers, hémopathies malignes, immunodépression).

L’intérêt porté à ce micro-organisme a connu un tournant à partir de 2005 avec la description, d’abord en Amérique du Nord puis en Europe, d’un clone dit « hypervirulent » (027/NAP/BI) responsable de formes sévères d’infections, caractérisées par une mortalité élevée et une moins bonne réponse au métronidazole. Cela a stimulé la recherche clinique et fondamentale.

Depuis, des avancées majeures ont été réalisées tant sur le plan épidémiologique et diagnostique que thérapeutique.

Meilleure reconnaissance des formes communautaires d’ICD

Une étude prospective recherchant systématiquement C. difficile chez 2 541 patients ayant consulté leur médecin généraliste pour troubles digestifs a montré qu’il s’agissait de la deuxième cause bactérienne de diarrhée (3,27 %) après les Campylobacter (3,64 %). Parmi les patients infectés, 20 % avaient moins de 65 ans et aucun antécédent d’hospitalisation ni d’antibiothérapie. Ainsi, la possibilité d’une ICD doit être systématiquement envisagée chez tout patient ayant une diarrhée aiguë inexpliquée. L’incidence des ICD est plus importante chez les patients atteints de MICI que dans la population générale. Aucune donnée ne montre que la diverticulose colique serait facilitante.

Une démarche diagnostique optimisée

Si l’examen endoscopique est la référence, il s’agit d’un examen long, invasif et peu sensible.

De nouveaux tests moléculaires sont désormais disponibles. Les tests de détection des souches toxinogènes sont très sensibles mais peu spécifiques, alors que ceux qui détectent les toxines dans les selles sont très spécifiques mais peu sensibles. Ainsi, les recommandations européennes et françaises (Référentiel en microbiologie médicale : REMIC 2018) proposent d’utiliser un algorithme de diagnostic en deux étapes avec un test rapide de screening (par exemple, un test dépistant un antigène spécifique de C. difficile, la glutamate déshydrogénase [GDH], mais non spécifique des souches toxinogènes) puis un test de détection des toxines libres (test immuno-enzymatique).

Prise en charge : quelles nouveautés ?

Les premières mesures à mettre en place sont la réhydratation du patient et l’arrêt de l’antibiothérapie en cause ou son remplacement par un antibiotique à moindre risque.

Si les symptômes persistent, un traitement spécifique doit être initié.

La vancomycine et la fidaxomicine sont des molécules à spectre plus étroit que le métronidazole et entraînent moins de dysbiose intestinale (dispensation hospitalière).

En prévention des récidives, le bezlotoxumab (anticorps monoclonal dirigé contre la toxine B), permet de réduire leur taux de l’ordre de 37 % si administré en association à un traitement standard. La transplantation de microbiote fécal s’est avérée efficace dans plus de 90 % des cas pour le traitement des récidives multiples.

La Société européenne de microbiologie clinique et des maladies infectieuses (ESCMID) a réactualisé récemment les recommandations pour le traitement des ICD, selon la forme clinique (bénigne, sévère, compliquée), le risque et le nombre de récidives (v. figure).

Principales nouveautés :

– le métronidazole n’est plus recommandé, sauf si c’est la seule molécule disponible (par exemple en ville) ou si le patient ne peut pas prendre de médication par voie orale (le métronidazole par voie IV peut alors être proposé) ;

– la fidaxomicine est privilégiée pour le traitement initial d’une ICD ou d’une première récidive ;

– le bezlotoxumab est recommandé pour la première récidive lorsque la fidaxomicine a été utilisée en première intention ;

– la transplantation de microbiote fécal ou le bezlotoxumab sont priorisés en association à un traitement standard lors d’une deuxième récidive et au-delà.

Seule l’amélioration des signes cliniques rend compte de l’efficacité du traitement (pas de contrôle microbiologique recommandé).

Prévention : cruciale

Tout d’abord, le bon usage des antibiotiques est essentiel, et notamment la diminution de la prescription de certaines classes particulièrement à risque : céphalosporines, clindamycine, amoxicilline + acide clavulanique, nouvelles fluoroquinolones.

Pour prévenir la transmission croisée : isolement du patient infecté et mesures d’hygiène.

Des vaccins sont en cours de développement : celui à toxines recombinantes est le plus avancé.

D’après
Barbut F, Eckert C, Lalande V, et al. Clostridioides difficile : des recommandations actualisées.  Rev Prat 2022;72(7);703-8.
Pour en savoir plus :
Van Prehn J, Reigadas E, Vogelzang EH, et al. European Society of Clinical Microbiology and Infectious Diseases: 2021 update on the treatment guidance document for Clostridioides difficile infection in adults.  Clin Microbiol Infect 2021;27 Suppl 2:S1-S21.

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