Face à la recrudescence de la coqueluche, le 7 juin 2024 le ministère de la Santé a alerté les praticiens et indiqué la CAT. Or, l’inquiétude liée à l’intensité de cette épidémie est telle qu’elle a suscité des ruptures d’approvisionnement de réactifs de PCR et a aggravé la pénurie de macrolides. Ainsi, les infectiologues et les pédiatres recadrent les indications des tests diagnostiques et du traitement.

C’est coutumier aujourd’hui : lors de chaque flambée épidémique, les médecins doivent jongler entre les alertes et les recos du ministère, l’inquiétude des patients et le contexte actuel de pénurie de médicaments – en particulier des formes pédiatriques des antibiotiques.

Le 25 juin 2024, moins de 3 semaines après la publication d’un « DGS-Urgent » sur la coqueluche, les sociétés savantes d’infectiologie et pédiatrie – GPIP, Spilf, Gefrup, Afpa –, dans un contexte de tensions approvisionnement de réactifs et de macrolides, reprécisent dans un communiqué de presse les indications de la prévention, du diagnostic et du traitement de la coqueluche. En parallèle, la HAS, la Spilf et le GPIP ont aussi publié conjointement une recommandation de bonne pratique sur le choix et la durées de l’antibiothérapie en cas de coqueluche. 

Prévention : promouvoir la vaccination maternelle

Elle repose essentiellement sur l’application stricte des recommandations vaccinales :

  • la vaccination maternelle +++, recommandée en France depuis 2022, est trop faiblement appliquée ;
  • les mesures de cocooning (familles et toute autre personne s’occupant du nourrisson) quand la mère n’a pas été vaccinée ;
  • la vaccination des nourrissons dès l’âge de 8 semaines.

L’application des mesures barrières réduit le risque de transmission. L’éviction de la collectivité est recommandée jusqu’à 3 semaines après le début de la toux en l’absence de traitement, et 3 à 5 jours en cas de traitement. En cas d’envoi aux urgences d’un cas suspect, le service doit être prévenu.

Diagnostic : les non-indications de la PCR

Le diagnostic est fait par détection du génome des Bordetella par test PCR à partir d’un écouvillonnage nasopharyngé profond ou d’une aspiration. Dans la situation actuelle de forte tension (impossibilité d’obtenir l’examen ou retard d’obtention des résultats), les professionnels rappellent que les PCR ne sont pas indiquées :

  • chez un malade toussant depuis plus de 3 semaines ; dans ce cas, le diagnostic de cas plus récents dans l’entourage peut aider au diagnostic du cas index ;
  • chez tout malade avec symptômes évoquant la coqueluche ET contact même occasionnel d’un cas confirmé biologiquement ; dans ce cas, le traitement peut être prescrit sans test ;
  • chez tous les patients « contacts proches ou occasionnels asymptomatiques ».

Lors de la survenue d’un cluster dans une collectivité, en période de pénurie, seuls les premiers cas et les personnes à risque de forme grave (nourrissons, femmes enceintes, personnes immunodéprimées) nécessitent une confirmation biologique.

Les PCR sont indiquées chez :

  1. les nouveau-nés et les jeunes enfants non ou incomplètement vaccinés avec épisodes de toux quinteuses évocatrices ou associées à des apnées ;
  2. les enfants vaccinés, les adolescents et les adultes, avec une toux de plus de 7 jours sans autre cause, lorsque la dernière vaccination date de plus de 3 ans ;
  3. les enfants, adolescents et adultes vaccinés depuis moins de 3 ans, avec une toux de plus de 7 jours sans autre cause évidente ET en contact avec un cas confirmé de coqueluche ;
  4. les enfants, adolescents, adultes vaccinés depuis plus de 3 ans, ayant des symptômes compatibles ET dans l’entourage proche d’un nourrisson de moins de 5 mois ;
  5. les patients immunodéprimés et ayant des symptômes compatibles.
  6. si la pénurie se confirme et/ou s’amplifie, il faudra limiter les indications de la PCR aux formes graves ainsi qu’aux premiers cas de cluster.

Les 5 arguments à l’examen clinique devant faire évoquer une coqueluche ont été résumés par le CMG dans une fiche pratique à consulter sur ce lien.

Antibiothérapie : des indications strictes

Les macrolides sont recommandés pour réduire la transmission mais ils sont peu ou pas efficaces sur la symptomatologie. Cependant, chez le jeune nourrisson suspect de coqueluche, un traitement précoce permettrait de diminuer le risque de forme grave.

En raison des tensions d’approvisionnement en macrolides, les indications doivent être strictement respectées :

  • en curatif, dans les 21 jours qui suivent les premiers symptômes, en cas de coqueluche prouvée biologiquement, ou alors, en l’absence de diagnostic biologique, chez un patient symptomatique qui a été en contact avec un cas prouvé ou dans le cas d’une forte suspicion clinique chez le nourrisson dans l’attente de confirmation biologique ;
  • en prophylaxie chez les sujets contacts proches, ou occasionnels mais à risque, dont la dernière vaccination date de plus de 5 ans, dans les 21 jours qui suivent le dernier contact avec le cas index.

Actuellement, seules la clarithromycine et l’azithromycine sont recommandées en France. La clarithromycine doit être préférée (si elle est disponible) du fait du fort impact écologique de l’azithromycine. Les difficultés d’approvisionnement touchant principalement les formes pédiatriques, il ne faut pas hésiter dès 6 ans à utiliser les formes adultes en adaptant approximativement la posologie en mg/kg. L’alternative est le cotrimoxazole.

Le taux de résistance de B. pertussis aux macrolides – élevé en Asie – serait faible en France (trois cas confirmés soit 2,8 % parmi les isolats 2024 selon le CNR) mais en augmentation (jusqu’alors, 1 seul cas en 2011 avait été rapporté en France). Une surveillance rapprochée a donc été mise en place. Concernant les autres alternatives thérapeutiques possibles, B. pertussis est sensible in vitro à la ciprofloxacine et la doxycycline, mais il n’y a aucune étude clinique, et les CMI de la doxycycline sont assez élevées (entre 1 et 2 mg/L).

Un document avec des questions-réponses InfoVac sur la coqueluche est disponible ici : https ://www.infovac.fr/actualites/bulletin-n- 7 -faq-coqueluche-juin- 2024

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