La piste de l’administration par voie intranasale soit de médicaments soit d’un vaccin pour lutter contre le SARS-CoV-2 est de plus en plus explorée : des sprays nasaux délivrant des anticorps monoclonaux, ou utilisant des virucides comme le monoxyde d’azote, aux divers candidats vaccins intranasaux (8 actuellement dans le monde)… Parmi ces derniers, un candidat de fabrication française vient de montrer des résultats encourageant en phase préclinique.
Ce vaccin, développé par l’Institut national de la recherche agronomique (Inrae) et l’université de Tours, utilise la protéine Spike et d’autres protéines virales encapsulées dans des nanoparticules à base d’amidon et de lipides. Testé in vivo sur modèle murin, le schéma vaccinal consiste en 2 administrations par voie nasale, espacées de 3 semaines, pariant ainsi sur l’immunité locale des muqueuses qui sont « en première ligne » dans cette infection, pour bloquer donc l’entrée du virus. Les résultats, en attente de publication, viennent d’être présentés en conférence de presse par l’Inrae.
Conclusion : ce schéma aurait suscité une forte réponse immunitaire humorale chez les souris, notamment des immunoglobulines A muqueuses neutralisantes (IgA2), et aussi une forte immunité cellulaire au niveau des cavités nasales et des poumons. D’après les chercheurs, cette réponse immunitaire pourrait être efficace contre différents variants du SARS-CoV-2, car les protéines virales utilisées (hormis Spike) ne seraient pas soumises aux mutations et les IgA produites sont polyspécifiques.
Les chercheurs ont également évalué l’efficacité du vaccin en termes de présence de symptômes et de survie, après infection. Contrairement aux souris non vaccinées et infectées, qui ont toutes eu une détresse respiratoire suivie de décès, toutes les souris infectées du groupe vacciné ont survécu, et aucun signe clinique (détresse respiratoire, perte de poids…) n’a été observé parmi elles.
Mieux : ce vaccin semble aussi très efficace dans la diminution du risque de transmission du virus. En effet, aucune charge virale pulmonaire et nasale n’a été détectée chez les hamsters syriens vaccinés et infectés. À l’inverse, les animaux infectés non vaccinés avaient d’importantes quantités d’ARN viral dans les poumons et les cavités nasales. Étant donné que la physiopathologie du Covid-19 chez le hamster syrien est semblable à celle chez l’homme, les chercheurs considèrent ces résultats très prédictifs de l’efficacité du vaccin sur les humains en termes de contagiosité.
En effet, comme l’explique la Société de pathologie infectieuse de langue française (SPILF), la spécificité de la vaccination nasale est de susciter la production d’IgA et de cellules T et B mémoires dans le nez et les voies aériennes supérieures – en l’occurrence la porte d’entrée et le lieu de multiplication du SARS-CoV-2 –, permettant ainsi de prévenir l’infection, donc de réduire l’excrétion virale. A contrario, la vaccination par voie intramusculaire protège contre l’infection dans les poumons par transsudation des IgG sériques au niveau pulmonaire, mais sans empêcher l’infection au niveau nasal (donc l’excrétion virale).
Suivant ces résultats très encourageants, le développement et la production des lots de vaccins commencera dès l’automne 2021, en vue d’un passage en phase clinique en 2022, pour une éventuelle mise sur le marché prévue en 2023.
Parmi ses avantages pratiques : un mode d’administration moins invasif que l’injection (grâce à un petit adaptateur placé au bout d’une seringue sans aiguille, permettant une diffusion idéale au sein de la cavité nasale) qui pourrait être particulièrement adapté aux enfants, par exemple. Reste à savoir si cette technique pourrait conférer une immunité d’un durée égale à celle des vaccins classiques. À suivre…
LMA, La Revue du Praticien
Pour en savoir plus :
Inrae. Un vaccin 100 % français administrable par voie nasale, contre la Covid-19 : résultats précliniques positifs. 9 septembre 2020.