Bien que leur prévalence soit mal connue, des cas de Covid long ont été décrits chez les enfants et surtout les adolescents. La HAS vient d’éditer des recommandations pour aider les médecins traitants à prendre en charge ces patients. Devant quels symptômes évoquer un Covid long ? Quels diagnostics différentiels ? Quel bilan complémentaire prescrire ? Quels traitements proposer ?
En pratique, quelle démarche diagnostique ?
Le diagnostic n’est pas aisé, les symptômes étant souvent non spécifiques :
– fatigue (parfois importante, voire épuisement) ;
– maux de tête ;
– troubles du sommeil ;
– difficultés de concentration ;
– arthromyalgies ;
– douleurs abdominales ;
– intolérance à l’effort et/ou malaises postérieurs à l’effort ;
– tachycardie orthostatique, vertiges, douleurs thoraciques ;
– troubles de la déglutition, perte de poids, anosmie-agueusie persistante ;
– signes respiratoires (toux prolongée, dyspnée…).
Multiples et souvent associés, ces symptômes peuvent avoir des répercussions importantes sur la vie quotidienne de l’enfant (diminution des activités habituelles, décrochage et/ou absentéisme scolaire).
Une anamnèse détaillée est essentielle, car elle permet de retracer l’historique des symptômes, ainsi qu’un examen clinique de l’enfant pour bien les délimiter (celui-ci peut être normal et contraster avec la gêne rapportée par la famille ou le patient lui-même).
Dans un second temps, un bilan complémentaire peut être pratiqué : si les symptômes n’évoluent pas vers l’amélioration ou la disparition en moins de 4 semaines, si leur retentissement sur la vie quotidienne est important, ou en cas d’anomalie détectée lors de l’anamnèse et de l’examen clinique.
Le bilan est fonction des symptômes décrits mais peut comprendre :
‒ hémogramme, réticulocytes ;
‒ protéine C-réactive ;
‒ ionogramme sanguin, créatininémie, glycémie, calcémie ;
‒ bilan hépatique ;
‒ bandelette urinaire.
L’objectif est d’éliminer une complication rare liée à l’infection par le SARS-CoV-2 (myocardite, péricardite, PIMS…) ou de dépister une maladie intercurrente (maladie auto-immune, maladie inflammatoire, pathologie thyroïdienne, diabète…).
À noter que si la majorité des enfants évolue favorablement sur un temps court (moins de 3 mois), pour d’autres le temps de récupération peut être plus long et des rechutes sont possibles.
En fonction du tableau clinique, de l’évolution et du bilan initial, orienter vers un pédiatre s’impose, afin que celui-ci prescrive d’autres examens complémentaires, essentiels pour éliminer un diagnostic différentiel.
Quelle prise en charge ?
Il est avant tout important de ne pas rejeter ou délégitimer les vécus et ressentis du patient et de sa famille, ce qui peut en outre retarder la prise en charge optimale.
Le médecin traitant, au centre de cette prise en charge, peut avoir recours si nécessaire à des spécialistes et autres professionnels de santé. Cette prise en charge, globale, peut être énergivore et longue, mais elle donne le plus souvent des chances de récupération rapide à l’enfant – il faut sur ce point rassurer le patient et ses parents. Les soins peuvent être associés à une prise en charge rééducative adaptée selon le besoin de l’enfant (respiratoire, olfactive, orthophonique, à l’effort…). Un soutien psychologique peut s’avérer nécessaire.
La HAS a défini 5 axes pour le suivi :
1. Définir des objectifs propres à chaque patient selon ses capacités et ses besoins pour la vie quotidienne (scolaire, social, loisirs, pairs, sport/activité physique, vie familiale…).
2. Réguler ses différentes activités en s’appuyant sur :
• Une bonne gestion du rythme de l’activité et du repos, avec si possible de la rééducation à l’effort, dans les limites des capacités du patient, avec une augmentation progressive possible selon son état. La rééducation ne doit pas déclencher d’exacerbation des symptômes post-effort. Solliciter si besoin la kinésithérapie et des méthodes de gestion du rythme tels que le fractionnement des activités.
• Régulation du sommeil (heures fixes y compris durant les vacances, temps de lumière du jour, limitation du temps d’écran…) avec respect des besoins de repos, qui peuvent être très important notamment au début (hypersomnie, siestes).
• Régulation de l’alimentation (horaires réguliers, alimentation pouvant être fractionnée avec collation).
3. Soutenir l’enfant et sa famille : être à l’écoute et bienveillant. L’orientation vers un soutien psychologique peut être nécessaire en raison du stress généré par les symptômes et leur retentissement sur la vie quotidienne. Il est fortement conseillé quand il y a des facteurs prédisposants (vulnérabilités somatiques et psychiques). Les méthodes de gestion du stress peuvent être utiles.
4. Limiter l’impact social avec une adaptation souple et évolutive de la vie quotidienne ; un aménagement du temps scolaire et de l’activité physique peuvent être conseillés pendant une période, avec si nécessaire l’établissement d’un PAI en relation avec le service de médecine scolaire.
5. Enfin, des traitements médicamenteux peuvent être utiles en fonction des symptômes (aucun traitement symptomatique n’est contre-indiqué ; un traitement psychotrope ne doit être prescrit qu’en collaboration avec un pédopsychiatre).
Pour des formes plus prolongées ou complexes, un suivi multidisciplinaire ou en milieu hospitalier est recommandé et des explorations plus approfondies peuvent être nécessaires. Les principes de la prise en charge du Covid long chez l’adulte peuvent apporter des compléments d’information.
Laura Martin Agudelo, La Revue du Praticien
Pour en savoir plus :
HAS. Covid-19 : repérer et prendre en charge les symptômes prolongés chez l’enfant et l’adolescent. 18 mars 2022.
Hentgen V, Hau I. Covid long chez l’enfant : ça existe vraiment ?Infovac 9 décembre 2021.