Les symptômes persistant des mois après la primo-infection par le SARS-CoV-2 concerneraient, selon différentes estimations, entre 20 et 30 % des adultes infectés. Mais qu’en est-il chez les enfants, population particulièrement touchée lors de la vague omicron ? Une étude de cohorte multicentrique allemande a étudié la prévalence des symptômes à 12 mois chez plus de 1 200 personnes, dont une moitié d’enfants…

 

Le « Covid long » est particulièrement difficile à étudier, du fait de l’hétérogénéité des symptômes souvent associés à ce terme, ainsi que de leur temporalité (en France, la HAS le définit comme la persistance de symptômes au-delà de 1 mois après une infection par le SARS-CoV-2). En dépit de l’ambigüité qui entoure sa définition et son épidémiologie, certaines études ont suggéré qu’il pouvait concerner jusqu’à un tiers des adultes 3 à 6 mois après l’infection, mais peu d’études ont évalué la prévalence de ces symptômes au-delà de 6 mois et avec des groupes contrôle – en particulier chez les enfants.

Cette étude de cohorte multicentrique conduite en Allemagne (preprint soumis au Lancet) est la première à comparer la prévalence des symptômes à 12 mois entre des sujets infectés et des sujets exposés (cas contact) mais non infectés. Menée sur 341 ménages (1 267 personnes au total), elle a également permis d’évaluer la possibilité d’un Covid long chez les enfants et les adolescents, qui constituaient plus de 40 % de la cohorte (140 personnes âgées de 14-18 ans et 404 âgées de moins de 14 ans).

Les participants ont été recrutés en été 2020 et suivis pendant 1 an : chaque foyer avait au moins un cas de Covid documenté par PCR ou test sérologique au début de l’étude (entre mai et août 2020 = T1), puis tous les membres du foyer – cas contact, infectés ou pas – étaient invités à répondre à un questionnaire de santé 11-12 mois après (T2), sur la présence de symptômes tels que : fatigue, capacités physiques réduites, dyspnée, dysgueusie ou dysosmie, troubles du sommeil, de l’humeur, de la concentration, de la mémoire, anxiété…

Sur les 1 267 participants, 704 avaient eu le Covid à T1 ; 563 personnes sont restées négatives jusqu’à T2 (celles qui avaient rapporté une infection postérieure, entre T1 et T2, ont été exclues). La grande majorité des personnes infectées avaient eu des symptômes non graves ou étaient restées asymptomatiques.

Résultats : la prévalence de symptômes modérés à sévères à T2 était significativement plus élevée chez les adultes infectés par rapport aux cas contact : 36,4 % vs 14,2 % pour les femmes (fatigue modérée à sévère, capacité physique diminuée, dysgueusie/dysosmie et troubles du sommeil étaient les plus fréquemment rapportés) et 22,9 % vs 10,3 % pour les hommes (notamment dysgueusie/dysosmie modérées à sévères) ; la dyspnée était globalement le symptôme le plus fréquent. Chez les adolescents, les filles infectées avaient une prévalence plus élevée de symptômes persistants que les filles cas contact (32,1 % vs 8,9 %, en particulier pour la capacité physique diminuée), mais ce n’était pas le cas chez les garçons. Chez les enfants de moins de 14 ans, aucune différence significative n’a été observée entre la prévalence des symptômes chez les sujets infectés et cas contact – mais, selon les auteurs, la possibilité de séquelles très rares ne peut être écartée vu la petite taille de l’échantillon pédiatrique.

En outre, les sujets ayant eu des épisodes symptomatiques de Covid avaient plus de risques de rapporter à 1 an des symptômes persistants, par rapport aux sujets infectés asymptomatiques – ce qui est cohérent avec les résultats d’autres études. Les données suggèrent que la diarrhée et la dysgueusie pendant l’épisode initial (mais pas la fièvre) seraient particulièrement associés à un risque élevé d’avoir des symptômes persistants.

Enfin, des « regroupements » de cas de Covid long étaient observés : le risque pour un participant d’avoir un symptôme persistant à T2 augmentait de 12 % pour chaque symptôme rapporté au sein de son foyer.

Cependant, cet essai allemand ne prend pas en compte les éventuelles différences dans les « Covid longs » selon les divers variants (car elle a été réalisée pendant la première année de la pandémie, sur des personnes infectées pendant la première vague)…

En conclusion, globalement, les résultats de cette étude sont rassurants en ce qui concerne la population pédiatrique, contredisant ainsi certains travaux précédents, qui avaient trouvé des prévalences du Covid long allant jusqu’à 50 % chez l’enfant. À noter qu’une grande partie de ces études – très hétérogènes quant aux types des symptômes, à la durée du suivi, à la manière de collecter les données (souvent déclarative) – avaient des biais méthodologiques importants. Une vaste étude de cohorte anglaise sur plus de 250 000 enfants de 5 à 17 ans a, en outre, suggéré que dans la majorité des cas les symptômes persistent rarement après 8 semaines. Toutefois, comme le souligne Infovac.fr, même si les cas de Covid long semblent être rares dans cette population, il est indispensable de les évaluer en consultation et de les prendre en charge.

Laura Martin Agudelo, La Revue du Praticien

Pour en savoir plus :

Haddad A, Janda A, Renk H, et al. Long COVID Symptoms in a Prospective Cohort of Exposed and Infected Children and Adolescents and Their Parents One Year After SARS-CoV-2 Infection.Lancet 3 mars 2022.

À lire aussi :

Mallordy F. Covid long : 4 facteurs favorisants identifiés !Rev Prat (en ligne) 1er mars 2022.