Si le risque d’hospitalisation et décès lié au Covid est fortement diminué aujourd’hui, la prise en charge des symptômes persistant plusieurs semaines ou mois après l’infection pose encore problème en soins primaires. Point sur les études récentes ou en cours sur les divers moyens préventifs et curatifs.

Près de 6 % des personnes infectées par le SARS-CoV-2 auraient des symptômes persistant 3 mois après l’épisode aigu, selon des données récentes du Global Burden of Disease. Étant donné le nombre considérable d’infections ayant lieu encore aujourd’hui, le poids du Covid long à l’échelle de la population, en nombre absolu, est considérable. La durée des symptômes est estimée, dans cette même étude, à 9 mois pour ceux ayant été hospitalisés et 4 mois pour les non-hospitalisés (qui représentent la grande majorité des personnes vivant avec un Covid long aujourd’hui).

D’où l’intérêt de trouver des moyens de le prévenir et de le traiter – sa prise en charge étant actuellement symptomatique. Plusieurs études ayant pour but de combler ce manque, en examinant l’efficacité de divers moyens préventifs, allant des vaccins aux médicaments, ont récemment dévoilé leurs résultats. D’autres, évaluant des médicaments en curatif à la phase chronique, sont en cours.

La metformine chez les patients obèses réduit le risque de Covid long

Un essai randomisé contrôlé de phase III, qui vient d'être publié dans le Lancet, a comparé l’efficacité de trois médicaments – metformine, ivermectine, fluvoxamine – contre placebo pour prévenir la survenue de symptômes persistants de Covid (suivi > 9 mois). Il a été mené aux États-Unis plus de 1 000 patients de 30 à 85 ans ayant un surpoids ou une obésité (IMC médian : 30 kg/m2). Le diagnostic de Covid long était un critère secondaire de l'étude princeps qui évaluait l'efficacité de ces médicaments contre la survenue d'un Covid sévère à la phase aiguë (ils se sont avérés inefficaces sur ce critère).

Dans le groupe ayant reçu de la metformine (n = 564), avec un traitement de 2 semaines instauré dans les 5 jours suivant le début des symptômes, le risque d’avoir un diagnostic de Covid long était réduit de 41 % par rapport au groupe placebo (HR = 0,59 ; IC95% : 0,39-0,89) – un effet observé dans les différents sous-groupes de patients et quel que soit le variant. En revanche, aucune différence significative n’a été observée dans les groupes ivermectine ou fluvoxamine.

Il s’agit du seul essai randomisé à ce jour à avoir fourni des preuves d’efficacité d’un traitement préventif du Covid long. Mais, là encore, avec des résultats qui ne sont peut-être pas généralisables à toute la population – et qui mériteraient donc d’être vérifiés dans d’autres études sur de plus vastes cohortes.

Vaccination : un risque diminué de 40 %

Une revue systématique avec méta-analyse, publiée dans le JAMA et réunissant 41 études (plus de 860 000 patients au total), a évalué les facteurs associés à un sur-risque de développer un Covid long. Si elle a confirmé certains facteurs pouvant favoriser cette affection qui étaient déjà évoqués dans des travaux précédents – sexe féminin, surpoids et obésité, tabagisme, hospitalisation à la phase aiguë du Covid… –, elle a aussi permis de déceler un effet protecteur de la vaccination anti-Covid.

En effet, la méta-analyse des 4 études (près de 250 000 patients au total) ayant évalué l’effet du statut vaccinal sur la persistance des symptômes du Covid a montré que les personnes ayant reçu 2 doses de vaccin (Pfizer, Moderna, AstraZeneca ou CoronaVac) avaient 40 % moins de risques de développer un Covid long (OR = 0,57 ; IC95% : 0,43-0,76). Ce résultat est cohérent avec les données issues de la surveillance britannique. Ce bénéfice – qui, de plus, persisterait même chez des patients ayant des facteurs de risque (âge avancé, obésité) – étaye l’intérêt de la vaccination au-delà de son efficacité contre la mortalité et la morbidité à la phase aiguë.

Paxlovid à la phase aiguë : 26 % moins de Covid long

Aujourd’hui, l’antiviral Paxlovid (nirmatrelvir PF-07321332-ritonavir) est le traitement curatif de première intention en cas d’épisode Covid – quel que soit le variant –, particulièrement chez les patients à risque, afin de prévenir l’évolution vers une forme grave. Mais, administré à la phase aiguë, pourrait-il également éviter la survenue d’un Covid long ?

C’est ce que suggère une vaste étude de cohorte observationnelle, qui vient aussi d’être publiée dans le JAMA. Menée avec des données du département des anciens combattants des États-Unis, elle a suivi pendant 6 mois plus de 280 000 patients d’âge moyen 62 ans (dont 86 % d’hommes), infectés par le SARS-CoV-2 et ayant au moins un facteur de risque de forme grave. Parmi eux, plus de 35 000 ont reçu du Paxlovid dans les 5 jours après la date du test positif, le reste constituant le groupe contrôle (n’ayant reçu ni du Paxlovid ni d’autres traitements curatifs comme les anticorps monoclonaux).

Résultat : la prise de Paxlovid diminuait de 26 % le risque d’avoir des symptômes persistants après la phase aiguë (RR = 0,74 [IC95% : 0,72-0,77] pour le groupe ayant pris le traitement par rapport au groupe contrôle). L’analyse comprenait une dizaine de symptômes : fatigue, dyspnée, symptômes cardiovasculaires, neurocognitifs, etc. Par ailleurs, l’effet protecteur était observé dans tous les sous-groupes de comorbidités (cancer, diabète, pathologies rénales, pulmonaires…), et quel que soit le statut vaccinal. Toutefois, cette cohorte étant composée majoritairement d’hommes âgés, les résultats ne sont pas forcément généralisables à la population générale.

Quid des traitements en phase chronique ?

Un certain nombre d’essais cliniques sont en cours pour explorer des solutions thérapeutiques pour les patients chez qui le Covid long est déjà installé.

Fin 2022, un essai recrutant quelque 200 patients a débuté en Suisse, pour évaluer l’efficacité d’un anticorps visant une protéine appelée W-ENV, potentiellement responsable de la persistance de l’inflammation après une infection par le SARS-CoV-2.

Récemment annoncé, un essai randomisé de phase II sera conduit aux États-Unis (le recrutement n’a pas encore commencé) : il testera en double aveugle contre placebo l’efficacité, la sûreté et la tolérance de l’administration de Paxlovid pendant 15 jours à une centaine de patients atteints de Covid long.

Enfin, un essai randomisé en double aveugle est en cours au Canada pour examiner l’efficacité contre placebo de la naltrexone à faible dose (1 à 4,5 mg) dans le traitement de la fatigue et la douleurs chroniques post-Covid. En effet, administrée à faibles doses, cette molécule a déjà été utilisée pour traiter d’autres syndromes douloureux chroniques, telles que la fibromyalgie ou l’encéphalomyélite myalgique.

À suivre…

D’après
Topol E. Preventing Long Covid.Ground Truths 23 mars 2023.
Tsampasian V, Elghazaly H, Chattopadhyay R. Risk Factors Associated With Post−COVID-19 Condition: a Systematic Review and Meta-analysis. JAMA Intern Med 23 mars 2023.
Xie Y, Choi T, Al-Aly Z. Association of Treatment With Nirmatrelvir and the Risk of Post–COVID-19 Condition. JAMA Intern Med 23 mars 2023.
Bramate C, Buse JB, Liebotiv D, et al. Outpatient Treatment of COVID-19 and the Development of Long COVID Over 10 Months: A Multi-Center, Quadruple-Blind, Parallel Group Randomized Phase 3 Trial.  Lancet 6 mars 2023
À lire aussi :
Martin Agudelo L. Covid long : un nouveau paradigme pour le comprendre et le traiter.  Rev Prat (en ligne) 11 janvier 2023.

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