Peu de travaux se sont intéressés à la progression des symptômes du Covid long au-delà de 1 an. Une étude française toute récente montre, à 2 ans, différents profils d’évolution associés à certaines caractéristiques des patients. Explications…

Près de 6 % des personnes infectées par le SARS-CoV-2 auraient un Covid long – défini comme la persistance de symptômes 3 mois après l’épisode aigu –, selon le Global Burden of Disease (données publiées fin 2022). Étant donné le nombre considérable d’infections, sévères ou non, ayant eu lieu à l’échelle de la population, le poids du Covid long est considérable en nombre absolu. Il est donc important d’en connaître l’évolution et le pronostic, pour en améliorer la prise en charge. Toutefois, peu de travaux se sont intéressés à la progression des symptômes sur un temps long, au-delà de 1 an.

Une étude française récemment publiée dans l’International Journal of Infectious Diseases vient combler cette lacune : grâce à un suivi > 1 an, différents profils d’évolution des personnes ayant un Covid long ont pu être identifiés et associés à certaines caractéristiques des patients (âge, comorbidités…). Ces résultats, basés sur la cohorte Compare Covid long, élargissent des données publiées en 2022, issues de cette même cohorte, qui trouvaient notamment que 12 mois après l’infection la probabilité d’avoir toujours au moins un symptôme était de 85 %. Qu’en est-il aujourd’hui ?

La quasi-totalité des patients ont des symptômes qui se résolvent lentement

Cette étude prospective a enrôlé 2 197 adultes (79 % de femmes ; âge médian : 46 ans) entre décembre 2020 et juillet 2022. Les participants rapportaient : (1) une infection par le SARS-CoV-2, confirmée chez 69 % des sujets et suspectée chez les autres (17 % des participants ont été hospitalisés à la phase aiguë) ; (2) la persistance d’au moins un symptôme sur les 53 consignés dans le questionnaire validé Covid Symptom Tool (ST) dans les 3 mois suivant l’infection aiguë et persistant pendant au moins 2 mois.

Durant la période de suivi (allant de 60 à 469 jours ; durée médiane : 291 jours), les participants rapportaient la persistance de leurs symptômes tous les 60 jours, grâce au même questionnaire, ce qui a permis d’identifier plusieurs trajectoires d’évolution et de modéliser la progression de la maladie sur 2 ans pour chacune d’entre elles.

Trois profils se sont dégagés :

  • Les patients ayant des symptômes très persistants représentaient 4,3 % de la cohorte : ils avaient un score ST élevé à l’inclusion, c’est-à-dire un grand nombre de symptômes (> 35), montrant peu ou pas d’évolution favorable sur la durée de suivi. Ces sujets rapportaient le plus souvent, durant la première année, des troubles cardiaques et vasomoteurs (tachycardie, bradycardie, palpitations, arythmies dans 93 % des cas ; bouffées de chaleur [76 %], sueurs [69 %]) ainsi que des troubles de la sensibilité (paresthésies [78 %], intolérance au chaud ou au froid [65 %], photo- ou phonophobie [59 %]).
  • Ceux ayant des symptômes rapidement résolutifs  (4,9 % de la cohorte) avaient un score ST moyen à l’inclusion : 28 symptômes en moyenne, cédant progressivement durant le suivi (< 10 à 1 an ; 0 symptômes à 2 ans). Les symptômes les plus fréquemment rapportés par ces sujets durant la première année étaient les cervicalgies et lombalgies (65 %) et la diarrhée (52 %).
  • Ceux ayant des symptômes lentement résolutifs constituaient la quasi-totalité de la cohorte (90,8 %) : si leur score ST était bas à l’inclusion, avec < 20 symptômes, ceux-ci évoluaient lentement au cours du suivi (12 symptômes persistants à 2 ans, en moyenne). Les plus fréquemment rapportés étaient les cervicalgies et lombalgies (44 %), les troubles cardiaques (44 %) et les paresthésies (36 %).

Les résultats étaient similaires en prenant en compte uniquement les participants ayant eu une infection confirmée. Néanmoins, l’étude n’ayant pas de groupe contrôle, cela rend difficile l’interprétation d’un lien de cause à effet entre l’infection et certains des signes étudiés – d’autant plus que la plupart sont non spécifiques et pourraient être liés aux comorbidités, pathologies intercurrentes, etc.

Une évolution associée à l’âge et aux comorbidités

Un âge avancé et des antécédents de maladie systémique étaient associés au profil « symptômes très persistants », tandis que les patients plus jeunes, ceux ayant une infection confirmée et ceux n’ayant pas de pathologies fonctionnelles étaient plus susceptibles d’avoir des symptômes rapidement résolutifs.

Aucune association n’a été retrouvée entre chacun des profils et l’IMC, le niveau éducatif ou l’hospitalisation à la phase aiguë.

Enfin, la quasi-totalité des participants (90 %) a été incluse avant juin 2021, soit pendant la période de prédominance du variant alpha, ce qui limite la généralisation des résultats au variant omicron et à ses « descendants » circulant depuis. Néanmoins, parmi les participants de l’étude infectés par omicron, aucun d’entre eux n’appartenait au profil « symptômes très persistants », ce qui rejoint d’autres données montrant que ce variant engendre des infections et des séquelles moins sévères.

Si cette étude est la première à dégager différents profils d’évolution des patients atteints de Covid long et à les corréler aux caractéristiques des patients, d’autres travaux sont nécessaires pour identifier des marqueurs cliniques et biologiques plus spécifiques permettant de mieux prédire le pronostic de chaque patient.

Pour en savoir plus
Servier C, Porcher R, Pane I, et al. Trajectories of the evolution of post-COVID-19 condition, up to two years after symptoms onset.  Int J Infect Dis 2023;133:67-74.
À lire aussi :
Martin Agudelo L. Covid long : quoi de neuf dans la prévention et le traitement ?  Rev Prat (en ligne) 28 mars 2023.
Martin Agudelo L. Covid long : un nouveau paradigme pour le comprendre et le traiter.  Rev Prat (en ligne) 11 janvier 2023.

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