Chez les patients atteints de Covid pris en charge en ambulatoire mais ayant des facteurs de risque d’aggravation, la prescription d’un oxymètre de pouls est recommandée pour la surveillance à domicile. Une étude anglaise évaluant la sécurité de ce procédé vient d’être publiée…

 

Pour rappel, en France, la recommandation depuis avril 2021 est de prescrire, après une première consultation avec mesure systématique de la Sp02, un oxymètre de pouls avec marquage CE pour la surveillance à domicile (autosurveillance ou par une IDE) chez les patients de plus de 65 ans, ou ayant d’autres facteurs de risque de forme grave, ou des signes respiratoires, suivis en ambulatoire (v. modalités pratiques et conseils à prodiguer aux patients sur ce lien). La fréquence de la mesure est d’au moins 3 fois/24 heures, jusqu’à J14 après le début des symptômes (ou après la date du test positif pour un patient asymptomatique), et une consultation de contrôle est conseillée entre J6 et J12.

Cette recommandation avait suscité à l’époque quelques doutes, certains soulignant que de telles mesures pouvaient être faussement rassurantes (par exemple, la HAS a fixé à 95 % le seuil de Sp02 en-deçà duquel un appel au SAMU était nécessaire, mais une saturation supérieure n’exclut pas forcément une hypoxie, notamment en cas polypnée associée). Au Royaume-Uni, où un dispositif similaire a été mis en place, une étude vient aujourd’hui apporter des données rassurantes sur sa sûreté…

Cette étude rétrospective observationnelle a été menée chez plus de 900 patients (âge médian : 54 ans) pendant l’été 2020. Il ont bénéficié d’une prescription d’oxymètre de pouls pour la surveillance à domicile, dont les résultats, couplés à d’autres données (fréquence cardiaque, symptômes, perception de l’état général…), étaient communiqués quotidiennement, voire plusieurs fois par jour, au professionnel de santé chargé du suivi.

Parmi les sujets étudiés, 33 % furent enrôlés après une consultation en soins primaires, 38 % après une visite aux urgences et 29 % après un séjour à l’hôpital. Ces derniers avaient, en moyenne, des saturations en oxygène plus basses que les autres au moment de l’inclusion (96 % contre 97 % dans le deuxième groupe et 98 % dans le premier). La moitié des patients (50 %) avaient un surpoids ou une obésité, avec une plus grande proportion parmi les sujets inclus après un séjour à l’hôpital (62 %) et moindre chez ceux inclus après une consultation en soins primaires (36 %). Un tiers des patients étaient hypertendus.

Résultats : pendant le suivi, 69 (5,7 %) patients sont allés à l’hôpital pour une aggravation de leur état (40 ont été admis), un événement qui augmentait avec l’âge et le nombre de comorbidités. En effet, 3,1 % des patients âgés de moins de 65 ans et sans comorbidité se sont présentés à l’hôpital, contre 5,0 % des moins de 65 ans avec comorbidité et 9,7 % des 65 ans et plus. Par ailleurs, 5,3 % des patients avec une SpO2 ≥ 95 % lors de l’inclusion se sont présentés à l’hôpital, contre 6,1 % de ceux dont la saturation en oxygène était comprise entre 93 % et 94 % et 10,9 % de ceux avec une Sp02 < 93 % lors de l’inscription.

Si l’analyse multivariables n’a, finalement, pas montré d’association significative entre la présentation à l’hôpital et le nombre de comorbidités, l’obésité ou la saturation en oxygène à l’inclusion (la seule association significative étant avec l’âge), la mortalité toutes causes confondues était, elle, significativement associée à un âge avancé, à l’obésité et au nombre de comorbidités. Elle était également plus élevée chez les patients inclus après une sortie de l’hôpital par rapport à ceux enrôlés après une consultation en soins primaires ou aux urgences (risque multiplié par 8,7, après ajustement sur âge, sexe, comorbidités et Sp02 à l’inclusion).

Enfin, la plupart des patients utilisant la surveillance par oxymétrie à domicile avaient une faible gravité clinique au moment de l’initiation et ne sont pas décédés ni se sont présentés à l’hôpital pendant la période d’étude. Les auteurs en ont déduit que le dispositif de surveillance avec oxymètre à domicile est sûr, tout en soulignant qu’il faut être vigilant vis-à-vis de l’augmentation du risque chez les patients vulnérables et ceux suivis après une sortie de l’hôpital.

Laura Martin Agudelo, La Revue du Praticien

Pour en savoir plus :

Clarke J, Flott K, Fernandez Crespo R, et al. Assessing the safety of home oximetry for COVID-19: a multisite retrospective observational study.BMJ Open 2021;11(9).

Covid : prescrire un oxymètre chez les patients à risque d’aggravation !Rev Prat (en ligne) 14 avril 2021.