La piste de l’administration par voie intranasale soit de médicaments soit d’un vaccin pour lutter contre le SARS-CoV-2 est très intéressante. 
En France, un candidat vaccin utilisant un vecteur lentiviral est en cours d’étude, tandis qu’en Israël et Nouvelle-Zélande un spray nasal utilisant du monoxyde d’azote – aux propriétés virucides – est déjà autorisé, bien qu’en attente des résultats définitifs d’efficacité.

 

Une étude récente publiée dans Nature évalue, quant à elle, l’efficacité d’anticorps monoclonaux délivrés par voie intranasale.

Les chercheurs ont développé des anticorps monoclonaux IgM et IgA1 neutralisants – immunoglobulines localisées dans les muqueuses et qui constituent donc la première ligne de défense contre les pathogènes – à partir de cinq anticorps IgG1 (CoV2-06, 09, 12, 14, 16) reconnaissant différents épitopes sur le receptor-binding domain (RBD) de la protéine Spike du SARS-CoV-2. Ensuite, pour comparer leur efficacité contre les trois principaux variants (« anglais » [B.1.1.7 ou alpha], « sud-africain » [B.1.351 ou bêta] et « brésilien » [P.1 ou gamma]), ils ont produit des virus recombinants à partir de la souche dite « sauvage » du SARS-CoV-2 en remplaçant le gène codant la protéine Spike par celui des trois variants cités.

Se concentrant sur l’anticorps monoclonal dit « IgM-14 », ils ont montré, via des tests ELISA, que celui-ci avait une plus grande capacité à se lier à la protéine Spike que son « parent » IgG-14. Quant aux capacités neutralisantes, les tests ont montré que, contrairement à l’IgG-14 qui neutralisait fortement le variant B.1.1.7 mais beaucoup moins les P.1 et B.1.351, l’IgM-14 était efficace contre les trois variants – avec, globalement, une capacité neutralisante 230 fois plus importante. Rappelons, en effet, que plusieurs études ont montré que les variants « anglais » et « sud-africain » sont réfractaires à différents anticorps monoclonaux déjà utilisés contre la souche « sauvage ».

Les auteurs ont ensuite administré ces IgM par voie nasale à des souris pour tester leur capacité à neutraliser les virus in vivo. Résultat : à la fois en prophylaxie et en thérapeutique, en une dose unique, cet IgM-14 a une capacité protectrice importante contre le SARS-CoV-2 (à des doses aussi faibles que 0,044 et 0,4 mg/kg pour la prophylaxie et la thérapeutique respectivement), pouvant réduire les charges virales à des niveaux indétectables dans les poumons deux jours après l’infection.

En particulier, pour le variant P.1, l’IgM-14 diminue la charge virale pulmonaire d’un facteur 144 à la dose de 1,2 mg/kg – et jusqu’à 16 429 fois à la dose de 3,5 mg/kg –, alors que l’effet antiviral de son « parent » IgG-14 est faible contre ce même variant, avec une réduction des charges virales d’environ 4 fois aux mêmes doses. L’IgM-14 a aussi montré une efficacité in vivo significativement plus élevée que l’IgG-14 contre le variant B.1.351

Des perspectives encourageantes, à confirmer encore par des essais cliniques chez l’homme… 

Laura Martin Agudelo, La Revue du Praticien

Pour en savoir plus

Kwon D. Antibody-laden nasal spray could provide COVID protection — and treatment. Nature News, 4 juin 2021.

Ku Z, Xie X, Hinton PR, et al. Nasal delivery of an IgM offers broad protection from SARS-CoV-2 variants. Nature 2021.