Les vaccins à ARNm disponibles en France (Pfizer, Moderna), qui sont sûrs chez la femme enceinte, le sont a priori aussi chez la femme qui allaite et pour l’enfant : selon le Centre de référence sur les agents tératogènes, aucun évènement particulier n’a été rapporté parmi une trentaine d’enfants allaités par des mères ayant reçu un vaccin à ARNm en cours d’allaitement en France. Il en irait de même pour ceux qui utilisent un vecteur viral non réplicatif (AstraZeneca, Janssen).
Ces vaccins sont en effet dénués de pouvoir infectieux, car le passage systémique de l’ARNm et du vecteur viral après la vaccination n’est pas attendu – leur présence dans le lait maternel ne l’est donc pas non plus. Bien que femmes enceintes et allaitantes aient été exclues des études cliniques initiales, des données démontrant la bonne tolérance et l’immunogénicité de ces vaccins dans ces deux populations commencent à émerger.
Une étude récente aux États-Unis sur une cohorte de 131 femmes (84 étaient enceintes, 31 allaitaient et 16 ni l’un ni l’autre) a montré que les taux d’anticorps induits par la vaccination étaient comparables dans ces trois groupes – et supérieurs à ceux induits par l’infection naturelle chez la femme enceinte. Aucune différence n’a été observée sur la réactogénicité parmi les trois populations (les vaccins utilisés étaient Pfizer ou Moderna).
La présence d’anticorps anti-SARS-CoV-2 a aussi été décelée dans le lait maternel. Une donnée que viennent appuyer deux autres nouvelles études : une première (preprint) menée sur 6 femmes allaitantes aux États-Unis ; une deuxième (publiée dans le JAMA), plus récente, menée en Israël, sur 84 femmes ayant reçu deux doses du vaccin Pzifer à 21 jours d’intervalle. Les participantes de ce dernier essai, d’âge moyen 34 ans, appartenaient aux populations prioritaires pour la vaccination ; leurs bébés avaient un âge moyen de 10 mois. Des échantillons de lait maternel ont été collectés avant la vaccination puis de façon hebdomadaire pendant 6 semaines, à partir de 2 semaines après la première dose.
Les taux moyens d’anticorps IgA dans le lait ont rapidement augmenté et étaient significativement élevés 2 semaines après la première injection. À ce moment-là, 62 % des échantillons étaient positifs, alors qu’en semaine 4 ce taux s’élevait à 86 % (soit 1 semaine après la seconde dose). Ces taux sont restés élevés pendant toute la durée du suivi ; en semaine 6, 66 % des échantillons étaient positifs. Les anticorps IgG, quant à eux ; étaient faibles pendant les 3 premières semaines, mais ont augmenté dès la semaine 4, lorsque 92 % des échantillons ont été testés positifs. Par ailleurs, aucun effet indésirable grave n’a été reporté chez les mères ni les enfants pendant la durée du suivi.
Si aucun test de neutralisation n’a été mené dans cette étude, la capacité de neutralisation de ces mêmes types d’anticorps a été montrée dans d’autres travaux, suggérant qu’ils pourraient conférer une protection aux nouveau-nés – mais cela reste encore à démontrer.
Entre temps, le CRAT n’ayant identifié aucun risque particulier et l’OMS ayant recommandé de poursuivre l’allaitement, il est recommandé aux femmes allaitantes qui font partie de d’un groupe prioritaire (professionnelles de santé, facteurs de risque de Covid-19 grave) de se faire vacciner.
Laura Martin Agudelo, La Revue du Praticien
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Nobile C. Vacciner les femmes enceintes ou allaitantes contre la Covid ? Rev Prat (en ligne), 4 mars 2021.