Type de filtres solaires, composition, études d’efficacité, indice de protection… Comment bien choisir son produit de protection solaire ? Les règles d’or dans ce texte complet et synthétique signé par le Pr Jean-Claude Béani.
Il est aujourd’hui bien connu que l’exposition solaire est délétère pour la peau. En cause : les ultraviolets, tant les UVA que les UVB. Sa suppression totale n’est évidemment pas souhaitable mais il convient d’éviter les heures où l’intensité des UV est maximale, entre 10h et 14 h (heure solaire), soit entre 12h et 16 h à la montre en France métropolitaine l’été.
La photoprotection vestimentaire reste le moyen externe le plus efficace ; les textiles spécifiques, répondant au standard européen (indice de protection anti-UV [UPF] d’au moins 40, avec une transmission des UVA < 5 %), sont particulièrement intéressants chez l’enfant.
PPS : filtres, composition, facteur de protection solaire
Les produits de protection solaire (PPS) occupent actuellement une place majeure en photoprotection externe. En France, ils ont pour la plupart d’entre eux le statut réglementaire de cosmétiques. Ils sont composés de molécules s’opposant à la pénétration de la lumière, qualifiées de filtres solaires, de nature minérale (dioxyde de titane, TiO2, et oxyde de zinc, ZnO) ou chimique (organique). Ces derniers, très nombreux, sont de deux types : à spectre étroit, absorbant uniquement les UVB, et à large spectre, dont l’absorption s’étend aux UVA.
L’addition d’antioxydants, très prisée, n’a pas démontré d’intérêt pour améliorer la protection ; l’ajout de molécules à activité anti-inflammatoire (alfabisabolol, allantoïne, acide 18-b-glycyrrhétinique ou extraits de plantes) est discutable car le coefficient de protection (CP) contre le coup de soleil (qualifié de facteur de protection solaire, SPF en anglais) se trouve de fait artificiellement surestimé, par réduction de la réponse érythémateuse.
Une polémique, relayée par certains médias, a été soulevée sur la fiabilité de la méthode in vivo, basée sur l’évaluation de la protection offerte contre un effet biologique (l’érythème solaire pour le SPF) sur la peau de volontaires sains au profit des méthodes in vitro, relevant des calculs physiques basés sur la spectrométrie et utilisant des substrats variés (transpore ou plaque de polyméthacrylate de méthyle). Ces techniques sont utiles dans les premières étapes de développement des produits solaires, leur résultat restant à valider par une méthode in vivo, au moins pour l’évaluation du SPF.
Le terme de SPF est un abus de langage car le coefficient de protection (CP) ainsi évalué ne qualifie quasiment que la protection contre les UVB, principaux responsables de l’érythème. La détermination d’un CP contre les UVA doit compléter l’évaluation de l’efficacité d’un produit de protection solaire. Un autre paramètre essentiel est la longueur d’onde critique (étendue de la protection vers les UVA longs les plus délétères) ; seule, comme proposé aux États-Unis, elle reste cependant insuffisante pour qualifier l’efficacité réelle d’un PPS1 et doit, comme le préconisent les recommandations européennes, être associée à la détermination du SPF et du CP UVA. Idéalement, le ratio SPF/CP UVA doit être inférieur ou égal à 3.
Quelle efficacité ?
Nul n’est besoin de rappeler l’efficacité de ces produits pour éviter le coup de soleil ; si utilisés correctement, elle est quasiment de 100 %, quels que soient le phototype et les conditions d’ensoleillement…
Les études épidémiologiques ont clairement montré que les PPS, à condition d’offrir une protection harmonieuse contre les UVB et les UVA (selon les standards européens), sont efficaces dans la prévention des cancers cutanés, mélanome compris, induits tant par les expositions environnementales que celles de loisir ; ceux de classe moyenne (SPF 15-30) sont suffisants pour cela. Selon des travaux australiens, leur usage régulier réduit de 9,3 % le risque de carcinome épidermoïde et de 14 % le risque de mélanome.2 Les auteurs d’une vaste revue critique de la littérature ont conclu qu’il faut conseiller à nos patients d’utiliser les PPS pour se prémunir de la survenue des cancers cutanés3 ; d’après la Food and Drug Administration, un PPS de SPF > 15 avec protection contre les UVA est un moyen efficace dans la prévention de ces cancers.
Quel produit choisir ?
Un usage correct est primordial : choix de la bonne classe en fonction du phototype4 et des conditions d’ensoleillement (et non pas universellement des filtres 50+ !) ; application d’une quantité suffisante de produit, en théorie 2 mg/cm2 (ce qui n’est jamais le cas dans la vraie vie), de façon rigoureuse sur toutes les zones exposées ; renouvellement régulier si exposition prolongée ou après un bain ou une sudation abondante.
Attention ! L’application d’un PPS ne doit pas avoir pour but de prolonger inconsidérément les expositions solaires mais de se protéger lors d’expositions de durée raisonnable pour des activités en plein air.
Conseils de protection selon l’index UV (d’après le Haut Conseil de la santé publique5) :
– 1 et 2 : pas de protection requise.
– 3 à 7 : ne pas s’exposer entre midi et 16 h. Porter des vêtements à manches longues, un chapeau à large bords et des lunettes de soleil. Appliquer une crème de protection solaire au minimum d’indice SPF 30+ sur les zones découvertes (50+ chez les enfants).
– 8 à 10 : ne pas s’exposer entre midi et 16 h. Porter des vêtements à manches longues, un chapeau à large bords et des lunettes de soleil. Appliquer une crème de protection solaire au minimum d’indice SPF 50+ sur les zones découvertes. Ne pas exposer les enfants.
– 11 et + : exclure toute exposition aux périodes ensoleillées.
L’indice UV est publié sur les cartes de Météo France (onglet UV)
J.-C. Béani, professeur honoraire de dermatologie.
163, chemin Sainte Claire, 38340 Voreppe, jeanclaudebeani@gmail.com.
Références :
1. Wang SQ, Xu H, Stanfield JW et al. Comparison of ultraviolet A light protection standards in the United States and European Union through in vitro measurements of commercially available sunscreens.J Am Acad Dermatol 2017;77(1):42-7.
2. Olsen CM, Wilson LF, Green AC et al. Cancers in Australia attributable to exposure to solar ultraviolet radiation and prevented by regular sunscreen use.Aust N Z J Public Health 2015;39(5):471-6.
3. Waldman RA, Grant-Kels JM. The role of sunscreen in the prevention of cutaneous melanoma and nonmelanoma skin cancer.J Am Acad Dermatol 2019;80(2):574-6.
4. ANSM. Bon usage des produits de protection solaire. Messages clés. 11 juillet 2017.
5. HCSP. Avis relatif aux recommandations sanitaires associées aux index UV. 2 mai 2019.