L’athérosclérose coronaire peut apparaître à un âge précoce et rester latente pendant de nombreuses années. Pour améliorer son dépistage, des marqueurs sont en cours d’évaluation, mais leur intérêt clinique est débattu. Pour la première fois, une étude parue dans le JAMA a comparé les scores calcique et polygénique aux facteurs de risque CV classiques.

L’évaluation du risque CV est indispensable pour la mise en place de la prévention. Cependant, les facteurs de risque traditionnels fournissent une estimation du risque encore trop imprécise. Quels sont les meilleurs marqueurs aujourd’hui ?

Angiographie coronaire : fiable mais invasive

Une étude danoise, récemment publiée dans les Annals of Internal Medicine, a évalué les caractéristiques de l’athérosclérose associées à la survenue d’un infarctus du myocarde.

Une angiographie coronaire a été réalisée chez 9 553 sujets de plus de 40 ans sans cardiopathie ischémique connue. L’athérosclérose coronaire a été caractérisée en fonction de l’obstruction luminale (non obstructive ou obstructive [≥ 50 % de sténose luminale]) et de son étendue (non étendue ou étendue [un tiers ou plus de l’arbre coronaire]). Le critère de jugement principal était l’infarctus du myocarde et le critère de jugement secondaire était un critère composite (décès ou infarctus du myocarde).

Résultats : parmi les personnes inclues, 54 % n’avaient pas d’athérosclérose coronaire subclinique, 36 % avaient une maladie non obstructive et 10 % une maladie obstructive. Au cours d’un suivi médian de 3,5 ans (de 0,1 à 8,9 ans), 193 personnes sont décédées et 71 ont eu un infarctus du myocarde. Le risque d’infarctus du myocarde était accru chez les personnes atteintes d’une maladie obstructive (risque relatif de 9,19) et étendue (7,65) et maximum en cas d’obstruction et de lésions étendues (risque relatif de 12,48). Le risque d’infarctus et de décès, critère de jugement secondaire, était majoré lorsque les lésions d’athérosclérose coronaire étaient étendues.

Cependant, si l’angiographie est l’examen le plus précis in vivo pour détecter les lésions d’athérosclérose coronaire, leur caractère obstructif et leur étendue, il s’agit d’un acte invasif qui ne peut être appliqué à un dépistage de masse.

Le score calcique fait mieux que les autres scores

De nouveaux marqueurs non invasifs pouvant améliorer la prédiction du risque CV sont en cours d’étude. Les plus prometteurs sont le score calcique coronaire et le score de risque polygénique. Mais quel est le plus performant ? Un nouveau travail publié dans le JAMA a permis de comparer ces deux méthodes.

L’étude – qui a porté sur deux cohortes, la MESA (Multi-Ethnic Study of Atherosclerosis) et la RS (Rotterdam Study) – a inclus au total 3 100 participants de 45 à 79 ans sans maladie cardiovasculaire connue. Le suivi était de 10 ans dans la cohorte RS et allait jusque 17 ans pour la MESA (médiane 16 ans). Les médianes d’âge dans les deux cohortes étaient respectivement de 61 et 68 ans, 52 % de femmes. Au cours du suivi, une coronaropathie est survenue chez 187 participants (9,4 %) et 98 participants (8,1 %), respectivement dans les 2 cohortes

Les facteurs de risque traditionnels (HTA, cholestérol, antécédents…) ont été utilisés pour calculer le risque de coronaropathie (score américain ASCVD), la tomodensitométrie pour déterminer le score calcique et les échantillons génotypés pour calculer un score de risque polygénique.

Les résultats confirment tout d’abord que les scores calciques coronaire et polygénique sont tous deux statistiquement associés au risque coronaire à 10 ans. Mais lequel préférer ?

Pour comparer les scores, les auteurs se sont appuyés sur la statistique « C (concordance) » : elle mesure la capacité d’un modèle à reclasser les patients d’un risque faible à un risque élevé, une valeur de 1 correspondant à une concordance parfaite et une valeur de 0,70 ou plus à une bonne concordance. Avec une statistique C de 0,76 contre 0,69 pour le score de risque polygénique, le score calcique était meilleur. Par ailleurs, lorsqu’il est ajouté aux facteurs de risque traditionnels, il performe mieux dans la reclassification du risque de coronaropathie, ce qui n’est pas le cas du score polygénique.

Ainsi, selon les auteurs cette nouvelle étude confirme que le score calcique est, en association aux autres facteurs de risque classiques, utile pour affiner l’estimation du risque CV chez les patients à risque intermédiaire.

Encadre

Score calcique : comment ça marche ?

Cet examen consiste en une acquisition unique centrée sur le massif cardiaque avec une apnée courte < 5 secondes. L’irradiation est très limitée (< 1 mSv) et ne nécessite pas d’injection de produit de contraste. Il est calculé en sélectionnant toutes les calcifications d’une surface > 1 mm2 ayant une densité > 130 UH (somme des surfaces de chaque calcification, multipliées par leur densité).

Comment interpréter les résultats ?

Un score calcique égal à 0 correspond à un risque CV très faible (< 0,1 % par an d’événements CV) ; une valeur de 1 à 100 à un risque modéré ; de 100 à 400 à un athérome débutant (soit un risque élevé) ; > 400 à des calcifications sévères. Cependant, il convient de comparer le score obtenu à des abaques en fonction de l’âge et du sexe permettant de situer le patient (figure). Un score supérieur au 75e percentile pour l’âge et le sexe est considéré comme à haut risque d’événement CV. Par exemple, si un patient a un score à 95 (donc bas) mais il se situe dans le 80e percentile par rapport aux hommes de son âge, il est à haut risque CV.

Attention : la présence de calcifications coronaires n’est pas synonyme d’ischémie. Le score calcique permet une stratification du risque CV chez un patient asymptomatique mais ne permet pas l’identification d’une coronaropathie. Il n’a aucune utilité chez un patient connu coronarien qui est par définition classé à haut risque CV.

Pour en savoir plus
Khan SS, Post WS, Guo X, et al. Coronary Artery Calcium Score and Polygenic Risk Score for the Prediction of Coronary Heart Disease Events.  JAMA 2023;329(20):1768-77.
Fuchs A, Kühl JT, Sigvardsen PE, et al. Subclinical Coronary Atherosclerosis and Risk for Myocardial Infarction in a Danish Cohort.  Ann Intern Med 2023;176(4):433-42.
Desjobert É. Score calcique : indispensable pour évaluer le risque CV !  Rev Prat (en ligne) 21 mars 2022.

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