La dermatite atopique touche 15 à 30 % des enfants. Le traitement de fond repose sur l’application d’émollients, disponibles dans le commerce sous différentes galéniques (crème, pommade, lait…). Pour la première fois, un essai randomisé anglais a comparé l’efficacité et la sécurité de ces différents vecteurs. Retour sur ces résultats et les modalités d’utilisation des traitements locaux dans cette pathologie. 

Cette dermatose prurigineuse, récidivante, touche avec prédilection les plis de flexion. Les lésions apparaissent durant les premiers mois de vie (dans 60 à 80 % des cas avant l’âge de 1 an). Elles sont érythémateuses, mal limitées, prurigineuses, parfois suintantes et croûteuses (fig. 1). L’évolution se fait par poussées sur fond de sécheresse cutanée permanente. 

Les lésions évoluent vers la lichénification chez le grand enfant, induisant un prurit intense et persistant (fig. 2). À l’adolescence, la dermatite atopique (DA) – ou eczéma atopique – peut s’améliorer, voire disparaître. Elle ne persiste à l’âge adulte que dans 10 à 15 % des cas.

L’utilisation quotidienne d’émollients est le traitement de fond. Le but est de restaurer l’intégrité de la barrière cutanée. Appliqués « tous les jours, partout », ils préviennent les poussées et diminuent leur importance. Lors des poussées aiguës, associés aux dermocorticoïdes locaux (encadré ci-dessous), ils favorisent la rémission. Ils sont recommandés dès la naissance chez les nourrissons à risque (DA ou antécédent de DA chez un des parents).

Comment les appliquer ?

Après la douche ou le bain, la peau est séchée par tamponnement. L’émollient est appliqué sur une peau encore humide, sur toute la surface corporelle sans restriction. Il n’est pas nécessaire d’en mettre une couche épaisse ni de masser. L’aspect de la peau à la fin de cette phase doit être luisant mais le produit ne doit pas se voir.

Quel émollient choisir ?

Les émollients sans parfum ni conservateur fabriqués par les industriels de la dermocosmétique et disponibles en pharmacie et parapharmacie sont à privilégier. Ils ne sont pas remboursés par la Sécurité sociale, à l’exception des génériques du Dexeryl (glycérol, vaseline, paraffine liquide), remboursés à 15 %, et des préparations magistrales.

Il en existe différents types (cérat, cold cream, baume, crème, lait, gel lavant…) dont la consistance varie. Les émollients les plus gras sont souvent privilégiés, mais moins bien acceptés par les patients, ce qui ne favorise pas l’observance. 

Une étude anglaise qui vient de paraître dans le Lancet Child and Adolescent Health est le premier essai randomisé à comparer l’efficacité et la sécurité de différents types d’émollients. Elle a recruté plus de 500 enfants âgés de 6 mois à 12 ans (âge médian : 4 ans ; 46 % de filles) ayant un eczéma atopique modéré (sévérité moyenne de 9,3 selon le score POEM [Patient-Oriented Eczema Mesure]). Les participants ont été répartis dans 4 groupes à parts égales pour être traités 2 fois/jour par un émollient soit en lait, soit en crème, soit en gel, soit en pommade. L’utilisation de dermocorticoïdes était similaire dans les 4 groupes. Le critère d’évaluation principal était la sévérité de l’eczéma mesurée de façon hebdomadaire sur 16 semaines par le score POEM (questionnaires complétés par les parents). Les critères secondaires comprenaient, entre autres, une évaluation des symptômes réalisée par un professionnel de santé (ne connaissant pas le traitement) à 16 semaines, en utilisant le score EASI (Eczema Area Severity Index).

Résultat : aucune différence entre les 4 groupes n’a été constatée concernant la sévérité de l’eczéma, ni dans l’autoévaluation ni dans l’évaluation par un professionnel de santé. Concernant les événements indésirables, leur nombre total ne différait pas significativement selon le traitement utilisé. Les plus fréquents étaient : picotements (mais moins fréquents avec les pommades), érythème, inflammation, sécheresse.

Les parents peuvent donc choisir l’émollient qui s’ajuste le mieux à leurs préférences, sans craindre des répercussions sur l’efficacité du traitement. À noter, toutefois, qu’à la fin de l’étude, la satisfaction reportée par les parents et leur intention à poursuivre le traitement étaient plus importantes dans les groupes « lait » et « gel ».

Encadre

Dermocorticoïdes : quelles modalités ?

Traitement de référence des poussées, ils doivent être appliqués 1 fois par jour (idéalement après l’émollient) sur les lésions jusqu’à disparition de celles-ci (en 5-10 jours habituellement), sans décroissance forcée (de type « tous les jours » puis « 1 jour sur 2 »…) ; en effet, la quantité de DC diminue en raison de la réduction progressive de la taille des atteintes. Il n’y a pas de dose maximale.

Les DC sont classés selon leur puissance. Les formes en crème conviennent à tous types de lésions, notamment étendues, y compris suintantes et localisées dans les plis, tandis que les pommades sont réservées aux zones lichénifiées, hyperkératosiques et sèches.

Pour le cuir chevelu, des mousses ou gels lavants sont utiles. En pratique, on utilise un DC d’activité modérée chez le nourrisson et modérée ou forte chez l’enfant (jamais de DC fort sur le visage).La dose à appliquer est mesurée avec l’unité phalangette : la quantité de pommade ou de crème posée sur la dernière phalange de l’index (soit environ 0,5 g) permet de couvrir une surface lésionnelle équivalente à 2 paumes de mains.

Le produit est posé sur la peau et étalé. Comme pour les émollients, il n’est pas nécessaire de masser ni de mettre une couche épaisse.

Chez les patients ayant des poussées fréquentes, un traitement d’entretien (« proactif ») peut être proposé en prévention des rechutes (application 2 fois par semaine sur les zones habituellement touchées).

Pour en savoir plus
Ridd MJ, Santer M, MacNeill SJ, et al. Effectiveness and safety of lotion, cream, gel, and ointment emollients for childhood eczema: a pragmatic, randomised, phase 4, superiority trial. Lancet Child Adolesc Health 23 mai 2022.
Cart-Tanneur M, Erpeldinger S, Pipard T, et al. Dermatite atopique. Traitements locaux : efficaces dans 90 % des cas.Rev Prat Med Gen 2019;33(1019);279-84.

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