L’Anses a récemment alerté sur l’apparition de plusieurs cas d’éruptions cutanées associées à de fortes démangeaisons, pouvant durer plusieurs semaines, liées à la consommation de champignons Shiitake. Peu connues en Europe et probablement sous-diagnostiquées, ces dermatoses sont de plus en plus fréquentes en raison de l’engouement pour la cuisine asiatique. Comment se manifestent-elles ? Comment les prévenir et les prendre en charge ?

 

L’étude rétrospective de l’Anses sur des cas rapportés aux Centres antipoison entre le 1er janvier 2014 et le 31 décembre 2019 fait état de 70 personnes ayant eu au moins un signe cutané (dont 59 cas de dermatite flagellaire [v. image ci-dessous]) après une consommation de champignons Shiitake crus ou mi-cuits (par exemple : cuisson au wok, ajout dans une soupe ou sur une pizza).

Ces éruptions cutanées – papules et plaques linéaires érythémateuses et urticariennes – apparaissent majoritairement sur le tronc, les bras et les jambes,jusqu’à 7 jours après l’ingestion des champignons et peuvent persister jusqu’à 40 jours. Les symptômes peuvent se réactiver en cas de nouvelle ingestion, et leur durée semble être dose-dépendante (avec une durée médiane de la dermatite de 4 jours pour une quantité ingérée estimée à moins de 60 g, versus 7 jours pour 60 à 150 g et 15 jours pour plus de 150 g, selon cette revue des cas).

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Si l’Anses avait déjà alerté en 2015 sur ces risques d’intoxication, une persistance de leur nombre est observée, le champignon Shiitake étant le plus consommé au monde après le champignon de Paris. Arrivé sur le marché européen depuis plusieurs années, ce champignon gagne de la popularité à la faveur d’un engouement croissant pour la cuisine asiatique, et est désormais cultivé en France. Toutefois, malgré cette présence croissante, le lien entre sa consommation et l’apparition de ce type de dermatite, souvent confondue avec une photodermatite, n’est pas toujours fait par le consommateur ou son médecin, ce qui peut conduire à une sous-estimation des cas.

L’Anses et les Centres antipoison rappellent ainsi aux consommateurs aussi bien qu’aux professionnels de la restauration l’importance de cuire le Shiitake à cœur avant de le consommer, quelle que soit sa présentation (frais, séché…). La cuisson rapide au wok est, par exemple, insuffisante pour la détruire la substance toxique qui serait en cause dans ces dermatites (le lentinan, un polysaccharide thermolabile), comme l’attestent plusieurs cas survenus après la consommation dans des restaurant utilisant ce type de cuisson.

Tous les cas recensés dans ce dernier rapport se sont complètement rétablis avec ou sans traitement symptomatique associé (corticoïdes ou antihistaminiques).

Le diagnostic différentiel est la dermatose flagellée secondaire à l’introduction de bléomycine, avec atteinte muqueuse et hyperpigmentation séquellaire.

Pour en savoir plus, notre cas clinique :

Devred M, Le Guern A, Gillard M. Shiitake dermatitis. Rev Prat 2018;68:408.

LMA, La Revue du Praticien

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