Ces infections cutanées sont dues à des champignons microscopiques, dont la prolifération est favorisée par la chaleur et l’humidité. Comment reconnaître les lésions et quels traitements proposer en premier choix ?
Les atteintes fongiques de la peau glabre peuvent être dues à 2 types de champignons : les levures du genre Malassezia et les dermatophytes (tableau).
Malassezia
Les Malassezia sont des levures lipophiles, saprophytes de la peau, présentes dans les régions riches en glandes sébacées (haut du corps principalement). Elles peuvent se multiplier sous l’influence de certains facteurs (soleil, transpiration, grossesse …) et être responsables de petites taches achromiques et/ou hyperpigmentées. C’est le pityriasis versicolor (figure 1). Pour les présentations cliniques atypiques, le diagnostic peut être confirmé au laboratoire par la technique du scotch-test cutané qui met en évidence des levures en grappe associées à des filaments en microscopie optique. Le traitement repose sur l’application d’un antifongique topique sur tout le corps sous forme de shampoing en une seule application (kétoconazole unidose), éventuellement répétée 15 jours après et/ou avant un séjour au soleil. Il faut prévenir le patient de l’absence de repigmentation ou de dépigmentation immédiate afin d’éviter des traitements itératifs inutiles.
Dermatophytes
Les dermatophytes (Microsporum, Trichophyton) sont des champignons filamenteux pathogènes qui possèdent une affinité pour la kératine. Sur la peau, ils envahissent la couche cornée et évoluent de façon centrifuge en formant un anneau caractéristique. C’est le classique « herpès circiné » (figure 2). Les lésions sont typiquement arrondies, claires au centre, érythémato-squameuses en périphérie, et prurigineuses.
L’origine du champignon peut être zoophile, anthropophile ou, plus rarement, tellurique (tableau). Aussi, devant toute suspicion de dermatophytie, il faut interroger le patient, à la recherche d’un contact animal (rechercher surtout un jeune animal, par exemple chat, lapin, cochon d’Inde, rat…), d’un séjour à l’étranger, de la pratique d’un sport de contact (judo ++), de lésions identiques dans la fratrie. Les dermatophyties d’origine zoophile siègent sur les zones découvertes et/ou à l’endroit où le contact animal a eu lieu. La symptomatologie est en général plus bruyante qu’avec les souches anthropophiles : les lésions sont très érythémateuses, avec une bordure surélevée et vésiculeuse, souvent multiples et prurigineuses. Les dermatophyties anthropophiles sont en général moins inflammatoires, de taille plus grande et peu prurigineuses. Elles siègent soit au niveau du contact, soit sur le tronc ou les membres quand il s’agit d’une autocontamination à partir d’un foyer aux pieds.
Les diagnostics différentiels sont nombreux : eczéma nummulaire, eczématides ou dermatite atopique, pityriasis rosé de Gibert, lupus érythémateux. En pratique, il faut les évoquer lorsque les lésions cutanées sont étendues ou n’ont pas de bordure ni squameuse ni marquée, ou en cas d’échec d’un traitement antifongique. En cas de doute, le diagnostic est confirmé par un prélèvement mycologique effectué à la périphérie des lésions. L’intérêt du prélèvement est de préciser l’espèce en cause afin de traiter la source de la contamination (l’animal vecteur le cas échéant).
Le traitement local est généralement suffisant. On utilise surtout les dérivés imidazolés (éconazole, Pevaryl ; miconazole, Daktarin) mais aussi la ciclopiroxolamine (Mycoster) et la terbinafine (Lamisil crème 1 %). L’aspect clinique guide le choix de la galénique : crème, émulsion pour les lésions cutanées sèches ; lotion, poudre, solution, gel pour les formes macérées, suintantes. L’antifongique local doit être appliqué 1 ou 2 fois par jour selon la molécule choisie, et pendant une durée d’un mois. Selon les dernières méta-analyses comparatives, il n’y pas de preuve d’une meilleure efficacité clinique d’un antifongique local par rapport à un autre.
Quant à leur tolérance, ils exposent tous à de rares effets indésirables, surtout érythèmes, irritations, réactions allergiques locales… Les imidazolés seraient toutefois à préférer (atteintes hépatiques très rares décrites avec la terbinafine) notamment chez la femme enceinte. Par ailleurs, de manière générale, les formes en crème (sans alcool) exposeraient à moins d’irritations cutanées.
Attention : la source de la contamination doit aussi être traitée (consultation vétérinaire, partenaire de judo, intertrigo et/ou onyxis des orteils…).
En cas d’échec, il faut s’assurer tout d’abord que le traitement a été bien conduit par le patient (nombre d’applications et durée).
Si les lésions sont multiples, inflammatoires, touchant aussi les zones pileuses (teignes), ou associées à une pathologie unguéale, un traitement per os est indiqué par itraconazole ou terbinafine. Pour rappel, chez l’enfant, seule la griséofulvine avait une AMM en France. Depuis l’arrêt de sa commercialisation, de nouvelles recos ont été élaborées par Société française de dermatologie.
Nobile C. Teignes chez l’enfant : les nouvelles recos !Rev Prat 5 juillet 2021.
Hua C, Bernigaud C, Foulet F, et al. Item 155. Infections cutanéo-muqueuses et des phanères, bactériennes et mycosiques, de l’adulte et de l’enfant.Rev Prat 2020;70(9);e311-318.
Dermatophytoses de la peau glabre : des mycoses contagieuses et bénignes.Rev Prescrire 2021;41(458):922-5.