Objectifs
Diagnostiquer une anomalie du développement psychomoteur, intellectuel et affectif.
Repérer précocement les dysfonctionnements relationnels et les troubles de l’apprentissage.
Item 55. Développement psychomoteur du nourrisson et de l’enfant : aspects normaux et pathologiques (sommeil, alimentation, contrôles sphinctériens, psychomotricité, langage, intelligence). L’installation précoce de la relation parents-enfant et son importance. Troubles de l’apprentissage.
Partie 2 / Développement psychomoteur du nourrisson et de l’enfant : aspects normaux et pathologiques (langage, intelligence). L’installation précoce de la relation parents-enfant et son importance. Troubles de l’apprentissage

Troubles du neurodéveloppement (rang B)

Les troubles du neurodéveloppement (TND) correspondent à un défaut de développement d’une ou plusieurs compétences cognitives attendues lors du développement psychomoteur et socio-affectif de l’enfant, qui entraîne un retentissement important sur le fonctionnement adaptatif scolaire, familial et social.
Si chaque trouble du neurodéveloppement possède des spécificités qu’il convient de repérer et prendre en compte, tous partagent des points communs qui justifient une approche décloisonnée de repérage, diagnostic, interventions et accompagnement personnalisé.
Les principaux facteurs de risque de trouble du neuro­développement sont cités dans le tableau. En complément d’un examen médical complet du développement psychomoteur, des questionnaires cliniques ou des entretiens semi-structurés peuvent être utilisés. Nous n’aborderons pas les troubles déficitaires de l’attention avec ou sans hyperactivité (TDAH) ni les troubles du spectre autistique (TSA), traités dans d’autres items.

Signes d’alerte

Les signes d’alerte sont une déviation importante de la trajectoire développementale de l’enfant à un âge donné (chronologique ou corrigé), à 6 mois, 18 mois, 24 mois, 36 mois, puis à 4 ans, 5 ans et 6 ans. Ils sont regroupés selon l’âge en quatre ou cinq domaines de développement : la motricité globale, le contrôle postural et la locomotion, la motricité fine, le langage, la socialisation et la cognition (à partir de 4 ans). Ils constituent des critères d’orientation vers une consultation spécialisée ou une plateforme dédiée : trouble du neurodéveloppement et/ou trouble spécifique du langage et des apprentissages (TSLA) [2e ligne]. La présence de facteurs de haut risque de trouble du neurodéveloppement, quel que soit l’âge, et l’évaluation des comportements instinctuels, sensoriels et émotionnels constituent deux dimensions essentielles à évaluer. Il s’agit du sommeil, de l’alimentation, du profil sensoriel et sensorimoteur, et de la régulation émotionnelle. Ils ne sont pas associés à un âge de développement et ne peuvent pas constituer à eux seuls une valeur prédictive du développement de l’enfant. Pour tout enfant scolarisé, il est recommandé, après accord des parents, de faire le lien avec l’école afin d’évaluer les apprentissages.
Des bilans spécialisés, réalisés par des professionnels (orthophoniste, ergothé­rapeute, psychologue, etc.) peuvent être prescrits pour étayer le diagnos­tic positif, ainsi que la mise en place d’une rééducation, en fonction des résultats. Un bilan psychométrique (« test de QI »), lors d’une évaluation neuropsychologique, peut être réalisé pour évaluer les compétences intellectuelles et rechercher une dissociation entre des compétences déficitaires et d’autres préservées, sur lesquelles appuyer les apprentissages.

Principaux types de troubles


Troubles du développement intellectuel

Les troubles du développement intellectuel (appelés antérieurement déficience intellectuelle) se définissent par un déficit global des capacités cognitives associé à des capacités adaptatives limitées (communication, autonomie, sociabilisation). Leur prévalence est de 2 à 3 % en population générale. Les principaux points d’appel à rechercher sont un retard de langage, un retard global de développement, des difficultés d’apprentissage et des troubles du comportement. La sévérité est classiquement précisée grâce au quotient intellectuel (QI), qui peut être évalué à partir de l’âge de 3 ans, avec prudence sur l’interprétation avant 5 ans. Le déficit est considéré à partir d’un score inférieur à 70. Le degré de sévérité est classé en léger (QI de 50 à 69), moyen (de 35 à 49) ou sévère (inférieur à 35). Selon le DSM-5, le degré de sévérité ne doit plus se fonder sur le seul QI mais prendre en compte le niveau d’adaptation, évalué sur un questionnaire standardisé (tel que la VABS-2, ou échelle de Vineland), renseigné par les parents ou les professionnels référents.

Troubles de l’acquisition des coordinations motrices

Les troubles développementaux de la coordination (appelés antérieurement dyspraxie) se caractérisent par des difficultés graphiques, une maladresse, une lenteur dans les tâches motrices avec un retentissement dans la vie quotidienne. Ces troubles incluent les troubles de l’apprentissage du graphisme, antérieurement nommés dysgraphie.
Les points d’appel à rechercher sont : un désintérêt pour les jeux faisant appel à la construction, au dessin, les jeux moteurs, des difficultés pour l’habillage, la toilette, les repas, des difficultés graphiques, dans le dessin, les découpages, des chutes fréquentes.

Troubles de la communication

Deux types de troubles de la communication sont à distinguer : les troubles de la parole et les troubles spécifiques du langage oral. Les troubles de la parole sont caractérisés par un déficit de l’articulation (troubles articulatoires) ou de la fluence (bégaiement).
Pour les troubles spécifiques du langage oral (antérieurement dysphasie), on observe un déficit de la phonologie, du lexique, de la syntaxe ou de la pragmatique (utilisation du langage en contexte social). Les signes d’appel sont, à 18 mois, l’absence de babillage et de mots et, à 24 mois, un langage pauvre, l’absence d’association de mots, une compréhension altérée.
Il est important d’éliminer un déficit de la communication verbale et non verbale pouvant faire suspecter un trouble du spectre de l’autisme.

Troubles spécifiques des apprentissages scolaires

Le repérage implique les parents (la famille), les professionnels de la petite enfance, les enseignants et les professionnels de santé.
Des signes spécifiques, comme un décalage dans l’apprentissage de la lecture, de l’écriture, du calcul, et des signes peu spécifiques, comme une agitation, une opposition, une maladresse, une lenteur, des troubles somatiques (douleurs abdominales, troubles du sommeil), peuvent être évocateurs de trouble des apprentissages.
Le lien entre le médecin et les professionnels de l’Éducation nationale est primordial à la suite du repérage de troubles spécifiques des apprentissages scolaires.

Comorbidités des troubles spécifiques du langage et des apprentissages (rang B)

L’association fréquente des troubles du neurodéveloppement entre eux impose de rechercher et d’éliminer les autres troubles du neurodéveloppement ; par exemple, troubles spécifiques du langage et des apprentissages et trouble du déficit de l’attention avec hyper­activité. Il est également primordial de rechercher une comorbidité psychiatrique, notamment des trouble anxieux, de l’humeur ou du comportement (opposition avec provocation, trouble des conduites), plus fréquents qu’en population générale.

Principaux troubles spécifiques du langage et des apprentissages (rang B)

Troubles de l’apprentissage du langage écrit (lecture, expression écrite)
Il s’agit d’une perturbation de l’acquisition de la lecture et de l’écriture (antérieurement dyslexie et dysorthographie, dont la prévalence est d’environ 10 %.
Les signes d’appel sont une difficulté à faire associer les signes écrits et le son qu’ils symbolisent, une lecture anormalement lente, une écriture illisible avec des erreurs phonétiques fréquentes. En cas de difficultés de compréhension des textes, il est nécessaire d’éliminer une déficience intellectuelle. Le bilan orthophonique du langage oral et du langage écrit évalue les performances en lecture et en écriture.
Troubles de l’apprentissage avec déficit du calcul
Les troubles de l’apprentissage avec déficit du calcul (anciennement dyscalculie) se définissent par une mauvaise perception des quantités numériques. Les signes d’appel à rechercher sont des difficultés d’accès au symbole, de nombreuses erreurs dans le comptage, des difficultés à dénombrer une collection d’objets. Le bilan orthophonique évaluant les performances en calcul permet d’en poser le diagnostic.

L’installation précoce de la relation parents-enfant et son importance

Les interactions précoces parents-enfant influencent le développement des compétences cognitives (langage, raisonnement, attention, motricité), la régulation des émotions et du comportement, ainsi que la socialisation de l’enfant. Elles conditionnent étroitement la qualité des relations que l’enfant nouera avec son entourage proche, et plus généralement avec son environnement de vie.

Concept de la relation parents-enfant (rang B)

La théorie de l’attachement (de l’enfant vers son parent) et le concept de « caregiving » (du parent vers son enfant) illustrent tous deux le besoin de sécurité et de protection du nourrisson qui évolue dans un milieu extérieur dont il ne peut se protéger seul.
Le principal objectif de ces deux systèmes consiste ainsi à maintenir une proximité physique et des échanges émotionnels, le plus ajustés possible, entre le bébé et son parent (« caregiver »). En ce sens, différents signaux d’alarme produits par le nourrisson (par exemple signal de détresse, impression de vulnérabilité ou d’immaturité) permettent d’avertir son « caregiver » qui, en retour, apporte une réponse adaptée et donc apaisante pour l’enfant. Lorsque ces interactions circulaires restent globalement stables et non arbitraires dans le temps, cette dynamique relationnelle produit une base de sécurité pour le bébé, lequel pourra ensuite interagir et se développer de façon harmonieuse avec le monde extérieur. Ce type de relations parents-enfant dites « sécures » – répondant aux besoins affectifs du nourrisson – permet à l’enfant de supporter la frustration, les tensions internes liées à la séparation, aux conflits, mais surtout il favorise la construction d’une image de soi positive, nécessaire pour s’adapter aux multiples situations changeantes de la vie et s’ouvrir sur un monde parfois imprévisible.

Mise en place de la relation parents-enfant (rang B)

À ce jour, les systèmes neurocognitifs qui sous-tendent ces concepts chez l’être humain ne sont pas clairement identifiés. On considère cependant qu’ils s’installent dès la naissance et impliquent l’axe corticotrope du nouveau-né ainsi que l’axe hypophyso-gonadotrope du parent ; notamment celui de la mère à la suite de modifications hormonales spécifiques liées à la grossesse.
On considère aujourd’hui que la structuration et la nature des liens avec une ou plusieurs figures d’attachement se développent plus spécifiquement durant les quatre premières années de vie.

Repérage des dysfonctionnements relationnels (rang A)

Les expériences précoces et répétées de séparation avec les parents ou autre « caregiver », les carences affectives graves, les abus et/ou maltraitances peuvent induire des troubles réactionnels de l’attachement. Il existe différentes perturbations de l’interaction parents-­enfant : l’excès de stimulation (pas de pause des stimulations de l’adulte), le défaut de stimulation (absence ou peu d’interactions par l’adulte) et la perturbation de la réciprocité (difficultés d’adaptation de l’adulte au rythme de l’enfant, par exemple en cas d’épisode dépressif caractérisé du post-partum).
Ces troubles se manifestent globalement par des difficultés de régulation des émotions, des difficultés relationnelles et comportementales de l’enfant, en écho avec les désordres de son environnement de vie. Le repérage des situations socioéconomiques précaires, des troubles anténataux et périnataux ainsi que des troubles psychopathologiques chez les parents constitue, à ce titre, une priorité majeure de santé publique.
Toute situation à risque doit être évaluée, puis accompagnée précocement et avec la plus grande attention dès la maternité, le service de néonatologie ou la consultation libérale. Les dispositifs de soins ambulatoires de la petite enfance (Protection maternelle et infantile, maison/centre de santé, soins à domicile, réseau de santé de périnatalité) sont à ce titre régulièrement sollicités.
Points forts
Développement psychomoteur du nourrisson et de l’enfant - P. 2. Aspects normaux et pathologiques (langage, intelligence)

POINTS FORTS À RETENIR

Quel que soit l’âge, une inquiétude des parents et/ou des professionnels de l’enfance en contact avec l’enfant, une régression ou une absence de progression des acquisitions de l’enfant doivent donner lieu à un examen clinique complet et détaillé du développement.

Le lien entre tous les professionnels s’occupant de l’enfant et les parents est primordial pour le repérage et la prise en charge de l’enfant.

Une consultation à 18 mois est recommandée ; s’agissant d’un âge charnière pour repérer les signes d’appel d'un trouble du spectre de l’autisme, une stagnation ou une régression.

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