Bien que les diabétiques soient reconnus comme des sujets à risque de forme grave de Covid, le diabète est-il un facteur de risque indépendant de l’âge ? Les conclusions d’une étude menée par l’AP-HP viennent d’être publiées…

 

Des données publiées fin février dans le Bulletin épidémiologique hebdomadaire signalaient que parmi les personnes hospitalisées pour Covid au cours du premier semestre 2020, 20 % étaient diabétiques. Parmi ces patients il y avait principalement des hommes (60,3 %), âgés en moyenne de 72,1 ans ; 24,2 % d’entre eux sont décédées à l’hôpital. Mais que sait-on de l’association entre le diabète et les formes graves de Covid (et la mortalité qui s’ensuit) pour les sujets plus jeunes ?

Une étude rétrospective observationnelle menée sur des données des hôpitaux de l’AP-HP a permis d’affiner les connaissances à ce sujet. Les chercheurs ont analysé les données de 6 314 patients hospitalisés pour Covid entre février et juin 2020 (avec un suivi à 90 jours après l’admission à l’hôpital avec une PCR positive), dont 39 % étaient diabétiques, d’âge médian 69 ans (70 chez les non diabétiques) et en majorité des hommes (65 %, contre 54 % des non diabétiques).

Les analyses de sous-groupes en fonction de l’âge et du statut diabétique ont montré que les patients diabétiques avaient un risque plus élevé que les non diabétiques d’être admis en soins intensifs avec intubation orotrachéale et/ou de mourir (multiplié par 1,13 après ajustement pour d’autres comorbidités, dont les plus fréquentes étaient l’obésité ou surpoids et l’hypertension artérielle), la différence entre les deux groupes diminuait avec l’âge. En effet, ce risque était multiplié par 1,52 pour les patients de moins de 50 ans, tandis qu’il diminuait à 1,30 pour ceux âgés de 60 à 70 ans et n’était plus significatif pour ceux de plus de 70 ans.

Autrement dit, le diabète est un facteur de risque indépendant de forme grave de Covid surtout pour les catégories d’âge les plus jeunes (principalement chez les personnes de moins de 70 ans mais plus encore chez celles de moins de 50 ans).

Des résultats similaires ont été obtenus pour la mortalité : le taux de mortalité hospitalière était plus élevé chez les sujets diabétiques (26 %, contre 22 % chez ceux qui ne le sont pas) et il augmentait avec l’âge, mais le diabète n’apparaissait comme un facteur de risque indépendant de mortalité pour Covid que chez les patients de moins de 50 ans.

Dans cette étude, la différence entre le diabète de type 1 et 2 n’était pas renseignée, mais une autre étude observationnelle française (Coronado : Coronavirus SARS-CoV-2 and Diabetes Outcomes), qui avait analysé les données de près de 2 800 adultes (âge moyen : 69,7 ans ; 63,7 % d’hommes) au niveau national, avait suggéré que la sévérité de la maladie et le risque de décès étaient plus importants chez les diabétiques de type 2 que chez les diabétiques de type 1 (10,6 % versus 5,4 %) et que cet écart était présent surtout chez les patients les plus jeunes (< 55 ans).

Ces résultats rappellent l’importance de la prévention pour les personnes diabétiques, notamment la vaccination et le respect des mesures barrières. Il faut également rappeler l’importance du dépistage du diabète et de son suivi clinique afin de prévenir la survenue des complications.

Chez qui doser la glycémie ?

Le diabète de type 2 reste asymptomatique pendant plusieurs années, avant que l’hyperglycémie ne dépasse 2 g/L et entraîne une glycosurie.

Ainsi, il faut repérer les sujets à risque, c’est-à-dire ayant :

– une obésité ;

– des signes du syndrome métabolique (tour de taille élevé, dyslipidémie avec hypertriglycéridémie et HDL-cholestérol bas, HTA) ;

– des antécédents familiaux de diabète et obstétricaux (macrosomie néonatale ou diabète gestationnel).

Ils doivent motiver un dosage de glycémie à jeun (on parle de dépistage « opportuniste »).

Le diagnostic repose sur la mise en évidence d’une glycémie à jeun supérieure à 1,26 g/L. À partir de ce seuil, le risque à long terme de complications microvasculaires spécifiques (rétinopathie) est significatif. La confirmation du diagnostic requiert soit 2 dosages témoignant d’une hyperglycémie (à 2 moments différents), soit une seule mesure supérieure à 2 g/L accompagnée de signes cliniques (syndrome polyuro-polydipsique, amaigrissement).

Pour l’Association américaine du diabète, on peut établir le diagnostic lorsque l’HbA1c est supérieure à 6,5 %. En France, la majorité des premiers dosages de ce marqueur est déjà indiquée à visée de dépistage.

Laura Martin Agudelo, La Revue du Praticien 

Pour en savoir plus :

Diedisheim M, Dancoisne E, Gautier JF, et al. Diabetes Increases Severe COVID-19 Outcomes Primarily in Younger Adults.JCEM 1 juin 2021.