Le diagnostic différentiel du trouble obsessionnel compulsif (TOC) est avant tout clinique. Un certain nombre de ces diagnostics sont également des comorbidités fréquentes du TOC.1
Le syndrome de Gilles de La Tourette et les tics complexes se présentent comme des actions, séquences motrices (ou vocalisations) plus ou moins complexes, soudaines, intermittentes, involontaires, répétitives et stéréotypées, mais non rythmiques. Elles n’ont pas de but et sont précédées d’un besoin de bouger qui peut être transitoirement contrôlé. Les rituels sont en revanche précédés d’une obsession et/ou d’une détresse émotionnelle progressivement croissante que le rituel « neutralise ». Les automutilations, parfois présentes dans la maladie de Gilles de La Tourette, peuvent aussi révéler des pathologies associées au TOC telles que la dermatillomanie (ou la trichotillomanie), qui sont des dermabrasions (ou arrachage de cheveux) répétitives, excessives et lésionnelles, à visée anxiolytique.2
L’anorexie mentale se manifeste par un contrôle rigide du poids et des facteurs qui le détermine. Obsessions, rituels et évitements sont tous trois susceptibles d’interférer avec l’alimentation mais ne se limitent pas au contrôle du poids : éviction superstitieuse de groupes d’aliments ou contamination ; rituels longs et complexes pour porter les aliments à la bouche ; évitement des repas… Par ailleurs, l’obsession d’une dysmorphie corporelle, autre pathologie associée au TOC, se manifestant par des obsessions envahissantes concernant l’aspect de certaines parties du corps (par exemple : calvitie, qualité de la peau…) mais sans contrôle rigide du poids et indépendante de tout rituel, doit être envisagée dans ce contexte.3
La thésaurisation pathologique est une accumulation d’objets rendant inutilisable l’espace de vie due à la détresse émotionnelle induite par l’idée de se séparer de certains objets. Celle-ci doit être distinguée des accumulations résultant indirectement d’obsessions (peur de faire du mal, responsabilité, catastrophe), de rituels (vérification qu’on ne jette pas quelque chose d’important) ou d’évitement.
La personnalité obsessionnelle est souvent confondue avec le TOC, alors que celle-ci ne concerne qu’une minorité des patients ayant un TOC. Il s’agit d’un mode général et stable de contrôle rigide, inadapté et excessif, de perfectionnisme qui touche tous les aspects de la vie, sans qu’il y ait d’obsessions (pensée, image ou pulsion intrusive) ou de rituels.
Les ruminations rencontrées dans les troubles dépressifs caractérisés peuvent parfois paraître « obsédantes », surtout lorsqu’elles sont intenses et concentrées sur un nombre restreint de thèmes. Elles sont cependant toujours congruentes à l’humeur et pas à proprement parler intrusives, puisqu’elles témoignent d’une détresse émotionnelle présente la plupart du temps, mais ne la déclenchent pas.
Le trouble anxieux généralisé se caractérise par des soucis centrés sur le quotidien à l’origine d’une anxiété permanente et excessive, qui n’est pas neutralisée par des rituels. Il peut être associé à des comportements d’évitement ainsi qu’à des demandes répétitives de réassurance parfois très pressante, ce qui constitue une difficulté diagnostique supplémentaire.
Certains patients souffrant de TOC n’ont pas un insight (prise de conscience) complet du caractère excessif et/ou irrationnel de leurs rituels et obsessions, ce qui peut faire évoquer l’anosognosie des patients schizophrènes. D’autres ont des TOC purement obsessionnels qui peuvent faire d’autant plus facilement évoquer des idées délirantes paranoïdes que les obsessions ont pour thème la moralité, la religion ou des croyances superstitieuses. Dans ce contexte, le diagnostic est guidé par l’absence de symptomatologie positive, les antécédents familiaux et la présence passée de symptômes typiques de TOC.
Les patients ayant un trouble du spectre autistique mettent souvent en place des routines rigides et stéréotypés, des répétitions d’action ainsi que des mouvements sans but fonctionnel évident appelés « stéréotypies motrices » et pouvant faire évoquer des rituels. Ces stéréotypies traduisent la difficulté à s’adapter à la nouveauté et ne correspondent pas aux thématiques habituellement rencontrées dans le TOC, elles ne répondent pas à des obsessions.
Certains TOC sont secondaires à des maladies neuropsychiatriques complexes auto-immunes ou paranéoplasiques (encéphalites à anticorps anti-D2R), post-infectieuses (paediatric autoimmune neuropsychiatric disorders associated with streptococcus infections), ou métaboliques (neurodegeneration with brain iron accumulation, homocystinurie et maladie de Niemann-Pick). L’anormalité de l’examen neurologique et de l’imagerie par résonance magnétique encéphalique sont alors des éléments d’orientation importants.
Références
1. Stein D, Costa DLC, Lochner C, et al. Obsessive-compulsive disorder. Nat Rev Dis Primers 2019;5:52.
2. Leckman JF, Denys D, Simpson HB, et al. Obsessive-compulsive disorder: a review of the diagnostic criteria and possible subtypes and dimensional specifiers for DSM-V. Depress Anxiety 2010;27:507-27.
3. Brainstorm Consortium, Anttila V, Bulik-Sullivan B, et al. Analysis of shared heritability in common disorders of the brain. Science 2018;360:eaap8757.